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À La Une - Liban

Vifs débats autour de la Syrie en Conseil des ministres

"Le président Aoun a insisté sur le retour des déplacés syriens sans attendre une solution politique", a fait savoir le ministre de l'Information, Jamal Jarrah.

Le gouvernement libanais de Saad Hariri, réuni en Conseil des ministres, le 21 février 2019 au palais présidentiel de Baabda. Photo Dalati et Nohra

La première réunion jeudi du gouvernement de Saad Hariri depuis le vote de confiance du Parlement a été marquée par de vifs débats politiques autour de la question du retour des réfugiés syriens et des relations avec le régime du président Bachar el-Assad.

Réuni pendant plus de cinq heures au palais présidentiel à Baabda et avec un ordre du jour composé de 106 points, le cabinet a finalement vu sa réunion suspendue par le président Michel Aoun, après les échanges politiques acerbes entre les ministres. Il a toutefois réussi à "approuver la plupart des points à l'ordre du jour", a indiqué le ministre de l'Information, Jamal Jarrah, lors d'un point de presse.

Dans son allocution au début de la réunion, le chef de l'Etat a félicité le gouvernement pour la confiance qu'il a obtenue du Parlement, soulignant "les grands espoirs" que soulève le cabinet et "ses grandes responsabilités".

"Le président Aoun a insisté sur le retour des déplacés syriens sans attendre une solution politique" à la guerre qui ravage la Syrie depuis 2011, a fait savoir le ministre de l'Information. "Le président Aoun a affirmé que nous devons compter sur nous-mêmes pour trouver tous les moyens nécessaires au retour des déplacés syriens, et en vertu de son discours d'investiture, le chef de l'Etat cherche à alléger ce fardeau", a ajouté M. Jarrah.

"La distanciation, selon notre conception, concerne ce qui se passe en Syrie, et non la question des 1,5 million de déplacés syriens qui vivent au Liban et des conséquences sociales, économiques que cette présence a eu sur nous", a dit le chef de l'Etat après la fin de l'examen de l'ordre du jour de la réunion. "Je vous le dit sincèrement : les États étrangers ne veulent pas accueillir les déplacés et nous empêchent de les rapatrier", a affirmé le président Aoun. "Aucun pays n'a accueilli des déplacés tel que nous l'avons fait. Mais cela ne peut plus continuer", a mis en garde le chef de l’État. "Je n'accepte pas qu'un tel nombre de déplacés se trouve sur le territoire de mon pays. (...) Une fois que la stabilité (en Syrie) sera rétablie, ces déplacés devront rentrer chez eux", a-t-il ajouté. Il a enfin affirmé que "le président Assad a accueilli les déplacés qui sont rentrés chez eux". "Je me demande comment peut-on rapatrier un million et demi de déplacés sans coordination avec l’État syrien".

La veille, le président Aoun avait aussi exprimé la même position.



(Lire aussi : Des messages indirects entre la Syrie et des pays arabes résonnent à Beyrouth, le décryptage de Scarlett Haddad)



La question du retour de ces réfugiés fait polémique sur la scène politique libanaise. Certains responsables, et notamment le chef de l'Etat, le chef de la diplomatie, Gebran Bassil, et le ministre d’État pour les Affaires des réfugiés, Saleh Gharib appellent à organiser le retour de ces réfugiés vers la Syrie, estimant que le pays quasiment entièrement reconquis par les forces du régime, est désormais "sûr". D'autres responsables se calquent sur le point de vue de la communauté internationale et appellent à un règlement politique du conflit avant d'assurer le retour des réfugiés. La déclaration ministérielle du nouveau gouvernement estime que "la seule solution est le retour en sécurité des déplacés dans leur pays" et accueille favorablement l’initiative russe pour leur retour.

En outre, la question de la normalisation des relations entre Beyrouth et Damas a suscité un vif débats entre ministres pro-régime Assad et leurs opposants. Plusieurs responsables du camp du 8 Mars appellent à rétablir les relations avec le régime syrien, alors que le Liban officiel s'est engagé à respecter le principe de distanciation par rapport aux conflits régionaux, notamment la guerre qui ravage la Syrie depuis 2011.

"Le chef de l'Etat a suspendu la réunion alors que plusieurs ministres souhaitaient s'exprimer sur les questions politiques", a expliqué Jamal Jarrah. "Il y a eu un débat autour de la visite du ministre Saleh Gharib à Damas lundi dernier, et cela est tout à fait naturel. Parfois le ton monte et cela n'est pas étonnant", a reconnu le ministre de l'Information.

"Nous refusons les campagnes alarmistes qui nous visent au sujet de notre visite à Damas", a réagi M. Gharib. "Le fait d'avoir des relations avec la Syrie ne peut faire l'objet d'accusations et la visite ne contredit pas le principe de distanciation comme l'affirment les Forces libanaises" de Samir Geagea, a également affirmé M. Gharib.

Lors de sa visite à Damas, M. Gharib (proche du président du Parti démocrate libanais de Talal Arslane, et relevant du lot du chef de l’Etat) s'était entretenu avec le ministre syrien de l’Environnement et de la Gouvernance locale, Hussein Makhlouf et avait exprimé son soutien au régime Assad. À cela, s’ajoutent les propos du ministre de la Défense, Elias Bou Saab, en marge de la Conférence de Munich pour la sécurité. Exprimant "les réserves du Liban" quant à un déploiement de l’armée turque dans le Nord syrien, M. Bou Saab avait jugé "illégale toute présence turque sur le territoire syrien, sans approbation du régime" et prôné le dialogue avec le régime de Damas.



