Les yeux étaient rivés hier sur Baabda où s’est rendu dans l’après-midi le Premier ministre désigné, Saad Hariri, pour un entretien avec le chef de l’État, Michel Aoun, une visite qui a fait miroiter, quelques heures durant, l’espoir prudent d’un déblocage au niveau de la formation du gouvernement. Il n’en était rien. M. Hariri, qui n’avait aucune proposition en poche, est sorti de Baabda pour dire, une fois de plus, une phrase lapidaire portant sur la nécessité de hâter le processus « à la lumière de la situation économique inquiétante », et qu’il allait prochainement revoir le président à cette fin.
On apprendra également que l’entretien entre les deux hommes a été l’occasion de passer en revue les réactions suscitées après la dernière rencontre – tenue secrète – qui a eu lieu entre eux avant le départ du chef de l’État à New York, il y a deux semaines. Des sources politiques citées par notre correspondante à Baabda, Hoda Chédid, ont indiqué qu’un échange fructueux autour de nouvelles idées a eu lieu entre MM. Aoun et Hariri, qui ont également passé en revue les différentes formules gouvernementales déjà évoquées. Aucune autre précision quant à la teneur de ces formules n’a été livrée, les deux parties ayant tenu à garder confidentielle la teneur de la discussion à ce propos.
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Pour certains observateurs, le timing de ce déplacement à Baabda, qui a été annoncé en dernière minute, serait en partie lié à l’interview télévisée, très attendue par ailleurs, de M. Hariri avec notre confrère Marcel Ghanem, qui inaugure ce soir son nouveau talk-show, Sar el-Waqt (Il est temps) sur la MTV.
D’une pierre deux coups, estime une source informée : le Premier ministre aura ainsi montré patte blanche en se rendant à Baabda, démontant la thèse de l’attentisme que d’aucuns véhiculent, selon laquelle M. Hariri « se croiserait les bras en observant le chaos ambiant », et prouvant par là qu’il continue de s’activer sans répit pour faire aboutir le processus de formation du cabinet. En second lieu, M. Hariri aura également tâté le pouls par la même occasion en « récoltant les données nécessaires qu’il devra livrer aujourd’hui au grand public, lors de son apparition télévisée », note encore la source. Mais quelle que soit l’intention présumée du Premier ministre à travers cette visite, elle n’aura pas abouti en tout cas au déblocage escompté.
À l’heure où un mélange confus d’optimisme et de pessimisme plane sur le pays selon les perspectives qui sont mises en avant, l’on peut facilement deviner que les nœuds gordiens déjà connus en matière de répartition des quotes-parts entre les différents camps politiques persistent pour l’heure, les FL maintenant leur revendication de quatre portefeuilles, et le PSP de trois portefeuilles.
Même si des informations sur de nouvelles formules envisagées de part et d’autre continuent de circuler – on évoque notamment une entente sur le principe qu’aucune des parties politiques ne pourra avoir le tiers de blocage, et une proposition formulée par le président consistant à accorder aux FL la vice-présidence du Conseil en plus des portefeuilles des Affaires sociales et de l’Éducation et d’un ministre d’État, formule que la formation chrétienne a refusée –, la configuration générale reste encore imprécise, d’autant qu’une nouvelle entrave semble poindre à l’horizon : les Marada, qui prétendent à un portefeuille de service, insiste qu’il soit celui des Travaux publics, un ministère très convoité que le CPL tient à inclure dans sa part. A la place, la formation de Sleiman Frangié s’est vu proposer le portefeuille de la Santé, déjà réservé par le Hezbollah, et qui de toute manière a été boudé par les Marada.
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Quant à la question de la quote-part réclamée par le PSP, elle serait en voie d’être réglée, selon des sources informées citées par l’agence al-Markaziya. Une chose semble certaine : aussi bien le PSP que les FL, désormais unis et solidaires dans leurs revendications respectives, semblent déterminés à ne pas lâcher prise, ni à dépasser le plafond de concessions qu’ils se sont fixé, et qu’ils pourraient consentir. Dans les milieux proches du PSP, on dit toutefois « craindre une manœuvre de la part du président, qui chercherait à écarter les FL du gouvernement », un scénario que « le PSP, encore moins M. Hariri, n’accepteront jamais », affirme une source informée à L’OLJ. Celle-ci rappelle au passage que les FL et le PSP ont déjà convenu d’un commun accord qu’ils n’adhéreront à aucune solution trouvée au détriment de l’un ou l’autre.
Entre-temps, le Premier ministre désigné continue de ménager la chèvre et le choux, en manifestant d’une part sa solidarité avec ses alliés, les FL et le PSP, et d’autre part son attachement au partenariat conclu avec le chef de l’État auquel il est en quelque sorte contraint et sans lequel aucun accord autour du gouvernement n’est possible. C’est d’ailleurs pour préserver ce climat d’entente forcée que M. Hariri multiplie les efforts en vue de consolider sa relation de confiance avec celui qui, un jour, finira probablement par avaliser la mouture gouvernementale qu’il lui aura présentée.
C’est dans cette optique qu’il faut comprendre les nombreuses déclarations du Premier ministre qui, plus d’une fois, a souligné que les obstacles à la naissance du gouvernement sont exclusivement internes, réfutant toute accusation d’ingérence ou pression exercée par l’Arabie saoudite. Une position qu’il aurait également réitérée devant le chef de l’État, à l’issue de l’une de ses rencontres avec lui. « M. Hariri est sincère lorsqu’il dit que Riyad ne se mêle pas de la formation du gouvernement. En effet, l’Arabie saoudite n’a à ce jour donné aucun avis dans un sens ou un autre au Premier ministre à ce sujet, mais observe un silence religieux et attend voir comment il va s’en sortir », commente pour L’OLJ une personnalité politique sunnite proche de Riyad.
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commentaires (8)
Lors d'une grande maladie on tourne la sourde oreille à nos grand mères et amis pour des conseils médicaux et l'ont va directement vers un spécialiste pour s'assurer une guérison rapide plutôt qu'un enterrement express.... De même pour le gouvernement et étant donné la situation super critique au dire de tout nos Présidents de ci et de ça. Alors au lieu de perdre le temps en réunion sans lendemain trouvons les spécialistes dans leur domaines pour sauver le pays et nos politiciens pourront entretemps s'adonner à leur batailles philosophico-internationalo-géopolitico-etcetaro… Une le pays sauvé tout ce monde sera content et tous fanfaronneront leur contribution essentielle et vitale… bass yalla trouvons ces ministres et allons y rapidement!!! Sinon il faudra préparer les funérailles plutôt que le séjour de convalescence.
Wlek Sanferlou
22 h 48, le 04 octobre 2018