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Liban - Qabr Chmoun

Raidissement de Joumblatt et Arslane : on est au « pic de l’escalade »

Les deux leaders druzes refusent de se rencontrer ; l’initiative de Abbas Ibrahim est une fois de plus mise en échec.

Talal Arslane et Walid Joumblatt. Photo d’archives/ANI

À l’heure où les efforts en quête d’une solution à la crise politique survenue dans la foulée de l’incident de Qabr Chmoun, le 30 juin dernier, semblaient en passe de déboucher sur des idées de compromis possible, le leader du Parti socialiste progressiste, Walid Joumblatt, mais aussi le chef du Parti démocratique libanais, Talal Arslane, se sont raidis au cours du week-end, mettant en échec une nouvelle fois la médiation du directeur de la Sûreté générale, Abbas Ibrahim. Dans son discours prononcé vendredi dernier, le secrétaire général du Hezbollah, Hassan Nasrallah, avait réitéré son soutien indéfectible à son allié de longue date, M. Arslane, pour déférer le dossier des affrontements de Qabr Chmoun, qui avaient coûté la vie à deux partisans du ministre d’État pour les Affaires des réfugiés, Saleh Gharib, lors de heurts ayant opposé des membres du PDL à d’autres du PSP, devant la Cour de justice.

Cette position du numéro un du parti chiite a sans doute douché les espoirs quant à une proche sortie de crise. Mais c’est surtout un incident survenu dans la nuit de vendredi à samedi devant le domicile de M. Gharib à Bassatine (caza de Aley) qui a radicalement changé la donne. Le PDL a accusé, dans un communiqué publié samedi, Rayan Merhi, « un partisan du PSP », d’avoir tenté dans la nuit de vendredi à samedi d’« entrer par la force au domicile de M. Gharib, à Bassatine ».

En face, le PSP a présenté une autre version des faits. Dans un communiqué publié samedi, la formation joumblattiste a assuré que l’homme « n’est pas un partisan » du PSP et rentrait chez lui « paisiblement » sans aucune arme en sa possession, et alors qu’il passait à côté du domicile du ministre Saleh Gharib, il a été victime de tirs de la part des gardiens ». « Il a été gravement blessé et transporté à l’hôpital », ajoute le communiqué assurant que « R.M. n’est pas membre du PSP ». « La question qui se pose aujourd’hui est de savoir si le fait qu’un habitant du village de Bassatine passe à côté de la maison du ministre Saleh Gharib est également considéré comme une embuscade ou s’agit-il d’une attaque flagrante contre un citoyen par les gardiens de la maison, qui sont libanais et syriens ? »

L’armée libanaise a publié, de son côté, un communiqué dans lequel elle a précisé qu’« à deux heures du matin, à Bassatine, alors que Rayan Merhi, qui se trouvait en état d’ébriété, a tenté d’entrer dans la cour du bâtiment où habite le ministre Saleh Gharib, les soldats de l’armée libanaise chargés de la protection du ministre sont intervenus. Mais une dispute a eu lieu lorsque les membres chargés de la protection personnelle du ministre sont intervenus. Un des gardes du ministre a alors tiré et blessé Rayan Merhi aux pieds. Il a été transporté à l’hôpital », indique l’institution militaire.

Cet incident a donné le coup d’envoi à une nouvelle phase de la querelle opposant Moukhtara à Khaldé, et par la même occasion à l’axe syro-iranien. Un constat que confirme la série de tweets postés durant le week-end par Walid Joumblatt : « Il semble que la crise suscitée par l’incident de Bassatine, et qui avait commencé à Choueifate (allusion au meurtre, en mai 2018, d’un partisan du PSP, Alaa Abou Faraj, et dont l’auteur présumé, Amine Souki, serait proche de Talal Arslane), n’est plus strictement locale. Preuve en est, les propos d’une personnalité politique importante », a-t-il écrit, dans une claire allusion à Hassan Nasrallah.



(Lire aussi : Qabr Chmoun : un conflit interdruze qui cache une crise de confiance, le décryptage de Scarlett HADDAD)


« Je ne me rendrai pas à Baabda »
Dans un autre tweet, le leader de Moukhtara s’est voulu encore plus clair : « Il serait bon de se faire une idée des motifs de cette escalade. Et je ne trouve aucun intérêt à la tenue à Baabda d’une réunion qui outrepasse la Constitution. » M. Joumblatt se rétractait ainsi par rapport à une position qu’il avait exprimée le 15 juillet. Il s’était, ce jour-là, dit prêt à rencontrer son principal rival sur la scène druze et gérer son conflit avec lui, sous la houlette de Michel Aoun, « si les conditions propices à une telle rencontre sont réunies ».