(Lire aussi : Réfugiés syriens : Aoun esquive la controverse interne et met la communauté internationale devant ses responsabilités)




L'indignation de Hariri
Lors du Conseil des ministres, M. Bou Saab a regretté ne pas avoir pu répondre aux propos des ministres affiliés aux Forces libanaises qui contestent ses déclarations à Munich, en raison de la suspension de la réunion.

Le ministre des Finances, Ali Hassan Khalil, également proche du régime syrien, a fait savoir qu'il a souligné l'importance, selon lui, de "renforcer les relations avec la Syrie dans l'intérêt du Liban, car la Constitution prévoit cela".

La ministre d'Etat pour le Développement administratif, May Chidiac, affiliée au Forces libanaises et hostile au régime Assad, a pour sa part affirmé qu'"il n'y a pas de différend autour la question des déplacés syriens, mais le conflit se situe au niveau des relations avec le régime syrien, alors qu'on oublie que ce régime a accusé le chef du gouvernement (Saad Hariri) de terrorisme". "Le président Hariri s'est indigné de cela et n'a pas pris part au débat politique", a-t-elle fait savoir.

Le ministre du Travail, Camille Abou Sleiman, également membre des FL, a confirmé le caractère vif des débats autour des relations avec la Syrie et a indiqué que "chaque formation est restée attachée à ses positions". "Nous avons été étonnés par les prises de positions de certains ministres en faveur de la Syrie qui a placé le chef de notre gouvernement sur une liste terroriste, et ce avant même la tenue du premier Conseil des ministres. Voilà pourquoi nous avons exprimé notre objection", a abondé dans le même sens le ministre des Affaires sociales, Richard Kouyoumdjian, également affilié aux FL.



(Lire aussi : La polémique autour de la visite de Gharib à Damas appelée à vite se calmer)



Par ailleurs, le ministre de l'Information, Jamal Jarrah, a fait savoir que le ministre de l'Education, Akram Chehayeb, a demandé de débattre de la question des six échelons à accorder aux enseignants en formation. Ce point sera en tête de l'ordre du jour du prochain Conseil des ministres, a dit M. Jarrah.

Enfin, la ministre de l'Intérieur, Raya el-Hassan, a annoncé que des élections législatives partielles à Tripoli se tiendront dans les deux prochains mois, après la publication de la loi relative à cette question dans le journal officiel. Le Conseil constitutionnel a annoncé jeudi qu'il invalidait l'élection de la députée sunnite de Tripoli Dima Jamali (courant du Futur), après avoir étudié le recours en invalidation présenté par le candidat malheureux des Ahbache (islamistes prosyriens), Taha Nagi. Son recours a été retenu par le CC en raison de la présence de violations enregistrées lors du scrutin.



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commentaires (4)

AU LIEU DE DEBATS SUR L,ECONOMIE, LES FINANCES, LA DETTE EXUBERANTE, LA CORRUPTION ET LE DEVENIR DU PAYS ET DE SON PEUPLE... DES FESSES QUI CHAUFFENT DES BANCS !

LA LIBRE EXPRESSION

19 h 28, le 21 février 2019

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Commentaires (4)

  • AU LIEU DE DEBATS SUR L,ECONOMIE, LES FINANCES, LA DETTE EXUBERANTE, LA CORRUPTION ET LE DEVENIR DU PAYS ET DE SON PEUPLE... DES FESSES QUI CHAUFFENT DES BANCS !

    LA LIBRE EXPRESSION

    19 h 28, le 21 février 2019

  • A quoi sert le Haut-Conseil libano-syrien, à sa tête un membre éminent du PSNS pro-Syrien ? Ce Haut-Conseil, imposé aux temps de l'occupation syrienne est un doublon de l'ambassade de Syrie au Liban, par définition il n'a plus de raison d'être. La Syrie est un pays étranger situé au voisinage immédiat du Liban tout comme l'Italie est voisine de la Suisse. La Suisse n'a de relations spéciales avec aucun pays de son voisinage immédiat. Pourquoi certains politiciens locaux veulent-ils établir des relations spéciales avec la Syrie, pays étranger comme tous les pays étrangers du monde ?

    Un Libanais

    19 h 11, le 21 février 2019

  • Qu'on ne perde plus de temps , on normalise avec la Syrie du héros VAINQUEUR et on commence à bosser pour l'intérêt du Liban. Ainsi le groupe majoritaire + le PHARE AOUN COMMANDANTE KHENERAL le veulent . Que leur volonté soit faite .

    FRIK-A-FRAK

    18 h 41, le 21 février 2019

  • Félicitations pour obtenir la confiance du parlement, mais à quoi sa rime si tous les blocs parlementaires sont au gouvernement? Qui va contrôler le travail de ce gouvernement? On a besoin d'un gouvernement qui travaille, donc cohérent et cohésif. Il faut une majorité avec un programme, une opposition qui s'oppose à l'inetérieur du parlement, bref, une gouvernance. Faute de quoi, on se dirige droit vers une nouvelle guerre ou une révolution. Le peuple en a assez!

    Bachir Karim

    18 h 23, le 21 février 2019

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