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Culture - Spectacle

Avec Omar Rajeh, le spectateur met les pieds sous la table

Fattouche, arak et bonne humeur s’invitent dans la danse de Omar Rajeh.

« Mon approche de la scène et du corps est liée aux notions de centre et de cercle », affirme le chorégraphe Omar Rajeh. Photo DR

Dans le cadre de la sixième édition du programme Séquence Danse, Le Centquatre (espace parisien de création et de production) a accueilli le spectacle de Omar Rajeh, Beytna. Un véritable festin pour les sens : danse, musique, film, cuisine et dégustation… Une expérience artistique et conviviale surprenante et réussie.

À l’origine du concept, celui qui a activement contribué à la mise en place d’une scène libanaise de danse contemporaine précise : « Tous les dimanches de mon enfance, comme dans la plupart des familles, on se retrouvait chez mon grand-père et la journée était en grande partie concentrée autour de la préparation du repas. En même temps, on parlait, on chantait… J’ai voulu recréer ces moments de partage et de générosité avec des artistes internationaux
et avec le public. »

L’enjeu du fattouche
C’est dans les discrets effluves d’une makhlouta qui mijote (sur scène), que le personnage de la chef entre en scène et récite la recette du fattouche en arabe. Elle nomme les ingrédients, bien disposés sur la table longiligne et mobile, qui traverse tout l’espace scénique. Autour d’elle, des hommes émincent oignons, tomates, menthe, concombres… Le silence, le bruit des couteaux, quelques timides échanges, puis quatre musiciens (Ziad Ahmadiyé, Youssef Hbeisch, Samir Nasreddine et Ziad Sahhab) commencent à jouer du oud et des percussions. Les danseurs solistes s’engagent peu à peu dans une recherche symbolique sur leurs traditions respectives et leurs expériences personnelles. Aux côtés de Omar Rajeh, trois chorégraphes du Togo, de Belgique et de Corée : Anani Sanouvi, Koen Augustijnen et Moonsuk Choi. « Chacun développe un style différent, on n’a pas la même pensée de la scène ou du corps. Mon approche personnelle est liée aux notions de centre et de cercle, et j’envisage l’espace corporel comme une matrice », explique le directeur artistique du Maqamat Dance Theatre. La monumentale table roulante est régulièrement déplacée et structure la scène : la chef, imperturbable, poursuit sa cuisine et agit comme une présence apaisante alors que les chorégraphies se succèdent, s’entremêlent, s’affrontent ou se répondent.


(Pour mémoire : Bipod 2018 mène la danse pour la femme)


Ce que l’on est, ce que l’on devient
Au moment solennel du mélange des ingrédients, un film qui met en abyme les chorégraphes est projeté, l’un d’eux constate : « We are different, we have to work together. It is not the idea that we become the same thing. » (Nous sommes différents et travaillons ensemble. L’idée n’est pas de devenir identiques).

La métaphore de la cuisine pose une question simple, selon le chorégraphe libanais : « Comment gérer la différence? Autrement dit, comment vivre et travailler ensemble ? Dans le studio, c’était notre défi : nous venons de cultures artistiques différentes et il s’agissait de travailler ensemble. Ce sont nos différences qui ont rendu le spectacle possible, pas nos points communs. »

C’est aussi la tension qui existe entre ce dont on hérite et ce que l’on choisit qui est en jeu : « Où qu’on aille, on pense au point de départ, c’est pour cela que c’est ma mère qui joue la chef. Ça ne marche pas avec quelqu’un d’autre, ça n’a pas de sens. On ne peut pas choisir d’où on vient, mais on peut choisir ce qu’on en fait. »

Au cours du spectacle, celui qui est à l’origine du concept Beytna convie le public à rejoindre les artistes sur scène, pour partager le très copieux repas, accompagné d’un verre d’arak. L’enthousiasme est général et l’ambiance conviviale, alors que se déploie une chorégraphie jubilatoire. « Depuis avril 2016, nous produisons notre spectacle dans différentes villes : Vienne, Amsterdam, Luxembourg, Beyrouth… Et ça marche, les gens sont heureux. À Paris, où la scène de la danse est très vivante, nous avons reçu un bel accueil. La prochaine étape du spectacle est le Steps Festival qui se déroule en Suisse en avril », conclut Omar Rajeh.



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