Le chef de l'Etat libanais, Michel Aoun, et le président du Parlement, Nabih Berry, se sont entretenus lundi au palais de Baabda dans le but d'"unir leurs efforts" pour apaiser les tensions politiques ravivées après les affrontements interdruzes dans la Montagne il y a plus d'une semaine.
Dimanche 30 juin, le convoi de Saleh Gharib, ministre d’Etat pour les Affaires des réfugiés, membre du Parti démocrate libanais (PDL de Talal Arslane), rival du Parti socialiste progressiste (PSP de Walid Joumblatt), avait été pris pour cible par des tirs de partisans du PSP, dans un contexte de tensions provoquées par des propos controversés du chef du Courant patriotique libre, Gebran Bassil, sur la guerre de la Montagne ayant opposé les factions pro-palestiniennes, dont les druzes, à l'armée et aux factions chrétiennes dans les années quatre-vingt.
"Le président Aoun a discuté avec M. Berry de la conjugaison des efforts pour porter remède aux événements survenus à Qabr Chmoun, dans le caza d'Aley", indique le compte Twitter officiel de la présidence libanaise.
Arslane persiste et signe
Depuis les incidents de Qabr Chmoun, la scène politique libanaise est divisée : d'un côté, M. Arslane et ses alliés, dont le CPL, exigent que cette affaire soit saisie par la Cour de justice, un tribunal d'exception dont les jugements sont sans appel, tandis que Walid Joumblatt et ses alliés refusent catégoriquement cette saisine. Cette question avait causé l'annulation du Conseil des ministres de mardi dernier. Dans la journée, Talal Aslane a mis en garde sur Twitter contre "toute dissolution du crime de la Montagne". "Le seul compromis possible est que ce crime soit traduit devant la Cour de justice", a-t-il réitéré. Dans le cas contraire, a-t-il menacé, "la voie sera ouverte à des dissensions aux conséquences incalculables".
Le président Aoun a reçu dans l'après-midi Talal Arslane et Saleh Gharib. Aucune déclaration n'a été faite à l'issue de leur entretien. Mais selon notre correspondante à Baabda Hoda Chédid, M. Arslane tient plus que jamais à ce que la Cour de justice soit saisie.
De son côté, le chef du Parlement a multiplié les entretiens et les réunions pour apaiser les tensions politiques entre le PSP et le PDL après les incidents armés de Qabr Chmoun. Dans le cadre de ces efforts d’apaisement, le chef du Parlement avait notamment réuni mercredi dernier M. Joumblatt et le Premier ministre Saad Hariri à l’occasion d’un dîner à son domicile. Ces dernières semaines, le leader du PSP et le chef du courant du Futur, traditionnellement alliés, étaient à couteaux tirés, le premier reprochant notamment au second son silence face aux agissements de Gebran Bassil.
"Fossoyeur de la réconciliation"
Pour sa part, le PSP poursuit sa tournée qu'il mène auprès de différents partis et responsables. Dans la journée, le ministre libanais de l'Industrie, Waël Bou Faour, membre du PSP, a accusé M. Bassil d'être "le fossoyeur de la réconciliation de la Montagne" à l'issue d'une réunion d'une délégation de son parti avec le chef des Kataëb, Samy Gemayel.
"Nous considérons que le CPL n'est pas sorti de cette réconciliation mais que certains de ses membres en sont bien sortis pour des raisons personnelles", a-t-il ajouté, faisant référence implicitement à M. Bassil. "Les dissensions actuelles ne sont pas confessionnelles ni communautaires. Il ne s'agit pas de tensions inter-druzes ou druzo-chrétiennes, a ajouté M. Bou Faour. Il s'agit d'un conflit entre les partisans de la réconciliation et ses fossoyeurs, entre les partisans de l'unité nationale et ceux qui veulent la poignarder". Par ailleurs, le ministre du PSP a affirmé que le sort du gouvernement, dont le Conseil des ministres est suspendu le temps que les différentes parties se mettent d'accord sur une sortie de crise, "est aux mains de ceux qui le font échouer".
M. Gemayel a, lui, affirmé qu'il avait "invité le PSP à rejoindre l'opposition afin de former un front uni face à la situation terrible que traverse le pays". "Malheureusement, certains veulent travailler dans une logique de guerre et de tensions, alors que d'autres travaillent dans une logique de construction de l’État", a-t-il ajouté.
Dans le cadre de leur tournée, les responsables du PSP avaient rencontré, ce week-end, le patriarche maronite, Mgr Béchara Raï, et les Forces libanaises.
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commentaires (4)
Quand il y a mort, il doit y avoir enquête et procès, nos braves politiciens ne se battent que pour mieux se réconcilier et pendant ce temps, le pays stagne et donc recule. Dehors ces criminels véreux !
TrucMuche
23 h 55, le 08 juillet 2019