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À La Une - Retour sur l'histoire

Lorsque l'Iran affrontait pour la première fois les États-Unis... sur un terrain de football

Chargée de symboles, la rencontre disputée entre les deux équipes nationales il y a 21 ans lors de la Coupe du monde 1998 intervenait après le rapprochement irano-américain opéré par Bill Clinton et Mohammad Khatami.

Les joueurs américains et iraniens posent ensemble pour leur photo d'avant-match, le 21 juin 1998, au stade Gerland de Lyon. AFP / PASCAL GEORGE

Le dimanche 21 juin 1998, l'équipe d'Iran de football affronte la sélection américaine en phase de groupes de la Coupe du monde organisée en France. Ce match de "la fraternité", comme le qualifie la FIFA qui organise la compétition, le premier opposant les deux nations sur un terrain de football, intervient dans un contexte diplomatique très différent de celui d'aujourd'hui, marqué par une exacerbation des tensions irano-américaines.

En froid depuis la Révolution islamique de 1979 et l’occupation de l’ambassade américaine de Téhéran, l'Iran et les États-Unis, qui n'entretiennent aucune relation diplomatique, ont à leur tête deux présidents prêts à se tendre la main.

Dès son élection en mai 1997 à la tête de la République islamique, le réformateur Mohammad Khatami multiplie les gestes d'ouverture envers les États-Unis, se déclarant prêt à un "dialogue réfléchi" avec Washington. "Je ne souhaite pas autre chose qu’un dialogue avec l’Iran, à condition que nous puissions avoir une discussion honnête sur les questions qui nous concernent", répond fin décembre 1997 Bill Clinton, le locataire de la Maison-Blanche.

Dans une interview accordée à CNN le 7 janvier 1998, le chef de l'État iranien plaide pour un accroissement des échanges culturels, sportifs et touristiques entre l'Iran et les États-Unis afin d’ouvrir une "brèche dans le mur de défiance" entre les deux pays. Le successeur du modéré Hachemi Rafsandjani se garde toutefois d’appeler à une reprise des contacts officiels. Le guide suprême de la Révolution, l’ayatollah Ali Khamenei, et le camp conservateur dans son ensemble rejettent toute perspective de négociation avec les Américains.

Trois semaines plus tard, le 28 janvier, le président américain lance un message à Téhéran à l'occasion de la fête du Fitr. Il dit "regretter la situation présente", tout en estimant qu'elle n’est pas "insurmontable".


"Diplomatie du football"
Quatre jours avant la rencontre historique entre les "Lions perses" et les "Stars and Stripes", la secrétaire d'Etat américaine Madeleine Albright propose d'établir sous condition des relations bilatérales entre l'Iran et les États-Unis. "Le fossé entre nous est toujours large, mais nous devons mettre en œuvre les moyens de le combler", affirme-t-elle.

Le lendemain, Bill Clinton plaide pour "une réconciliation authentique", basée sur (...) la réciprocité", insistant sur le fait que "l’Iran change positivement". Il exprime également l'espoir que ce match pourra être une étape vers la fin de la brouille. Le même jour, le ministre iranien des Affaires étrangères, Kamal Kharazi, appelle Washington à "détruire le mur de la méfiance".

Comme pour couronner le rapprochement diplomatique opéré durant les mois précédents, le président américain enregistre un message vidéo qui est diffusé aux États-Unis le jour du match. "J'espère que cette rencontre sera un pas vers la fin de l'hostilité entre nos deux nations (...) Je me félicite de ce que le président Khatami et moi-même ayons pu cette année œuvrer à développer les échanges de peuple à peuple", dit-il dans cette vidéo.

Les observateurs de cette détente saluent la "diplomatie du football" en faisant le parallèle avec la "diplomatie du ping-pong" qui avait contribué dans les années 1970 à détendre les relations entre les États-Unis et la Chine communiste.


Symboles
Les joueurs eux-mêmes savent qu'il ne s'agit pas d'un match comme les autres. "Ce match va décider du sort de la planète", déclare Alexi Lalas, une des stars de la sélection américaine, avant la rencontre.

Au stade Gerland de Lyon où se déroule le match, la sécurité est renforcée. La température monte lorsqu'un homme essayant d'entrer sur la pelouse est interpellé. Dans les tribunes, des supporters iraniens crient "A bas Khatami !" et brandissent des banderoles de soutien à Maryam Rajavi, la présidente du Conseil national de la résistance d’Iran en exil (le mouvement des Moujahidine du peuple, déclaré illégal en Iran).

Mais la FIFA veut faire de ce match un symbole de réconciliation, en bousculant le protocole d'avant-match. En sortant du couloir du stade, les joueurs iraniens, emmenés par leur buteur Ali Daei, reconnaissable grâce à sa grosse moustache, ont chacun un bouquet de fleurs blanches à la main qu'ils offrent à leurs adversaires. Les hymnes des deux pays ne sont pas sifflés. Les joueurs des deux équipes posent ensemble pour la photo officielle. Le cliché fera le tour du monde.

Sur le plan sportif, la rencontre ne restera pas dans les annales. Les Américains toucheront trois fois les montants mais les Iraniens semblent un peu plus fins sur le plan technique. L'Iran finit par remporter le match sur le score de deux buts à un. C'est la première victoire de la "Melli" en Coupe du monde.

" Ce soir, le puissant et arrogant adversaire a senti le goût amer de la défaite", aurait déclaré Ali Khamenei après la rencontre. Le président Khatami a, lui, salué un " symbole de l’unité nationale ". Côté américain, le porte-parole du Département d’Etat dit : " Bâtir des liens, faire tomber les murs de la défiance et créer une meilleure compréhension, c’est un début "...

Les relations entre les deux pays se tendront à nouveau avec l'élection aux États-Unis en 2000 de Georges W. Bush, qui désigne l'Iran dans l'"Axe du mal" et l'arrivée au pouvoir, en Iran, de l'ultra-conservateur Mahmoud Ahmadinejad en 2005.

Le dimanche 21 juin 1998, l'équipe d'Iran de football affronte la sélection américaine en phase de groupes de la Coupe du monde organisée en France. Ce match de "la fraternité", comme le qualifie la FIFA qui organise la compétition, le premier opposant les deux nations sur un terrain de football, intervient dans un contexte diplomatique très différent de celui d'aujourd'hui, marqué par...

commentaires (1)

Un match Iran/Etats-Unis est normal. Un match Iran/Isrël est anormal pour le moment. Des duels sportifs entre des Satan grands ou petits sont toujours agréables et mieux que des duels de drones et de porte-avions. Que chaque Etat garde sa religion dans son placard chez lui et tout ira bien. La religion n'a rien à voir avec le sport qu'il soit masculin ou féminin. Le sport est collectif, la religion est personnelle exclusivement.

Un Libanais

21 h 49, le 21 juin 2019

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Commentaires (1)

  • Un match Iran/Etats-Unis est normal. Un match Iran/Isrël est anormal pour le moment. Des duels sportifs entre des Satan grands ou petits sont toujours agréables et mieux que des duels de drones et de porte-avions. Que chaque Etat garde sa religion dans son placard chez lui et tout ira bien. La religion n'a rien à voir avec le sport qu'il soit masculin ou féminin. Le sport est collectif, la religion est personnelle exclusivement.

    Un Libanais

    21 h 49, le 21 juin 2019

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