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À La Une - reportage

Devant le QG de l'armée soudanaise, les manifestants mobilisés et organisés

Un véritable petit village a vu le jour à Khartoum :  des cliniques et cuisines de fortune ainsi que des tentes ont été installées pour répondre aux besoins des manifestants qui y passent la nuit.

Des volontaires préparant des repas pour les manifestants, lors d'un rassemblement devant le siège de l'armée à Khartoum, la capitale du Soudan, le 27 avril 2019. Photo AFP / OZAN KOSE

"Nous distribuons du thé, des jus, de la nourriture", explique Soheir Abdine, une Soudanaise de 63 ans, devant le QG de l'armée à Khartoum, où les contestataires mobilisés jour et nuit ont organisé leur quotidien au fil des semaines. "Nous recevons parfois des dons et de l'aide de proches à l'étranger qui nous envoient de l'argent pour qu'on continue" de protester, explique Mme Abdine, déterminée comme des milliers d'autres Soudanais à ne quitter le sit-in qu'après l'instauration d'un gouvernement civil.

Le Soudan est gouverné par un Conseil militaire de transition depuis qu'Omar el-Bachir a été destitué et arrêté par l'armée le 11 avril sous la pression d'un vaste mouvement de contestation né en décembre.

Les manifestants, qui campent depuis le 6 avril devant le QG de l'armée, sont restés mobilisés pour réclamer le transfert du pouvoir à une autorité civile. Les participants au sit-in sont issus de toutes les couches de la société : étudiants, fonctionnaires, agriculteurs, etc. Certains sont même venus en famille.
Un véritable petit village a vu le jour: des cliniques et cuisines de fortune ainsi que des tentes ont été installées pour répondre aux besoins des manifestants qui y passent la nuit.

Mme Abdine a elle-même monté une tente pouvant accueillir jusqu'à dix manifestants à tout moment. Elle assure cuisinier régulièrement pour les protestataires. "Tous ceux qui veulent s'arrêter sont les bienvenus", dit-elle. "Nous mangeons ce qui est disponible: des haricots comme des pâtes au poulet", ajoute-t-elle. Comme elle, de nombreux autres Soudanais se portent volontaires pour fournir nourriture et abri aux contestataires, selon une journaliste de l'AFP.

Le Conseil militaire a jusqu'à présent résisté aux appels à céder le pouvoir. Les leaders du mouvement ont ainsi appelé les manifestants à poursuivre le sit-in jusqu'à ce que leurs revendications soient satisfaites.

"Je ne serai convaincue que Bachir est tombé que lorsqu'un gouvernement civil sera formé", assure Mme Abdine.



(Lire aussi : Pour l'opposition, le Soudan doit "immédiatement" rejoindre la CPI)


"L'avenir de la nation" 
Des manifestants se portent volontaires pour nettoyer, servir des cafés, du thé ou distribuer de l'eau pour aider les contestataires à supporter la chaleur écrasante.

"Je suis censé obtenir mon diplôme l'année prochaine et je sais que le fait de rester ici pourrait retarder" cette échéance, assure Siddik Mohamed Siddik, un étudiant, "mais l'avenir de la nation est plus important".
"Nous avons eu 30 ans de régime militaire qui a détruit notre économie", estime de son côté Mohamed Ayman, présent au sit-in depuis le 6 avril.

Amputé des trois quarts de ses réserves de pétrole depuis l'indépendance du Soudan du Sud en 2011, le Soudan fait notamment face à un grave déficit en devises étrangères. Son économie s'est détériorée sous la présidence de Bachir qui a dirigé d'une main de fer un pays miné par des rébellions dans plusieurs régions depuis un coup d'Etat en 1989.

La contestation actuelle soulève des craintes de voir la situation économique se détériorer davantage, mais les manifestants restent déterminés à obtenir un gouvernement civil y voyant le seul moyen d'assurer une meilleure gestion de l'économie.

"Ils (le régime) ont volé notre argent, des milliards, ces trente dernières années", poursuit M. Ayman.

Les manifestants réclament également que les responsables corrompus de l'ancien régime soient jugés et que les fonds pillés soient récupérés. Selon le Conseil militaire, l'équivalent de 113 millions de dollars ont été saisis dans la résidence de M. Bachir.

Pour M. Ayman, le mouvement de contestation n'affecte pas autant l'économie que la corruption des responsables du régime Bachir. "Même si cela doit nous prendre 20 ans pour les faire chuter, nous resterons".



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"Nous distribuons du thé, des jus, de la nourriture", explique Soheir Abdine, une Soudanaise de 63 ans, devant le QG de l'armée à Khartoum, où les contestataires mobilisés jour et nuit ont organisé leur quotidien au fil des semaines. "Nous recevons parfois des dons et de l'aide de proches à l'étranger qui nous envoient de l'argent pour qu'on continue" de protester, explique Mme Abdine,...

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