Le procès de dix militantes saoudiennes de la cause des femmes s'est ouvert mercredi devant un tribunal pénal de Riyad, braquant une nouvelle fois les projecteurs sur la situation des droits humains dans ce pays ultraconservateur du Golfe. Cette première audience s'est tenue alors que l'Arabie saoudite tente d'améliorer son image, sérieusement écornée en raison de l'assassinat en octobre du journaliste et opposant saoudien Jamal Khashoggi par un commando venu de Riyad, à l'intérieur même du consulat saoudien à Istanbul.
Loujain al-Hathloul, Hatoon al-Fassi et Aziza al-Yousef figurent parmi les militantes jugées et arrêtées il y a près d'un an, a déclaré le président de la cour Ibrahim al-Sayari. Seuls des membres des familles ont été admis au tribunal. Les journalistes et diplomates occidentaux étaient interdits d'entrée.
L'air nerveux, les proches des militantes tenaient dans leurs mains des lettres manuscrites destinées au juge, dans l'espoir de l'inciter à être clément. M. Sayari n'a pas précisé les charges qui pesaient contre les 10 militantes. Selon l'ONG ALQST, basée à Londres, les femmes sont sous le coup de la loi contre la cyber-criminalité et sont accusées d'avoir contacté des "entités hostiles", parmi lesquelles des organisations luttant pour les droits humains.
"Il semble maintenant que les autorités vont inculper les militantes après les avoir maintenues en détention pendant près d'un an sans aucun accès à un avocat et les avoir soumises à la torture, aux mauvais traitements et au harcèlement sexuel", a déclaré à l'AFP Samah Hadid, directrice des campagnes d'Amnesty International pour le Moyen-Orient.
(Lire aussi : L’Arabie, ce pays où la femme n’est jamais majeure...)
"Escalade dangereuse"
"Les autorités considèrent désormais la défense des droits des femmes comme un crime, ce qui constitue une escalade dangereuse dans la répression de l'activisme en faveur des droits humains", a-t-elle dit.
Le juge Sayari a indiqué que les prévenues avaient eu accès à des avocats indépendants, ce qui avait été précédemment nié par certains membres de leurs familles.
Amnesty International et un proche de Loujain al-Hathloul avaient indiqué, à la veille du procès, que cette militante allait comparaître devant un tribunal de Riyad spécialisé dans les affaires de "terrorisme" et qui prononce généralement des verdicts très sévères. Mais les familles ont été informées tard mardi par les autorités que le procès se tiendrait devant un tribunal pénal.
Plus d'une douzaine de militants avaient été arrêtés en mai 2018, un mois à peine avant la levée historique d'une mesure interdisant aux femmes de conduire en Arabie saoudite.
La plupart de ces militants --ayant défendu le droit des femmes à conduire ou demandé la levée du système de tutelle qui impose aux femmes d'avoir la permission d'un parent masculin pour de nombreuses démarches-- ont été accusés de porter atteinte aux intérêts nationaux et d'aider les "ennemis de l'Etat". Ils ont été traités de "traîtres" par des médias officiels. Certains ont été relâchés depuis.
(Pour mémoire : La princesse Rima bint Bandar, première ambassadrice d'Arabie saoudite)
Réformes et répression
"Les allégations de mauvais traitements et le procès de militantes saoudiennes des droits des femmes sont un autre signe de l'escalade de la répression en Arabie saoudite", a souligné à l'AFP Adam Coogle, chercheur pour l'ONG Human Rights Watch. "Les autorités doivent immédiatement mettre fin à ces poursuites injustes et libérer tout militant accusé uniquement pour son activisme pacifique", a-t-il appelé.
Amnesty International et la famille de Mme Hathloul craignent que la militante des droits des femmes ne soit accusée de "terrorisme". Et le fait qu'elle et ses camarades aient comparu devant un tribunal pénal a suscité des spéculations sur la possibilité de leur acquittement au moment où le prince héritier saoudien Mohammed ben Salmane fait face à de nombreuses critiques à l'étranger.
"Les accusations (de nature) pénale pourraient ouvrir la voie à un acquittement", a ainsi estimé Bessma Momani, professeure à l'Université de Waterloo au Canada. "Les Saoudiens doivent tourner la page. L'économie du pays et le succès des réformes dépendent de l'élimination des perceptions négatives que les arrestations de ces femmes ont entraînées", a-t-elle dit.
Ces dernières années, le jeune prince héritier a été le moteur d'un processus de modernisation du pays, mais cette démarche s'est accompagnée d'une répression de toute forme de contestation.
La répression des militants des droits humains a entraîné de nombreuses critiques internationales à l'égard de l'Arabie saoudite, avant même l'affaire Khashoggi. La semaine dernière, 36 pays ont condamné à l'ONU l'assassinat du journaliste saoudien et réclamé à Riyad une enquête "rapide et approfondie" afin que tous les responsables soient jugés.
Lire aussi
La Saoudienne réfugiée au Canada veut se battre pour la libération des femmes
Droits de la femme en Arabie saoudite : état des lieux
Les Saoudiennes seront notifiées par texto de leur éventuel divorce
Émancipation des Saoudiennes : le changement doit venir de l’intérieur
Chocs électriques et coups de fouet : Riyad accusé de torture sur des femmes par Amnesty
"Abaya à l'envers": des Saoudiennes protestent contre le port de ce vêtement
Sur un circuit de Riyad, des Saoudiennes goûtent au grand frisson
« Donner le volant aux Saoudiennes aidera à défier les normes sociales et de genre »
Il y aura toujours des liba-niais pour croire que cet allié inconditionnel de l'occident puisse changer de but en blanc. Si comme je m'y attend certains liba-niais venaient à faire une comparaison avec L'IRAN en parlant sottement de 2 faces d'une même pièce, je dirai que L'IRAN au moins ne fait pas de cinéma, pour bluffer l'occident afin de les amadouer, en riant sous cape. Ça fait une énorme différence, parce que la liberté de la femme en Iran est réelle, comme on la perçoit.
22 h 01, le 13 mars 2019