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Liban - Environnement

Après Aqoura et Tannourine, c’est au tour du jurd de Batroun d’être menacé par les carrières

Un pan de montagne défiguré à Bouchtoudar Aoura. Photo Paul Abi Rached

La recherche d’un site d’extraction de pierres pour la construction du très controversé barrage de Balaa se poursuit. Si les habitants de Akoura et de Tannourine ont réussi à sauver in extremis leurs jurds de la défiguration, ceux de Batroun ont découvert le week-end dernier une carrière bel et bien ouverte et dont les pierres devraient être acheminées vers Balaa.

La carrière en question se trouve à Bouchtoudar Aoura, une localité limitrophe à Kfarhelda et Bsétine el-Ossi (caza de Batroun). C’est grâce au Mouvement écologique libanais (LEM) que l’affaire a éclaté au grand jour, après que des vidéos et des photos montrant la carrière ont circulé ces derniers jours. Le site d’extraction de sable et de pierres est établi sur un terrain appartenant au monastère grec-orthodoxe de Mar Youhanna, à Douma.

« Nous ne savons pas encore depuis quand cette carrière est active. C’est vers la mi-mai que nous avons pris connaissance de son existence, grâce à une personne qui l’avait prise en photo. Nous avons alors lancé un appel sur les réseaux sociaux pour voir de quoi il s’agissait », explique à L’Orient-Le Jour Paul Abi Rached, directeur du LEM. Quelques jours plus tard, le mouvement reçoit une lettre de l’avocat du couvent Mar Youhanna dans laquelle ce dernier explique que la parcelle est en train d’être transformée en terrain agricole selon un contrat effectué avec la société Eddé-Moawad et que les pierres qui en sont extraites serviront à la construction du barrage de Balaa. À noter que le promoteur Eddé-Moawad est chargé de la réalisation du barrage. Il est aussi celui qui avait tenté d’établir des carrières à Tannourine et Akoura. « Nous avons porté plainte contre cette carrière le 19 juin au ministère de l’Environnement. Le site n’est pas inclus dans le plan officiel des carrières au Liban. C’est une région touristique. De plus, il y a des lois qui régissent la préparation d’un terrain agricole », souligne M. Abi Rached, qui s’est rendu sur place il y a quelques jours et a filmé l’étendue des dégâts. « Ils ont besoin de 1 500 000 m3 de rochers pour le barrage de Balaa. Ce projet est un échec total, le site est mal choisi, il faut un sol imperméable. Ils vont détruire nos montagnes pour extraire des pierres qui serviront à fermer les cavités du sol à Balaa », indique l’activiste qui révèle qu’il y a actuellement trois projets de carrières à Aïn Dara dont les pierres devraient servir également à l’édification du barrage.

M. Abi Rached assure par ailleurs que l’extraction des pierres battait son plein samedi en début d’après-midi, malgré les contacts effectués par le député de Batroun Fady Saad, pour arrêter les travaux. « J’ai contacté les Forces de sécurité intérieure pour geler le travail de cette carrière, le temps de se renseigner sur la légalité de son travail et sur son impact écologique », affirmait M. Saad samedi dans un communiqué. Il a par ailleurs insisté sur la nécessité « d’arrêter le travail dans toutes les carrières de Batroun qui servent à construire un barrage dont l’utilité économique et le coût élevé laissent à désirer ».


(Lire aussi : Paul Abi Rached à « L’OLJ » : Les décisions sur les carrières constituent une violation flagrante de la loi)


Projet avorté à Tannourine
Interrogée par L’OLJ, une source bien informée à Tannourine a pour sa part assuré que le projet de carrières dans le village a été définitivement clos le week-end dernier. « Le conseil municipal est revenu sur sa décision samedi, après avoir découvert qu’il n’y avait pas d’étude sur l’impact écologique de ce projet. Le président de la municipalité pensait que cette étude avait été faite par le ministère de l’Environnement. Il est revenu sur sa décision quand il a compris que ce projet était néfaste (…) », souligne la source.

