Rechercher
Rechercher

Moyen Orient et Monde - Analyse

Comment Trump a isolé les États-Unis du reste du monde

En un an, le président américain a contribué à scier la branche sur laquelle son pays était assis depuis des décennies.

Le président américain à la tribune de l’ONU en septembre dernier. Timothy A. Clary/AFP

Les plus optimistes diront que cela aurait pu être pire. Un an après son investiture, le président américain Donald Trump n’a pas autant bouleversé l’échiquier mondial que ses déclarations en tant que candidat le faisaient craindre. Washington est toujours engagé au sein de l’OTAN et a rassuré ses alliés européens et asiatiques quant à ses intentions de pérenniser leur partenariat en matière de défense. L’accord nucléaire avec l’Iran est encore en vie, bien que chancelant. Les relations entre Washington et Pékin ne se sont pas particulièrement dégradées. Le mur censé s’étendre tout au long de sa frontière avec le Mexique est encore considéré comme un projet irréaliste. Et le plus important : malgré les discours va-t-en-guerre, l’Oncle Sam ne s’est pas aventuré dans un nouveau conflit armé au cours de cette année.

Les réalistes, essentiellement des généraux, qui entourent le président américain semblent tout faire pour limiter les dégâts et pour préserver une certaine continuité. Désavoué par son chef à de multiples occasions, le secrétaire d’État américain Rex
Tillerson tente également de calmer le jeu à chaque nouvelle crise et de rassurer tous les alliés. Il est ainsi clair que la diplomatie américaine n’est pas entièrement dépendante du bon-vouloir de son actuel président. Et que celle-ci ne s’inscrit pas en totale rupture vis-vis du mandat précédent sur plusieurs dossiers-clés : relations avec la Chine et la Russie, engagement au sein de l’OTAN, retrait partiel du Moyen-Orient, lutte contre le terrorisme, etc. 


(Lire aussi : Les moments marquants de la turbulente présidence Trump, an 1)


Pour sa première année au pouvoir, le locataire de la Maison-Blanche peut même se targuer de quelques succès, comme la reprise des villes de Raqqa et de Mossoul des mains de l’État islamique – même si en l’occurrence il s’est contenté de poursuivre la stratégie décidée par Barack Obama – ou l’accord avec la Chine sur le renforcement des sanctions contre la Corée du Nord.
Voilà pour la lecture optimiste qui pourrait être résumée ainsi : Donald Trump aboie pour l’instant plus qu’il ne mord. Il menace de bombarder Pyongyang, mais Washington continue de privilégier l’approche diplomatique dans ce dossier. Il multiplie les discours bellicistes à l’encontre de l’Iran, mais, dans les faits, il ne s’est pas encore retiré de l’accord nucléaire et il a pour l’instant évité la confrontation directe avec les Iraniens et leurs obligés sur le théâtre syro-irakien. De là à tirer de ce constat général un motif de satisfaction, il y a toutefois un (grand) pas. Certes, Donald Trump n’a pas (encore) cassé toute la baraque, comme on pouvait le craindre, mais il a tout de même déjà fait beaucoup de dégâts.


(Lire aussi : Trump : les dix tweets qui résument un an de pouvoir)



La doctrine du retrait
Son obsession à vouloir détruire l’héritage de son prédécesseur, sa profonde méconnaissance des dossiers, son utilisation intempestive de Twitter pour réagir – au gré de son humeur – aux questions les plus sensibles sur la scène internationale, son incapacité à se présidentialiser, comprendre les règles de la diplomatie ont fortement impacté l’image des États-Unis dans le monde. En douze mois, le 45e président américain aura réussi à scier une partie de la branche sur laquelle son pays était assis depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale. C’est l’ordre international que Washington a édifié et a essayé de renforcer pendant des décennies que Donald Trump est profondément en train de fragiliser. Son slogan « America First » s’est soldé dans la réalité par un isolement sans précédent des États-Unis dans le monde, au point que le leadership américain, pourtant encore incontestable sur le papier, est désormais largement remis en question par les autres acteurs.

« La politique étrangère de Donald Trump a trouvé son thème : la doctrine du retrait », résumait Richard Haass, directeur du cercle de réflexion Council on Foreign Relations, en octobre dernier. En un an, les États-Unis se sont en effet retirés du traité commercial transpacifique (TTP), de l’accord de Paris sur le climat et de l’Unesco, tout en menaçant de se retirer de l’Alena et de l’accord nucléaire avec l’Iran. Le président américain pouvait difficilement avoir une vision du monde plus opposée que cela à celle de son prédécesseur. Alors que, dans sa gestion des affaires internationales, Barack Obama se distinguait par son esprit méticuleux, son pragmatisme excessif, sa froideur, sa défense du multilatéralisme, son successeur se montre impréparé, imprévisible, coléreux et adepte d’une vision du monde complètement américano-centrée.


(Lire aussi : « Trump se présente comme le seul qui peut sortir les Américains du chaos qu’il a lui-même créé »)


Ni réaliste ni isolationniste
En matière de relations extérieures, il n’y a pas de doctrine Trump. Le président américain n’est ni un réaliste ni un isolationniste, comme il a tendance à être présenté. Il est clairement motivé par une idéologie, même si celle-ci n’est clairement pas structurée, par une vision du monde où tout est défini par les rapports de force. Il se laisse le loisir d’intervenir quand il considère que c’est dans l’intérêt américain, comme il l’a fait en Syrie après l’attaque chimique contre Khan Cheikhoun en avril dernier. Il reste silencieux sur la question des droits de l’homme et cultive même un goût prononcé pour les autocrates. Il n’a de respect que pour l’avis des militaires, alors que le Foggy Bottom est amputé d’une grande partie de ses membres, et semble considérer, à l’inverse de son prédécesseur, chaque « problème comme un clou ».


