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Liban - Recherche scientifique

Le Liban fait ses premiers pas en vue d’une future présence dans l’espace

La cérémonie de clôture du programme « CubeSat Technology » visant à développer le premier nanosatellite libanais s’est tenue hier au siège de la présidence du Conseil, au Grand Sérail, en présence d’un représentant de la délégation de l’Union européenne et d’experts américains et turc.

Photo-souvenir en présence de la ministre d’État pour le Développement administratif, May Chidiac.

Au début des années 1960, un groupe d’étudiants de l’Université de Haïgazan, menés par leur professeur de mathématiques, Manoug Manougian, fondait la Lebanese Rocket Society. Après trois années de recherches et d’essais, la fusée Cèdre IV atteignait 145 kilomètres de hauteur, une altitude presque suffisante pour une satellisation. Mais suite aux pressions politiques et au caractère militaire des essais, le programme s’arrête et reste lettre morte. Soixante ans plus tard, un groupe de 65 étudiants et chercheurs de 12 universités libanaises se sont lancé le défi d’envoyer un satellite dans l’espace.

À l’origine du projet, le Conseil national pour la recherche scientifique (CNRS) et sa volonté d’intégrer la recherche libanaise dans le “new space”. Cette doctrine caractérise une certaine démocratisation de l’espace, désormais accessible aux pays émergents et aux entreprises privées. Cet essor a débuté dans deux universités californiennes au début des années 2000 avec le développement de la technologie CubeSat rendant possible la fabrication de nanosatellites. D’un poids variant de 1 à 10kg, ils permettent à de petits pays ou à des universités de développer leurs propres engins spatiaux, qu’ils placent en orbite à moindre coût grâce à des lanceurs privés comme Space X ou Blue Origin. Pour Louay Abdallah, membre du CNRS, tous ces facteurs combinés ont entraîné une envolée du nombre de lancements de nanosatellites. Alors que 800 d’entre eux ont été envoyés dans l’espace entre 2005 et 2018, près de 18 500 sont d’ores et déjà prévus jusqu’en 2023.

Le programme pour développer le premier nanosatellite libanais est l’un des 22 projets pilotes financés par l’Union européenne dans le cadre du TAF, l’assistance technique à l’adresse du gouvernement libanais et des administrations publiques. Sur l’enveloppe de 5 millions d’euros allouée au TAF, près de 150 000€ ont servi à financer la première plate-forme de recherche satellitaire libanaise. Pendant cinq mois, étudiants et chercheurs ont planché tant sur de premières réalisations techniques que sur la mise en place d’un programme spatial libanais avec le concours de chercheurs internationaux spécialisés dans ce domaine.

Une avancée tangible

Alors que la cérémonie d’hier marquait la fin du programme financé par l’Union européenne, quel bilan et quel avenir peut-on définir pour le nanosatellite libanais ?

Bien qu’au terme du programme, celui-ci n’en soit encore qu’à sa phase de gestation, le principal travail se situe ailleurs, souligne le professeur Peter Van Wirt, ancien vice-président du département d’astronautique à l’US Air Force Academy. « Le plus compliqué ce n’est pas de construire le satellite, mais de créer tout le programme spatial qui va avec », indique-t-il. Et d’ajouter que « la plupart des échecs dans ce domaine ne sont pas dus à des lacunes technologiques mais à des problèmes de management ». Néanmoins, étudiants et chercheurs sont parvenus à une avancée tangible, la création d’un Comité spatial libanais qui sera chargé d’établir la feuille de route de l’élaboration du premier nanosatellite libanais. Une unité de recherche CubeSat a également vu le jour au sein du CNRS.

Ce nanosatellite universitaire aura avant tout un but scientifique. Il pourra embarquer des technologies permettant de réunir à moindre coût des informations fiables sur la déforestation, l’agriculture, le changement climatique ou encore les catastrophes naturelles. Des données qui pourront ensuite être utilisées par les gouvernants, les chercheurs ou les ONG. Le développement des technologies spatiales est, selon les Nations unies, l’un des moyens pour les États d’atteindre les Objectifs de développement durable (ODD) à l’horizon 2030. Mais comme l’a confié à L’OLJ Marty France, ancien chef du département d’astronautique de l’US Air Force Academy et chargé de la formation, « le but d’un premier satellite est avant tout de se tester, de tester ses aspects techniques et donc ses objectifs se doivent d’être modestes ».

