En visite aux Émirats arabes unis, le Premier ministre Saad Hariri a mis sur ce plan le doigt sur la plaie. Relevant que le Liban se trouve face à la dernière opportunité d’attirer à nouveau les investissements étrangers, il a affirmé la détermination de son gouvernement à enclencher sérieusement le processus de redressement tant attendu. À la bonne heure… Car le pays se rapproche à grands pas de la ligne rouge – s’il ne l’a pas déjà atteinte – en termes de détérioration des conditions de vie et de la chute de la performance des services publics les plus élémentaires.
Du rationnement drastique en courant électrique – qui se montre « tenace » depuis la fin (officielle) de la guerre libanaise – jusqu’au réseau internet qui fonctionne à une cadence sinusoïdale, en passant par le drame surréaliste des déchets solides et liquides, la pollution généralisée, l’état scandaleux du réseau routier (véritable complot contre les voitures), la léthargie d’une bonne partie des administrations publiques, sans compter la stagnation économique qui n’épargne aucun secteur, ou aussi l’envolée des frais scolaires et universitaires, et l’essor destructeur des carrières qui ravagent nos montagnes et défigurent la nature : le cabinet Hariri III a beaucoup de pain sur la planche …
Depuis pratiquement la fin des années 50, les Libanais – ou du moins une partie d’entre eux – se montrent plus royalistes que le roi à chaque fois qu’un acteur régional est engagé dans un conflit ou une quelconque aventure. Ce fut le cas avec la montée du nassérisme à la fin des années 50, l’implantation des organisations armées palestiniennes à partir de 1969, les visées anschluciennes de la Syrie sur le Liban, l’occupation israélienne et, cerise sur le gâteau, l’expansionnisme iranien au Liban et dans la région…
Si le nouveau gouvernement est réellement sérieux dans sa volonté, affichée, de sortir le pays de l’ornière, il doit montrer dans ce contexte qu’il perçoit à sa juste valeur la volonté de l’écrasante majorité des Libanais de voir les responsables – ou plus précisément certaines factions –accorder la priorité absolue aux affaires internes réglementant la vie quotidienne de la population, après près de six décennies de fanfaronnades régionales stériles. Aujourd’hui, pour les classes moyennes et appauvries, la solution radicale à la crise chronique des déchets est bien plus importante que la contribution à la sauvegarde du régime de Bachar el-Assad ; l’approvisionnement en courant électrique, la gestion des services publics, le fonctionnement normal et régulier du réseau internet sont plus cruciaux que l’implication dans l’aventurisme d’un Kassem Souleimani ; la réhabilitation du réseau routier et, d’une manière générale, de l’ensemble des infrastructures de base du pays doit prendre le dessus sur la solidarité communautaire au Yémen, en Irak ou à Bahrein ; la relance de la croissance économique devrait se substituer à la lutte doctrinale et sectaire menée contre l’Occident et les pays du Golfe…
Le leitmotiv « Liban d’abord » peut paraître un slogan creux. Mais il reflète en réalité un conflit profond entre deux courants qu’opposent des options existentielles totalement divergentes : celui qui souligne que le peuple libanais a suffisamment enduré des conflits régionaux depuis près de six décennies sans grand résultat et qu’il est par conséquent temps que l’on s’occupe de son bien-être à tous les niveaux ; et le courant qui prend toute la population en otage pour rester ancré idéologiquement à un projet transnational qui fait fi des considérations d’équilibres internes et des impératifs de la paix civile…
Le véritable enjeu du nouveau gouvernement aujourd’hui se situe à ce niveau précis : créer une dynamique interne puissante pour imposer comme priorité absolue le traitement des grands dossiers internes en suspens. Et face à un tel enjeu, les calculs politiciens et purement partisans ne sauraient avoir leur place.
Votre article est un délice de vérité ! Bravo ! Mais bien sûr le Liban d’abord ! Que dit L’Iran d’après vous ? L’Arabie saoudite que dit elle ? Que dit Israël ? Les Palestiniens ? La Syrie dit elle le Liban d’abord et ensuite on verra ? L’Égypte que dit elle ? Que disent les USA ? La Russie ? La Chine ? La suisse ? Et même chaque pays européens ? .....Que disent ils ? Ils mettent en avant leur pays , leur population et leurs préoccupations ...c’est pas compliqué ,c’est universel et évident comme la rotation de la terre ....
16 h 52, le 12 février 2019