« Cette histoire est du passé maintenant. Les habitants ont refusé la carrière, ils ne veulent pas défigurer le jurd de Tannourine, surtout qu’il y a beaucoup de sources d’eau qui pourraient être affectées », ajoute la source. « Le barrage de Balaa a coûté 50 millions de dollars jusqu’à maintenant et il pourrait encore coûter 20 millions de plus, alors que tout le monde sait que le terrain à Balaa n’est pas imperméable », dénonce-t-elle.

Réagissant sur Twitter, l’ancien ministre Boutros Harb a félicité samedi les habitants de Tannourine « pour la fin du cauchemar de la défiguration du jurd et de l’atteinte à l’équilibre environnemental » du village. « Les membres du conseil municipal ont pris une décision courageuse, qui est celle de revenir sur une décision prise selon des données erronées », a-t-il dit.



Voir aussi notre dossier spécial
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La recherche d’un site d’extraction de pierres pour la construction du très controversé barrage de Balaa se poursuit. Si les habitants de Akoura et de Tannourine ont réussi à sauver in extremis leurs jurds de la défiguration, ceux de Batroun ont découvert le week-end dernier une carrière bel et bien ouverte et dont les pierres devraient être acheminées vers Balaa. La carrière en...

commentaires (5)

Complainte pour Faytroun. Faytroun, village du Kesrouan, en moyenne montagne à 35 km au nord de Beyrouth était connu jadis par son site rocheux appelé "Jouway'ats". Les "Jouway'ats" que je compare aux Dolomites en Italie ou aux Aiguilles de Bavella en Corse, ajoutaient un plus à l'air sec du village recommandé pour les asthmatiques. Les "Jouway'ats" étaient aussi le lieu des premiers amours des autochtones et des estivants. Eloigné de 3227 km à vol d'oiseau de Faytroun, j'ai demandé récemment à un parent qui y réside des nouvelles des "Jouway'ats". Il m'a répondu : Ils n'existent plus, les concasseurs sont passés par là.

Un Libanais

17 h 50, le 25 juin 2018

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Commentaires (5)

  • Complainte pour Faytroun. Faytroun, village du Kesrouan, en moyenne montagne à 35 km au nord de Beyrouth était connu jadis par son site rocheux appelé "Jouway'ats". Les "Jouway'ats" que je compare aux Dolomites en Italie ou aux Aiguilles de Bavella en Corse, ajoutaient un plus à l'air sec du village recommandé pour les asthmatiques. Les "Jouway'ats" étaient aussi le lieu des premiers amours des autochtones et des estivants. Eloigné de 3227 km à vol d'oiseau de Faytroun, j'ai demandé récemment à un parent qui y réside des nouvelles des "Jouway'ats". Il m'a répondu : Ils n'existent plus, les concasseurs sont passés par là.

    Un Libanais

    17 h 50, le 25 juin 2018

  • Ceux qui nous gouvernent n'ont pas, le temps de s'occuper de ces futilités, les carrières de Aïn-Dara, de Meyrouba, de Akoura, de Tannourine, de Batroun, de Balaa... toute leur attention va vers les naturalisations de milliers et de milliers d'étrangers dont la plupart sont des truands et autres contrebandiers qui fuient la justice de leur pays et des Tribunaux internationaux. Dans ce domaine le Liban prend le rôle tenu jadis par Tanger, Macao et Hong-Kong.

    Un Libanais

    15 h 53, le 25 juin 2018

  • Quelle honte! Personne n'en veut et ils continuent en cachette! Ils mentent et se moquent de nous.

    Chahrouri Fadi

    12 h 41, le 25 juin 2018

  • Les "religieux" eux aussi, trempent dans ces complots indignes et honteux qui ne servent qu'à remplir leurs caisses ? Et les "officiels" de cette région, que font-ils ? Irène Saïd

    Irene Said

    08 h 39, le 25 juin 2018

  • IL FAUT CHOISIR UNE PLACE... ET IL Y EN A AU LIBAN... QUI N,ENLAIDIRAIT PAS LA NATURE ENVIRONNANTE !

    LA LIBRE EXPRESSION

    08 h 09, le 25 juin 2018

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