La mise en orbite d’un tel outil porte aussi une visée symbolique et diplomatique. Posséder un nanosatellite peut garantir l’autonomie d’un pays dans l’accès aux données relevées et envoyer des signaux positifs en montrant que celui-ci est investi dans la recherche de pointe et évite de se laisser distancer. Pour le Liban, c’est aussi une manière de s’intégrer dans le Groupe de coopération spatiale arabe lancé au début de l’année par les Émirats arabes unis. Enfin, l’un des principaux objectifs de ce programme était de créer une émulation et une dynamique conduisant à la création d’un environnement favorable à la recherche spatiale au Liban.


(Lire aussi : « On the moon again » : observer la Lune à Aïn Mreissé pour fêter les 50 ans d’Apollo 11)


Un problème de financement

Si pour M. France, l’entrain et le regroupement d’autant d’étudiants/chercheurs venus de douze universités libanaises sont à eux seuls des raisons suffisantes pour bâtir ce programme spatial libanais, la question de sa pérennité, après l’arrêt des subventions européennes, se pose. Dans son discours, May Chidiac, la ministre d’État en charge du Développement administratif, avait anticipé les questions sur la pertinence d’un tel programme alors que s’ouvrait le jour même la deuxième session d’examen du budget 2019 au Parlement dans un contexte de fort déficit public. Mme Chidiac a reconnu que l’État ne pouvait pas soutenir financièrement cette recherche scientifique et que l’aide internationale était essentielle, tout en réaffirmant le soutien symbolique du chef du gouvernement. La question du financement de la recherche spatiale au Liban est loin d’être résolue. Ni le gouvernement ni le secteur privé ne semblent vouloir le prendre en charge, le premier par manque de moyens et le second par manque de volonté. Interrogé par L’OLJ, Mouïn Hamzé, secrétaire général du CNRS et fervent soutien du projet, affirme que l’État financerait moins de la moitié du budget de l’organisation et que des coupes de l’ordre de 10 à 15 % sont encore à prévoir.

Réagissant à une potentielle nouvelle cure d’austérité dans le domaine de la recherche à l’occasion de l’examen du budget 2019, la ministre May Chidiac a annoncé seulement des mesures de bon sens. « Il est par exemple normal de fermer le bureau de recherche sur la culture de la betterave alors que nous n’en cultivons plus », souligne-t-elle.

Alors que le 21 juillet prochain sera célébré le cinquantième anniversaire du premier homme sur la Lune, une question reste en suspens : cette première étape vers la mise en orbite d’un nanosatellite libanais représente-t-elle un petit ou un grand pas pour la recherche spatiale et scientifique libanaise ?




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commentaires (12)

comment refuser de l'argent de dehors quand 10% ira au projet et 90% iront dans les poches ouvertes d'autres responsables

LA VERITE

13 h 20, le 19 juillet 2019

Tous les commentaires

Commentaires (12)

  • comment refuser de l'argent de dehors quand 10% ira au projet et 90% iront dans les poches ouvertes d'autres responsables

    LA VERITE

    13 h 20, le 19 juillet 2019

  • Quand on connait les infinis utilités d'un satellite...utilités pacifiques, scientifiques, economiques, agricoles, militaires etc etc...a-t-on le droit de critiquer un tel projet à la porté de notre jeunesse, nos universitaires ? En plus avec les subsides de l'Europe.... que demander plus ? D'accord je vous l'accorde cette ignominie de l'électricité au Liban....et les "barges"turcs au large de nos côtes est la pire humiliation pour les libanais. Un pays arriéré comme la Turquie nous vend de l'électricité au prix d'or fabriqué sur des barges ....qu'elle honte pour nos dirigeants corrompus. Mais est-ce que cela doit nous empêcher d'avancer ou plutôt de monter ...vers les cieux ?

