Joseph Barrak/AFP
Beyrouth n’aura pas savouré longtemps le vent d’optimisme soulevé par l’intention de Doha, annoncée lundi, d’acheter des titres de dette en devises émis par le gouvernement libanais (eurobonds) pour une valeur de 500 millions de dollars, et qui devait pouvoir rassurer momentanément des marchés en émoi face au blocage de la formation du gouvernement depuis huit mois. Quelques heures plus tard, la décision de Moody’s, l’une des trois principales agences de notation américaines, de déclasser les obligations du Liban au rang de titres spéculatifs de mauvaise qualité est tombée comme un couperet, exacerbant davantage la fébrilité ambiante.
Nous faisons le point sur ce qu’il faut savoir pour comprendre les tenants et aboutissants des débats qui entourent ce climat incertitude.
Le cœur du problème : un déficit public qui ne cesse de se creuser
Depuis le début du ralentissement de la croissance économique en 2011, suite à l’éclatement du conflit en Syrie et la désertion des riches ressortissants des pays du Golfe, l’État libanais a de plus en plus de mal à joindre les deux bouts. Les difficultés rencontrées par le secteur privé se sont de fait répercutées sur ses recettes fiscales qui n’ont que très légèrement évolué : elles s’élevaient à 8,8 milliards de dollars en 2011, et n’atteignent que 8 milliards de dollars à fin septembre 2018, selon les derniers chiffres disponibles. Alors qu’entre-temps, ses dépenses n’ont cessé de croître : 13,2 milliards de dollars à fin septembre 2018 contre 11,6 milliards de dollars en 2011. Les trois principaux postes de dépenses publiques, qui ont progressivement augmenté durant ces années, sont le service de la dette (montant que paie l’État chaque année pour honorer ses dettes), les salaires et traitements de la fonction publique et les transferts du Trésor à Électricité du Liban pour combler le déficit de cette dernière. Résultat, le déficit public qui était de 2,3 milliards de dollars en 2011 atteignait déjà 4,5 milliards de dollars à seulement fin septembre 2018. Et selon plusieurs experts, celui-ci dépassera certainement la barre des 6 milliards de dollars sur l’ensemble de l’année 2018.
(Lire aussi : Moody’s déclasse les obligations du Liban)
Pourquoi les banques sont-elles directement concernées ?
Pour couvrir ce déficit croissant, l’État a de plus en plus besoin de s’endetter. La dette publique est en effet passée de 54 milliards en 2011 à 83,6 milliards de dollars à fin octobre 2018. Au Liban, ce sont les banques locales qui prêtent à l’État, soit directement en souscrivant à des obligations (des bons du Trésor en livres et des eurobonds en dollars), soit indirectement à travers la Banque du Liban, en y effectuant des dépôts, qui sont ensuite utilisés par la BDL pour souscrire à des obligations.
Or pour pouvoir continuer à financer l’État, les banques doivent pouvoir compter sur une croissance de leurs dépôts. Mais celle-ci ralentit de plus en plus au moment où les besoins d’endettement augmentent. La croissance des dépôts repose principalement sur les envois de fonds de la diaspora, qui diminuent pour deux raisons : la crise dans le Golfe, mais aussi une baisse de la confiance des expatriés dans la pérennité du système financier libanais du fait d’un risque politique accru et d’une situation géopolitique instable. Entre 2008 et 2011, les dépôts bancaires augmentaient chaque année de 17 % en moyenne. Depuis, ce rythme de croissance ne cesse de décélérer : sur les huit premiers mois de 2018, les dépôts n’ont augmenté que de 3 %.
Quel est le rapport avec la formation du gouvernement et la CEDRE ?
Pour arrêter ce creusement du déficit public et donc contenir les besoins d’endettement de l’État, un gouvernement doit être formé afin de mener les réformes visant à réduire ce déficit : en baissant les dépenses de l’État et en augmentant ses revenus. C’est ce sur quoi le Liban s’est principalement engagé, lors de la conférence dite CEDRE, qui s’est tenue à Paris en avril. Et qui est présenté par les différents rapports d’organisations internationales sur le Liban comme l’unique sortie de crise.
