Le ministre libanais des Affaires étrangères et chef du Courant patriotique libre, Gebran Bassil, s'est félicité mardi de l'adoption la veille du plan pour la réforme du secteur de l’électricité, proposé par la ministre de l’Énergie, Nada Boustani (CPL), et a mis en garde contre d'éventuels blocages politiques qui pourraient entraver son application.
"Le plan a été adopté, mais qui remboursera les pertes que nous avons enregistrées en raison des blocages qui ont eu lieu précédemment ?", s'est demandé Gebran Bassil lors d'une conférence de presse qu'il a tenue à l'issue de la réunion du groupe parlementaire du CPL.
"Ce qu'il y a de nouveau dans le plan préparé par la ministre de l’Énergie, c'est l'appel d'offre unique et le prix unique pour les solutions temporaires et permanentes, et nous n'avons jamais cherché des solutions uniquement temporaires à l'origine", s'est défendu le ministre.
Rappelant que ce plan prévoit une hausse de la tarification du courant fourni par Électricité du Liban, M. Bassil a expliqué qu'au final, "la facture restera toujours inférieure" à celle que paient aujourd'hui les Libanais à EDL, mais également aux propriétaires de générateurs privés qui pallient le manque d'alimentation en courant.
"Il n'y a que les pressions politiques qui peuvent constituer une garantie contre d'éventuels blocages en politique", a prévenu M. Bassil. "Le déficit (annuel d'EDL) est également un facteur qui peut faire pression" contre le blocage, a ajouté le chef du CPL.
Le Conseil des ministres a approuvé lundi le plan pour la réforme du secteur de l’électricité proposé par la ministre de l’Énergie, en y apportant de légers amendements, notamment sur la procédure devant réguler la gestion des appels d’offres pour les projets de construction de nouvelles centrales. La commission interministérielle ad hoc avait déjà validé jeudi dernier ce plan sans pour autant trancher ce dernier point. Plusieurs ministres, dont ceux des Forces libanaises, avaient réclamé que ces procédures soient supervisées par la Direction des adjudications (DDA), chose à laquelle a fini par consentir Nada Boustani. Le ministère de l’Énergie (sous la houlette du CPL depuis près de dix ans) s’était toujours montré réticent à cela, puisqu’il considérait que la loi régissant le fonctionnement de la DDA ne prévoyait pas que celle-ci supervise des appels d’offres lancés par des établissements publics, à l’instar d’Électricité du Liban. Concrètement, cela signifie que le ministère de l’Énergie se chargera de rédiger les cahiers des charges relatifs à ces appels d’offres, avant de les envoyer à la DDA, qui devra les valider. Et conformément à la procédure en vigueur à la DDA, celle-ci sera chargée d’examiner et d’évaluer les offres avec un comité technique qui sera formé par des experts fournis par le ministère de l’Énergie.
Mardi, le bloc de la Rencontre démocratique, présidé par Teymour Joumblatt, a salué l'adoption du plan de l'électricité tout en indiquant qu'il ne peut "pas réussir une seule seconde s'il n'est pas conforme aux lois en vigueur". "Nous renouvelons notre engagement : nous resterons vigilants pour que les lois soient appliquées et les intérêts des citoyens protégés", ont indiqué les députés du bloc dans un communiqué.
Le bloc du Futur a également salué à l'issue de sa réunion hebdomadaire l'accord sur l'électricité, affirmant qu'il s'agit d'une étape importante au niveau des réformes que souhaite entreprendre le gouvernement "en vue d'arrêter le gaspillage". "Il est important de mener à bien cette étape en respectant les conditions administratives et juridiques qui permettent la mise en œuvre rapide du plan et évitent au pays de revenir à la politique d'atermoiements et de perte de temps", a ajouté le bloc dans un communiqué, affirmant que "l'adoption de ce plan est un message clair à tous les amis et frères qui se sont réunis lors de la conférence dite CEDRE pour soutenir le Liban et l'aider à dépasser ses crises économique et monétaire".
En soirée, le chef des Forces libanaises, Samir Geagea, a indiqué avoir discuté du dossier de l'électricité avec le Premier ministre, Saad Hariri, qui l'a reçu à la Maison du Centre. "Ce plan a tout ce qu'il faut pour réussir, a dit M. Geagea. Je demande à tous les ministres d'aider à son application". Le chef des FL a en outre indiqué avoir discuté avec M. Hariri du budget. "Nous sommes face à un important défi, nous devons réaliser un budget sérieux", a affirmé le chef des FL.
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Budget
Par ailleurs, Gebran Bassil a évoqué la question de la lutte contre la corruption, notamment au sein de la magistrature, au moment où certains juges sont taxés d'être proches du président de la République, Michel Aoun, le fondateur du CPL. "Nous n'accordons de couverture (politique) à personne, et il n'y a pas de juges du mandat (Aoun) et d'autres affiliés à des partis qui ne sont pas considérés comme proches du mandat", a dit M. Bassil.
Gebran Bassil a également abordé les questions des recrutements irréguliers dans la fonction publique, accusant "certains ministres" d'être "directement responsables de cela, alors qu'ils affirmaient le contraire dans les médias".
Le chef du CPL a enfin abordé la question de l'adoption du budget de 2019, appelant à "réduire le déficit le plus vite possible". "Le budget doit inclure des réformes et des mesures financières et monétaires évoquées par le ministre de l’Économie", Mansour Bteich, affilié au CPL.
M. Bteich a émis le week-end dernier plusieurs propositions devant permettre d’apporter des solutions à la crise économique et financière que traverse le Liban, mettant l’accent sur la lutte contre l’évasion fiscale ou "l’amélioration de la gestion de la dette publique" en coordination avec la Banque du Liban afin d’en diminuer le coût.
Le ministre des Finances, Ali Hassan Khalil, a pour sa part déclaré lundi que le Conseil des ministres allait "probablement" entamer l’examen du projet de budget de l’État pour 2019 cette semaine. Il avait lui aussi insisté sur la nécessité de lancer des réformes pour réduire le déficit public qui a représenté environ 11 % du PIB en 2018 contre 7,3 % en 2017.
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commentaires (5)
Monsieur Gebran Bassil, qui remboursera le petit peuple qui depuis des années paye 2 factures: EDL + générateur...pour un courant électrique qui peut être coupé durant des heures, sans aucun avertissement ? qui remboursera les sommes gaspillées par votre ministère avec la location des navires-centrales ? qui remboursera les années perdues par votre ministère à ne rien faire de valable, ainsi que le flot de paroles, promesses, et accusations inutiles envers les autres ? Irène Saïd
Irene Said
08 h 31, le 10 avril 2019