    Sarkis Serge Tateossian

    21 h 45, le 18 juillet 2019

  • Les Libanais sont déjà dans la lune, alors...

    Gros Gnon

    20 h 17, le 18 juillet 2019

  • Si jamais vous envoyez le premier nanosatellite libanais dans l'Espace, veuillez le charger d'une petite tonne de déchets. Merci.

    Un Libanais

    19 h 22, le 18 juillet 2019

  • Si nous ne sommes pas foutus d'assurer le couyrant electrique 24/24, nous allons maintenant nous lancer dans l'Espace? Non mais c'est quoi cette connerie?

    IMB a SPO

    15 h 49, le 18 juillet 2019

  • juste question de priorités....tout ca est tres excitant mais si on pouvait arranger nos affaires sur ce qui reste de notre bonne vieille Terrre au Liban avant de se lancer dans l'Espace? nous avons besoin de chaque sou

    Atie Lina

    13 h 14, le 18 juillet 2019

  • Pourquoi pas essayer à nouveau, que nous manque t il pour le faire. Il y a 69 ans le Liban sous la pression se croyait faible, ce n'est plus le cas aujourd'hui, et pour cause.

    FRIK-A-FRAK

    10 h 34, le 18 juillet 2019

  • Magnifique... un nanosatellite libanais ! 5 millions d'euros alloués au TAF, etc., dont 150'000 déjà dépensés en recherches...et le reste, il disparaîtra dans les célèbres tiroirs sans fond du CNRS ??? Bon, le Liban a ses caisses vides, et n'est même plus cabable de financer les sociétés à but social comme Sesobel et autres...mais c'est très important d'avoir un nanosatellite !!! Au fait...pour quoi faire ? Essayons de positiver: 1) utile pour surveiller nos responsables qui dilapident sans vergogne les sous des caisses de l'Etat 2) surveiller en permanence tous les chantiers de carrières illégales dans nos montagnes 3) surveiller la contrebande d'armes en faveur des milices qui se croyent indispensables à la sécurité de leur coin et de leur zaïm et même du Liban 4) surveiller les décharges publiques qui ornent partout notre beau pays "à vocation touristique" jadis la Suisse du Moyen Orient Donc, à y penser sérieusement, vivement un NANOSATELLITE LIBANAIS !!! Irène Saïd bref, à y penser, on veut bien un nanosatellite libanais, à 5 millions d'euros !!!

    Irene Said

    10 h 23, le 18 juillet 2019

  • Assurément, ils n'ont pas les pieds sur terre! Lol

    Tina Chamoun

    10 h 14, le 18 juillet 2019

  • C'est génial car cela prouve, une fois de plus, que le Libanais est capable de réaliser de grandes choses! J’espère seulement que le pays ne s'en serve que pour transformer l'espace, la Lune, Mars, etc... en dépotoirs. Soit parce que nos nano-satellites ne pourraient être connectés a un GUL pour avoir de l’électricité, soit parce que les dirigeants s'en serviront pour régler le problème des déchets en y plaçant toutes notre merde...! Au fait, c'est qui qui gérerait le nouveau ministères des affaires spatiales Libanaises, juteux marché pour des générations a venir?

    Pierre Hadjigeorgiou

    09 h 28, le 18 juillet 2019

  • C’est sérieux ? Où est ce un premier avril très en avance !!! Le pays se débat dans une crise économique sans précédent et on parle de recherche spatiale au Liban alors que la population se paupérise de jour en jour. Soit on est fous soit on est déjà sur la lune. Mais pardon, j’oublie, la night life se porte à merveille et c’est l’essentiel de la vie d’une nation d'illuminés

    Lecteur excédé par la censure

    08 h 03, le 18 juillet 2019

  • AFFERMISSEZ LA PRESENCE DU PAYS ECONOMIQUE ET FINANCIERE SUR TERRE ET PARMI LES NATIONS ET ABANDONNEZ LES REVES COUTEUX ET FARFELUS DE LA PROPAGANDE.

    LA LIBRE EXPRESSION

    07 h 44, le 18 juillet 2019

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