Pour augmenter ses revenus, l’État doit pouvoir lutter contre l’évasion fiscale et améliorer ainsi la collecte ou bien hausser une nouvelle fois les taxes. Pour diminuer ses dépenses, il devra agir sur ses trois principaux postes de dépenses évoqués plus haut : une réforme de la fonction publique (supprimer les emplois inutiles, créés pour maintenir le clientélisme politique) ; une réforme de l’électricité (à travers la construction de nouvelles centrales et la hausse des tarifs); et une baisse du service de la dette.
Cette dernière semble être la solution la plus réalisable à court terme, puisqu’elle permettra à l’État de gagner du temps, et d’éloigner ainsi tout risque de défaut de paiement, qui impacterait directement son principal emprunteur, le secteur bancaire libanais, et donc ses déposants, les citoyens libanais.
(Lire aussi : Le Qatar veut investir un demi-milliard de dollars dans la dette libanaise)
Quelles sont les principales options pour réduire le service de la dette ?
Plusieurs options sont possibles pour parvenir à une réduction du service de la dette. La publication d’un article du quotidien al-Akhbar citant le ministre sortant des Finances Ali Hassan Khalil, dans lequel ce dernier évoque une imminente restructuration de la dette du pays avait provoqué un regain de tension sur les marchés. Le ministre avait rapidement démenti en expliquant avoir parlé d’un rééchelonnement de la dette.
• Un rééchelonnement de la dette signifie que l’État renégocie avec les banques les termes de la dette en revoyant à la baisse les taux d’intérêt et en repoussant les échéances (payer sur dix ans au lieu de cinq ans, par exemple).
• Une restructuration de la dette signifie en revanche que l’État négocie avec les banques pour revoir à la baisse le principal (le montant du capital emprunté et pas seulement les intérêts). Dans ce cas-là, les banques encaisseront d’importantes pertes, qui se répercuteront sur les dépôts des épargnants. Elles pourraient donc consentir à un rééchelonnement de la dette pour éviter ce scénario.
• Une inflation à travers une dévaluation de la livre signifie que la BDL décide de baisser la valeur de la livre par rapport au dollar pour réduire la taille de la dette en livre et augmenter les revenus de l’État. Malgré les spéculations, le gouverneur de la BDL, Riad Salamé, s’est toujours montré très ferme en écartant totalement cette éventualité. « On entend parler de dévaluation, mais tant que l’économie est dollarisée, nous n’avons aucun intérêt à abandonner la stabilité du taux de change, puisque cela nuira à la productivité et au pouvoir d’achat, sans pour autant qu’on observe une amélioration de la compétitivité », avait-il déclaré fin décembre.
• Une forte croissance économique permettrait aussi d’augmenter les recettes fiscales de l’État, mais les prévisions écartent cette possibilité. La BDL table sur une croissance entre 1 et 1,5 % pour 2018, et la Banque mondiale et le Fonds monétaire international sur 1 %.
Comme souligné par nombre d’experts, la formation rapide d’un nouveau gouvernement permettrait d’éviter les scénarios les plus pessimistes.
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JE DOIS REVER SI J'AI BIEN COMPRIS un gouvernement doit être formé afin de mener les réformes visant à réduire ce déficit : en baissant les dépenses de l’État et en augmentant ses revenus. CELA VEUT DIRE DES QU UN GOUVERNEMENT SERA FORME ON PAIERA PLUS D'IMPOTS et evidement la reforme ne se fera pas de reduire le deficit puisque qu'aucun fonctionnaire ne pourra etre renvoye et que la corruption continuera Peut etre dans ce cas rester comme nous sommes SANS GOUVERNEMENT est excellent car la corruption a baisse puisqu'on ne vote pas de nouveaux achats bidons et aucune nouvelle taxe peut etre votee C'EST DONC CE QUE PENSENT NOS ELITES PUISQUE C'EST APPAREMENT LA SOLUTION IDEALE POUR LE LIBAN FORME DE GENS COMPETENTS CAPABLE DE RESOUDRE TOUS LES PROBLEMES DIXIT LE MINISTRE DES AFFAIRES ETRANGERE A DAVOS A CNN
15 h 50, le 23 janvier 2019