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Liban - Honduras

Aux Caraïbes, des routes en plastique pour sauver les dauphins

La ville caribéenne d'Utila, au Honduras, a trouvé une solution pour empêcher des milliers de tonnes de plastique de finir dans l'Atlantique : les transformer en asphalte.



L'île d'Utila n'a pas énormément de rues à asphalter, l'objectif des autorités est de profiter des matériaux recyclables pour fabriquer des blocs de béton. Photo Marvin Salgado

Les dauphins peuvent maintenant nager librement dans les eaux turquoise d'Utila sans craindre d’avaler du plastique. Les plus de cinq millions de bouteilles en plastique qui atteignent chaque année l'île du Honduras, dans le département des Caraïbes des Islas de la Bahía, ne finiront plus dans l'océan. Les autorités de l'île utilisent maintenant cette matière première pour revêtir les rues d'Utila, protégeant de l'invasion plastique les cétacés, dont la danse attire 2,3 millions de touristes chaque année.

Cette solution innovante de la municipalité est un mélange de bouteilles en plastique et de ciment. Elle vise à stopper la pollution environnementale qui menace non seulement le majestueux sanctuaire des dauphins, mais également toutes les espèces marines vivant dans le deuxième plus grand récif au monde.

« Environ cinq millions de bouteilles en plastique arrivent sur l'île chaque année, en plus de celles que les vagues déposent sur les plages, explique Troy Bodden, maire d'Utila, alors nous avons décidé de nous débarrasser de ce plastique en le déchiquetant et en l'utilisant comme matériau pour le béton de nos rues. » Le maire Bodden s’est inspiré d’une expérience d’abord appliquée en Inde, ainsi que d’une vidéo de routes en plastique au Canada qu’un touriste lui avait montrée.

Des routes plus durables et moins chères
Les routes en plastique d'Utila sont plus durables et moins chères que les routes conventionnelles. Troy Bodden affirme que 28 % de la formule du béton provient de plastique déchiqueté, ce qui permet à la municipalité d'économiser de l'argent qui aurait été dépensé en ciment. Le projet pilote a été mené sur une rue de 180 mètres de long située au centre de l'île, que le maire a rebaptisée rue Hollande, et qui a coûté deux millions de lempiras honduriens (48 000 dollars). Une seconde route, la rue Lozano, de 390 mètres de long, a été recouverte par la suite.

Pour réaliser la chaussée, quelque 150 000 bouteilles de boissons gazeuses ont été transformées en 3 600 kg de plastique déchiqueté, puis mélangées à du ciment et à du sable dans un laboratoire de la ville de San Pedro Sula, dans le nord du Honduras, pour tester la résistance au poids et aux conditions météorologiques du mélange.

La formule est certifiée et a la même consistance que l'asphalte ordinaire, explique Troy Bodden. « Nous étudions sa durabilité pour l'appliquer à d'autres projets tels que les pavés », assure-t-il.

Le maire a lancé en parallèle d'autres mesures pour lutter contre la pollution, dont un arrêté municipal qui interdit l'utilisation de sacs en plastique et de pailles. Les plages et récifs sont également nettoyés collectivement par les résidents et les centres de plongée de l'île réunis pour l’occasion.

« Ce n'est qu'un exemple de la créativité des Honduriens. Le plastique produit sur l'île est aujourd’hui déchiqueté et utilisé comme revêtement de chaussée, et il fonctionne très bien, il ne craque pas et ne s'endommage pas. Grâce à ces initiatives, nous préservons les ressources naturelles et l'avenir de notre île », estime le biologiste Fernando Argüello.

Exportation
La matière première en plastique est collectée sur les plages et au centre de recyclage, puis broyée pour former des boules avant d’être transportée sur le chantier dans d'énormes sacs noirs.

Se procurer ce plastique n’est pas difficile car le fleuve Motagua, qui prend sa source au Guatemala et se termine dans l'Atlantique, achemine vers l’île d'énormes quantités de déchets à travers 13 municipalités différentes. Les images de ces déchets flottants, capturées par l'objectif de la photographe britannique Caroline Power en 2017, ont poussé le maire Bodden et son équipe à lancer le projet de recyclage.

« Utila est une île incroyable. Je suis hondurien, et la première fois que je l'ai vue, ce fut le coup de foudre. Ce que les habitants font pour éviter que les bouteilles en plastique n'endommagent ses eaux turquoise et ne détruisent sa faune, voilà quelque chose qui mérite d'être salué », observe Eduardo Elvir, un photographe qui a visité la ville.

M. Elvir estime que les déchets sont un problème relativement important à résoudre car le tourisme et le climat régional en génèrent beaucoup. « Les habitants ont trouvé un moyen créatif de s'en débarrasser », dit-il.

Utila est la plus petite des trois îles qui composent le département des Islas de la Bahía, créée le 14 mars 1872. D'une longueur de 11 kilomètres et abritant environ 6 500 habitants, selon l'Institut national de la statistique (INE), elle ne possède pas beaucoup de routes nécessitant un revêtement. Mais la ville peut économiser de l'argent en réutilisant autant de plastique que possible ou en le transformant en blocs de béton, qui pourraient devenir un produit destiné à l'exportation.

Connue pour ses récifs coralliens, ses nombreux sites de plongée et son impressionnante vie nocturne, Utila a été choisie par lonelyplanet.com comme l'une des 10 meilleures destinations de plongée au monde. Une affirmation soutenue par les Nations unies, qui l'ont déclarée meilleure île de plongée des Caraïbes en 2017.


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En partenariat avec l'Agence universitaire de la Francophonie



Cet article est publié dans le cadre de Earth Beats, une initiative internationale et collaborative rassemblant 18 médias d’information du monde entier autour des solutions aux déchets et à la pollution. En partenariat avec l'Agence universitaire de la Francophonie.


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