(Lire aussi : 2017, l'année où Trump a bousculé le monde)


Et c’est au Moyen-Orient que le président américain semble avoir le plus de « problèmes », puisque c’est sans conteste dans cette région qu’il aura été le plus actif durant sa première année de mandat. Sans stratégie lisible, Donald Trump a fait vivre la région au rythme de son imprévisibilité durant toute l’année. En quelques mois, il a décrété le « muslim ban », a réintégré l’Iran dans l’axe du mal depuis Riyad, a soutenu l’Arabie saoudite dans sa mise au ban du Qatar, et surtout a reconnu Jérusalem comme capitale d’Israël.
Pour ceux qui en doutaient encore il y a quelques mois, il est désormais clair que le président américain ne ressemble à aucun de ses prédécesseurs. Sa rencontre avec le reste du monde a été particulièrement brutale. Les Européens sont les plus inquiets. Les Israéliens et les Saoudiens les plus satisfaits. Les Russes et les Chinois les plus aux aguets pour profiter du vide laissé par la première puissance mondiale. Celle-là même qui pourrait bien être la principale perdante de la politique internationale menée par celui qui avait promis, durant sa campagne, de ne défendre que ses propres intérêts.


Lire aussi

Un an de Trump au Moyen-Orient : un éléphant dans un magasin de porcelaine

De la Corée du Nord à l'Iran, un an de politique étrangère de Trump

Trump visé par un déluge de condamnations après ses propos "racistes"

Climat, Unesco, nucléaire iranien, migrations...les symboles du désengagement américain

Sous Trump, l'Amérique d'abord mais de plus en plus seule

La folie du roi Donald

L'abécédaire de Donald Trump, de "Amérique" à "zéro"

L’un des objectifs prioritaires de Trump : la lutte contre l’influence iranienne au M-O, notamment au Liban

Que risque Donald Trump dans l'enquête sur les ingérences russes ?

Les plus optimistes diront que cela aurait pu être pire. Un an après son investiture, le président américain Donald Trump n’a pas autant bouleversé l’échiquier mondial que ses déclarations en tant que candidat le faisaient craindre. Washington est toujours engagé au sein de l’OTAN et a rassuré ses alliés européens et asiatiques quant à ses intentions de pérenniser leur...

commentaires (5)

“America first” est le slogan du KKK...

Gros Gnon

20 h 19, le 21 janvier 2018

Tous les commentaires

Commentaires (5)

  • “America first” est le slogan du KKK...

    Gros Gnon

    20 h 19, le 21 janvier 2018

  • Sa rencontre avec le reste du monde a été particulièrement brutale. Les Européens sont les plus inquiets. Les Israéliens et les Saoudiens les plus satisfaits. Les Russes et les Chinois les plus aux aguets pour profiter du vide laissé par la première puissance mondiale. 2 alliés : nathanyahou et bensaoud Salman 27 déçus/inquiets : l'Europe de Merkel et Macron 2 renards aux aguets : LA RUSSIE DE POUTINE ET LA CHINE DE PING qui profitent de sa NULLITE . Si les non américains pouvaient voter lors des prochaines élections , je VOTERAI POUR CE CLOWN DESEQUILIBRE MENTAL POUR 4 ANS DE PLUS , qu'est ce qu'il nous fait du bien à nous les résistants , en priant Dieu qu'il ne soit pas demis de ses fonctions , par ses propres alliés , justement . DU PAIN BENI .

    FRIK-A-FRAK

    12 h 23, le 20 janvier 2018

  • Bien sûr que nous détestons Trump. Bien sûr que les Européens détestent Trump. Bien sûr que Trump a mille et un défauts. Bien sûr qu’in ne plait pas à la classe libérale américaine et aux gens de la gauche révolue. Trump est à la tête d’une administration qui a mis le peuple américain en premier et non la branche sur laquelle son pays est assis. Les résultats de cette première année sont éclatants (pour les Américains). Mettons en évidence son impact remarquable sur l'économie des Etats Unis, en particulier sur plus de 1,5 million de nouveaux emplois et sur le chômage le plus bas depuis 17 ans que ses politiques ont créé (en un an). Le Dow Jones vole au-dessus des 26.000 marques pour la première fois de l’histoire. Faut-il répéter la célèbre phrase du directeur de la campagne électorale de Bill Clinton, James Carville : « It’s the economy, stupid » qui fut le mantra de la campagne présidentielle de 1992? America First ne signifie point plaire aux Européens, ni aux Iraniens, d’ailleurs, ni malheureusement aux Palestiniens. Cela signifie la déréglementation rapide pour stimuler l'innovation américaine, une solide approche des affaires étrangères et un engagement envers la sécurité militaire et nationale de Etats Unis. Pour tout cela, nous le détestons.

    Aref El Yafi

    11 h 17, le 20 janvier 2018

  • Creuse grandiloquence admirée par les média, reculades en Syrie jamais dénoncées par les mêmes média, traité sur le nucléaire bâclé et resté sans contrepartie, poudre aux yeux élevée au rang de stratégie internationale par la même caste de laudateurs, voilà ce que fut l'ère Obama. Ayant reçu en héritage le chaos signé du même Obama, qu'auriez-vous fait l'année passée, à la place de Trump, cher monsieur Samran? Voilà qui nous intéresserait!

    Emmanuel Pezé

    10 h 29, le 20 janvier 2018

  • GAFFES ! HEBETUDE ! ABRUTISSEMENT ! ENFANTILLAGE ! NULLITÉ !

    LA LIBRE EXPRESSION

    01 h 14, le 20 janvier 2018

Retour en haut