Des habitants dans une rue du camp de réfugiés palestiniens de Aïn el-Heloué, au Liban-Sud. Photo d'archives AFP
Un nouvel incident a troublé hier la sécurité dans le camp de réfugiés palestiniens de Aïn el-Heloué (près de Saïda), coïncidant avec une marche contre le plan de réorganisation de la main-d’œuvre étrangère mis en œuvre par le ministère du Travail.
Le fils d’un cadre du Fateh qui prenait part à la marche a été liquidé par un homme masqué, identifié par la Sécurité du camp comme étant Youssef Arqoub, fils de Bilal Arqoub, chef d’un groupe radical qui porte son nom, selon des sources concordantes. La victime, du nom de Hassan Alaeddine, alias al-Khamini, fils de Jamal Alaeddine, officier du Fateh, a été visé par des tirs alors qu’il se trouvait à l’arrière de la procession dans la rue al-Fawqa, près de la mosquée al-Safsaf. Il n’a pas tardé à succomber à ses blessures à l’hôpital al-Labib à Saïda. Son assassinat a provoqué des accrochages armés entre les proches de la victime et le groupe de Bilal Arqoub. Mais les violences « n’ont pas duré plus de trente minutes, suivies de tirs intermittents », qui ont fini par cesser en début de soirée, selon une source politique de Saïda. Le général Mounir Maqdah, chef des forces du Fateh au Liban, a indiqué à L’Orient-Le Jour que les accrochages ont « à peine duré quinze minutes ».
(Pour mémoire : Aïn el-Héloué vers l’accalmie, après le meurtre d’un cadre du Fateh)
Volonté d’apaisement manifeste
La volonté de contenir la situation était palpable dans les milieux du Fateh. Aussi, M. Maqdah s’est-il retenu de se prononcer sur les orientations politiques de la victime. Âgé d’une vingtaine d’années, issu d’une famille politiquement hétéroclite, Hassan Alaeddine avait un frère membre de Esbat al-ansar (faction islamiste pro-Hezbollah), ce qui rend plus facile d’entretenir la confusion autour de son appartenance. Aussi, la source politique de Saïda a précisé que la victime était elle aussi membre de Esbat al-ansar, tandis que le général Maqdah a affirmé que Alaeddine n’avait « aucune appartenance politique ». Ces deux versions, bien que divergentes, ont en commun de servir à mettre le Fateh à l’écart d’un conflit avec les islamistes (ou ceux qui se présentent comme tels), dans lequel il risque d’être entraîné.
Le Fateh compte sur une solidarité interpalestinienne pour prévenir des accrochages susceptibles d’être instrumentalisés. C’est ce qui justifierait en partie la participation du mouvement Fateh aux manifestations contre les mesures du ministère du Travail, selon une source politique proche du dossier.
Ayant coïncidé avec l’une des manifestations contre ces mesures, l’assassinat de Hassan Alaeddine soulève des questions. Selon plusieurs sources concordantes, sa liquidation aurait été décidée en représailles pour un crime commis par son frère, membre de Esbat al-ansar, contre un membre du groupe Bilal Arqoub. Pour la source politique de Saïda, l’incident est à ramener à sa dimension « interislamiste », d’où le fait qu’il a eu lieu dans un quartier considéré comme islamiste. Les accrochages qui ont suivi seraient aussi à situer dans un cadre clanique, la famille de la victime ripostant à la famille Arqoub, sans que la première ne se prévale d’aucune appartenance au Fateh ni à une autre faction, selon la source politique. « Il faut savoir que tous les acteurs palestiniens ont conscience de leur intérêt à préserver la sécurité du camp : ils le disent eux-mêmes », ajoute-t-on de même source.
Mais la source palestinienne indépendante, bien qu’insistant sur cette solidarité interpalestinienne, y compris entre le Fateh et Esbat al-ansar, est plus circonspecte quant au timing de l’assassinat. Pourquoi choisir de liquider un homme en représailles pour un crime personnel au cours d’une marche de contestation que l’on sait chargée de tensions ? Pour la source indépendante, il y a anguille sous roche. Personne ne s’aventure toutefois à pointer du doigt la partie ayant intérêt à déstabiliser les camps.
Entre la version de la source politique de Saïda et le doute exprimé par la source palestinienne indépendante, Mounir Maqdah prend une position intermédiaire : le meurtre de Hassan Alaeddine est « délibéré » et son auteur est « sans aucun doute un mercenaire ».
Le groupe de Bilal Arqoub est apparu en aout 2017 à Aïn el-Heloué, en s’attaquant au siège des forces de sécurité du camp dans l’objectif de mobiliser les groupes radicaux contre le Fateh.
L’assassinat d’hier aurait pour objectif de « mettre en échec les manifestations animant les camps palestiniens aux quatre coins du pays : c’est un message adressé à tous les camps », a déclaré Mounir Maqdah. Son message est en contrepartie le suivant, à qui veut l’entendre : « Nous avons la capacité de préserver la sécurité de nos camps. »
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commentaires (5)
Tant mieux.
Christine KHALIL
12 h 35, le 03 août 2019