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Diplomatie : Trump tient des victoires d'étape mais n'a pas encore remporté ses "paris"

La diplomatie agressive n'est pas efficace dans toutes les crises, estiment des experts. 

Le président américain, Donald Trump, lors du forum Generation Next, à Wahsington, le 22 mars 2018. REUTERS/Leah Millis

De la Corée du Nord au commerce, Donald Trump en est persuadé : montrer les muscles des Etats-Unis, y compris à ses alliés, ça marche. Mais s'il n'a encore perdu aucun des ses nombreux "paris" diplomatiques, il n'en a pas gagné non plus.

"Pendant des années et sous de nombreuses administrations, chacun s'accordait à dire que la paix et la dénucléarisation de la péninsule coréenne étaient inenvisageables. Maintenant il y a une bonne chance de voir Kim Jong Un faire ce qu'il faut pour son peuple et pour l'humanité", a tweeté mercredi le président américain, après la rencontre historique à Pékin entre le dirigeant nord-coréen et son homologue chinois Xi Jinping.



Pour l'homme d'affaires républicain, néophyte en diplomatie mais qui ne cesse de vanter ses talents de négociateur, l'annonce spectaculaire d'un prochain sommet Kim-Trump et l'apparente ouverture diplomatique en provenance de Pyongyang sont clairement à mettre au crédit de sa stratégie de "pression maximale", mélange de sanctions, invectives et menaces militaires.

"Tout cela ne serait pas arrivé sans Trump", concède Ian Bremmer, président de la société d'expertise Eurasia Group, jugeant qu'il a réussi à obtenir de la Chine qu'elle redouble de pression sur son allié nord-coréen.

Pour Andrew Mertha, professeur à la Cornell University, le milliardaire iconoclaste semble en effet "avoir secoué les choses et fait avancer le dossier de manière inimaginable jusque-là".

Si son "imprévisibilité" a pu ébranler ses alliés, "elle a créé un environnement où même certains des négociateurs les plus durs ont peur de voir ce qui peut arriver et sont donc prêts à discuter avec lui", abonde Jonathan Schanzer, du groupe de pression conservateur Foundation for Defense of Democracies.

Mais pour ces experts interrogés par l'AFP, ces premiers succès sont à relativiser.


(Lire aussi : De Bush à Trump, de l’Irak à l’Iran : l’histoire se répète-t-elle ?)



"Prix à payer" 
Le prochain sommet, s'il se confirme, peut aussi être interprété comme une victoire pour Kim Jong Un, qui discutera symboliquement d'égal à égal avec le président de la première puissance mondiale. "Le prix à payer, c'est qu'on accède exactement à ce que voulait Kim", déplore Andrew Mertha.

Et l'issue d'éventuelles négociations reste incertaine. Au cœur des interrogations, la notion de "dénucléarisation" dont la Corée du Nord se dit prête à discuter.
"Pour eux, la dénucléarisation de la péninsule coréenne inclut forcément un retrait des troupes américaines de Corée du Sud et la fin du parapluie nucléaire américain pour Séoul", souligne Ian Bremmer. "Ce serait une grande victoire pour les Chinois, pas pour les Américains !" Pour ce consultant, "il y a à la fois de plus fortes chances de percées avec Trump, mais aussi de plus forts risques de voir tout capoter et déboucher sur une confrontation militaire".

Sur le front commercial, l'administration américaine assure que ses menaces protectionnistes ont poussé les voisins mexicain et canadien à faire des concessions, et pourraient aussi marcher avec le rival chinois. Elle tient même une première victoire avec l'accord commercial conclu avec la Corée du Sud.

Là aussi, les gains risquent d'être de courte durée. "Trump va peut-être réussir à intimider certains pays pour obtenir de meilleurs accords", mais cette stratégie "unilatéraliste" risque de "nuire à l'influence des Etats-Unis sur le long terme", poursuit Ian Bremmer.


(Pour mémoire : De la Corée du Nord à l'Iran, un an de politique étrangère de Trump)


En outre, la diplomatie agressive n'est pas efficace dans toutes les crises. Washington n'a pas obtenu de concessions en se retirant de l'accord de Paris sur le climat. Sur la Syrie, ses mises en garde répétées n'ont pas fait fléchir la Russie. Et la reconnaissance de Jérusalem comme capitale d'Israël, conjuguée à sa fermeté financière vis-à-vis des Palestiniens, ont pour l'instant surtout sapé le rôle de médiateur des Etats-Unis.
Quant à l'Iran, "si la peur du comportement du président a favorisé une diminution du harcèlement de notre Marine dans le golfe Persique", selon Jonathan Schanzer, ses menaces de retrait de l'accord sur le nucléaire ont pour l'instant semé plus de désarroi qu'apporté de solutions.

Quel sera sur tous ces dossiers l'impact de la nomination de deux "faucons", Mike Pompeo comme secrétaire d'Etat et John Bolton comme conseiller à la sécurité nationale ? L'agressivité de la diplomatie trumpienne n'en sera que décuplée.
Jonathan Schanzer, très critique à l'égard de l'accord sur le nucléaire iranien, veut croire que cela "change la dynamique" en incitant les alliés européens de Washington à rechercher plus activement des compromis pour éviter que les Américains "déchirent" ce texte auquel ils tiennent tant.

Mais rien n'est moins sûr. "La fin de ces histoires doit encore être écrite", concède-t-il. "Le président utilise les manières fortes et multiplie les paris. Jusqu'ici, il n'a pas gagné, mais il n'a pas perdu non plus."


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