Mais dans un entretien accordé hier à al-Anba’, organe médiatique du PSP, Walid Joumblatt n’a pas mâché ses mots : « Je ne me rendrai pas à Baabda pour opérer une réconciliation entre deux clans. Et je n’irai pas pour y rencontrer Talal Arslane. S’il y a besoin de rencontre, elle devrait avoir lieu avec un émissaire de Hassan Nasrallah. Si ce dernier n’en veut pas, je n’ai aucun problème, a-t-il dit. Personne ne confisquera mon indépendance. »

Contacté par L’OLJ, un proche de Moukhtara ayant requis l’anonymat explique le raidissement de Walid Joumblatt en soulignant que l’on est « au pic de l’escalade ». « L’ère des médiations confiées à Michel Aoun est révolue », déclare-t-il, avant de faire valoir que « toutes les concessions qui lui ont été faites se sont avérées inutiles ». Une allusion au compromis conclu en mai dernier autour du crime de Choueifate (du 8 mai 2018). À la faveur d’efforts de MM. Aoun et Joumblatt, la famille du défunt Alaa Abou Faraj avait accepté de retirer sa plainte contre l’accusé, une fois ce dernier remis à la justice. « Que personne ne croit pouvoir nous effrayer par la force. Nous attendons la fin de l’enquête en cours (au sujet de l’incident de la Montagne), et nous nous conformerons aux lois en vigueur, et nous ne permettrons pas qu’elles soient exploitées par les alliés locaux de la Syrie et de l’Iran », a encore dit le proche de Walid Joumblatt.


(Lire aussi : « Nasrallah ne peut pas décider du cours de la justice », martèle Joumblatt)


« Qabr Chmoun bis »
À son tour, Talal Arslane a opté pour l’escalade, en refusant de se réunir avec son rival. « Je ne m’entretiendrai pas avec Walid Joumblatt aux dépens du sang des martyrs Alaa’ Abou Faraj, Samer Abi Faraj et Rami Salmane (les deux victimes des heurts de Qabr Chmoun). L’assassin est le même, la rancune est la même (...). L’ère de l’instrumentalisation du sang des innocents est révolue. Nous serons à l’affût de tout mouvement suspect, quel qu’en soit le prix », a écrit M. Arslane sur Twitter.

À L’OLJ, un proche de M. Arslane n’explique cette nouvelle tension que par le fait que, selon lui, « l’incident de Qabr Chmoun bis (allusion à l’incident près du domicile de Saleh Gharib) a renvoyé aux oubliettes toute possibilité de solution prochainement, d’autant que M. Joumblatt n’est pas convaincu de la nécessité de rendre justice, à travers la Cour de justice ».

À la lumière de ce regain de tension entre Moukhtara et Khaldé, une chose semble sûre : le Conseil des ministres paralysé depuis le 2 juillet le demeurera, du moins pour le moment. Selon notre correspondante Hoda Chédid, la nouvelle escalade a mis en échec les derniers efforts de Abbas Ibrahim. La toute dernière version de son initiative visant à relancer le cabinet prévoyait la tenue d’un Conseil des ministres en l’absence de Saleh Gharib et du ministre de l’Éducation Akram Chehayeb (joumblattiste, et qui est accusé par le PDL d’être impliqué dans l’incident du 30 juin). Toujours selon Hoda Chédid, l’enquête devait être confiée au tribunal militaire. Les résultats auraient par la suite été examinés en Conseil des ministres, en prévision de la saisine de la Cour de justice dans les deux dossiers de Choueifate et de Qabr Chmoun. La réunion du gouvernement devait être précédée par une réconciliation entre MM. Joumblatt et Arslane, parrainée par Michel Aoun et en présence de Nabih Berry et Saad Hariri. Dans une volonté manifeste de calmer les esprits, le cheikh Akl druze Naïm Hassan a convoqué à un sommet spirituel qui aura lieu demain au siège de la communauté druze à Beyrouth, à 11h30. Le PDL a affirmé, par la bouche du proche de Talal Arslane, ne pas « être concerné » par cette initiative, dans la mesure où il appuie le cheikh Nasreddine Gharib, par opposition à Walid Joumblatt qui soutient le cheikh Hassan.



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commentaires (5)

faudra imperativement appeler les choses par leurs noms , ne plus dire, ecrire meme penser talal arslan ceci, talal arslan cela, mais plutot, ILS ceci. ILS cela...... puisque le grand emir sus mentionne ne peut resolument faire croire qu'il a une position aussi forte que cela.....

Gaby SIOUFI

16 h 31, le 30 juillet 2019

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Commentaires (5)

  • faudra imperativement appeler les choses par leurs noms , ne plus dire, ecrire meme penser talal arslan ceci, talal arslan cela, mais plutot, ILS ceci. ILS cela...... puisque le grand emir sus mentionne ne peut resolument faire croire qu'il a une position aussi forte que cela.....

    Gaby SIOUFI

    16 h 31, le 30 juillet 2019

  • MEGA ABRUTISSEMENT ET DUPER HEBETUDE !

    LA LIBRE EXPRESSION

    16 h 40, le 29 juillet 2019

  • RIFIFI CHEZ LES VOYOUS....

    Tabet Karim

    09 h 24, le 29 juillet 2019

  • L,ABRUTISSEMENT AUX NUES !

    LA LIBRE EXPRESSION

    08 h 01, le 29 juillet 2019

  • Ceci dit, on ne connait pas les dessous de l'histoire ca peut être lié aux carrières fattouche (et les appuis respectifs en background ) ou à d'autres conflits liés au budget... Au liban, un conflit affiché n'est que la conséquence d'un autre bien planqué.

    LE FRANCOPHONE

    00 h 46, le 29 juillet 2019

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