Zeghrine, le village élu de Feyrouz

Et si l’on vous racontait que Feyrouz, indétrônable reine de la chanson libanaise, a construit sa dernière demeure dans le village de Zeghrine ? Ne seriez-vous pas intéressé d’y jeter un coup d’œil et de visiter ce village que la diva libanaise a choisi parmi tous les autres ? Ce week-end, prenez l’autoroute vers le Metn-Nord et rendez-vous dans ce petit village où vous passerez les derniers jours de l’été, comme le dit bien la chanson de Feyrouz « Akher ayyam es-sayfiyyi ».

Commencez votre tournée dans le village par ce mausolée qu’a construit Feyrouz il y a quelques années. Sur sa tombe, il ne sera pas nécessaire de graver « Ci-gît Feyrouz ». L’ensemble du mausolée est construit à partir de murs alignés suivant la calligraphie du mot Feyrouz en arabe. Celui qui le regarde depuis un balcon élevé pourra lire son nom.

Si vous n’avez pas les moyens de le voir de très haut, le site est ouvert au public. Vous pouvez choisir de commencer votre promenade par la lettre « f » comme par la lettre « z » écrite à l’envers pour donner une sorte d’encadrement au mot et par conséquent au mausolée. Entre ces lettres en pierre, se trouve une chapelle des plus simples : l’autel est formé de deux grands rochers. L’un de forme rectangulaire est posé sur l’autre qui lui sert de support. Le plafond comprend de fines planches de bois qui ressemblent plus à des branches d’arbre qu’à un véritable toit. La lumière qui passe à travers ces branches dessine un tableau d’ombres dansantes sur les murs de la chapelle, envahis par une végétation sauvage qui les couvre ici et là. Pour le reste, un jardin est aménagé entre le « r » et le « o ». Quant à la lettre « z », elle est décorée d’un olivier. Seul cet olivier et une croix en bois veillent sur ce monument imposant.

Pourquoi Zeghrine et pourquoi cet endroit en particulier ? À en croire les rumeurs qui circulent parmi les habitants de Zeghrine, Assi Rahbani venait régulièrement s’asseoir sur un rocher, non loin de cet olivier, pour méditer, écrire et composer les meilleures chansons de Feyrouz. Ce monument fait la fierté des habitants de Zeghrine, qui se disent heureux que leur village ait été choisi par la diva, ponctuant leurs propos de souhaits de longue vie à leur future voisine ! « Nous ne sommes pas du tout pressés de l’accueillir », répètent-ils invariablement.

Le temps suspend son vol
Après une promenade dans les recoins du futur mausolée de Feyrouz, offrez-vous une balade à cheval au club équestre de Zeghrine, l’un des meilleurs du pays. Niché dans ce petit village perdu, il attire non seulement les professionnels et les amateurs de ce sport, mais également les curieux et les quelques touristes qui visitent le village de temps à autre.

Georges Francis, propriétaire du club, sera ravi de vous donner un avant-goût de ce sport que certains pratiquent comme un loisir, alors que d’autres le considèrent comme étant un art en soi. Les moins téméraires pourront également se poser, au couchant, sur les gradins qui entourent le manège et admirer les cavaliers à l’oeuvre.

À proximité du club, se trouve Jalset Liza. Ce restaurant, le seul du village, est posé au beau milieu de la nature. Ses propriétaires n’ont rien changé et rien construit sur le terrain. Ils se sont contentés de mettre en place des tables et des chaises en plastique, et quelques lampes pour éclairer l’endroit. Plusieurs tables sont posées sous les feuillages des arbres, et l’ensemble du restaurant offre sur une vue à couper le souffle et des couchers de soleil aux mille couleurs.

Jalset Liza vous offre des manakiche au saj, du thé et des tisanes, et une grande variété de mets et mezzés libanais. Attention, le service est très lent. Cela ne sert à rien d’en faire la remarque au propriétaire, il le sait déjà. C’est peut-être parce que le temps dans ces petits villages de montagne passe très lentement. À Zeghrine, on a l’impression que le temps a suspendu son vol, comme l’a bien voulu Lamartine, pour que vous puissiez savourer les délices de vos plus beaux derniers jours d’été.

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