Plus de 400 civils, dont une centaine d'enfants, ont été tués depuis dimanche dans l'enclave rebelle de la Ghouta orientale par les intenses bombardements du régime syrien, qui fait fi des appels internationaux à stopper le bain de sang.
Pour la cinquième journée consécutive, les forces du président Bachar el-Assad ont soumis jeudi à un déluge de feu cette région assiégée située aux portes de Damas, une campagne dévastatrice qui annonce une offensive terrestre pour la reconquérir.
Des ONG, organisations internationales et gouvernements étrangers se sont dites horrifiés par l'ampleur de ces bombardements, d'une rare violence dans un pays pourtant ravagé depuis 2011 par une guerre qui a fait plus de 340.000 morts.
Jeudi à New York, l'ambassadeur russe à l'ONU a annoncé qu'il n'y avait "pas d'accord" entre les 15 membres du Conseil de sécurité sur une résolution réclamant un cessez-le-feu d'un mois dans la Ghouta orientale.
Vassily Nebenzia a aussi dénoncé "les discours catastrophiques" qui, selon lui, ne correspondent pas à la situation sur place.
Les Etats-Unis et la France se sont élevés contre la position russe, l'ambassadeur français François Delattre critiquant "les attaques contre les hôpitaux" et parlant d'une "urgence absolue" sur le terrain.
Moscou, grand allié de Damas, utilise régulièrement son droit de veto pour protéger le régime syrien à l'ONU.
(Reportage : La vie sous terre des habitants de la Ghouta pilonnée)
Dans la Ghouta orientale, où quelque 400.000 habitants tentent de subsister, le coût humain et les destructions sont colossales. Selon l'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH), 416 civils, dont 95 enfants, ont été tués depuis le début dimanche de ces bombardements dévastateurs.
Au moins 59 civils sont morts jeudi dans des raids aériens et des tirs de roquettes visant plusieurs localités, notamment Douma, la grande ville de la Ghouta, où 37 personnes ont péri, selon l'OSDH.
L'Observatoire a affirmé que l'aviation de la Russie, alliée du régime, participait aux raids. Mais par le passé, Moscou avait démenti.
Un correspondant de l'AFP a vu des mares de sang sur la route menant à un hôpital de la ville de Douma. A l'hôpital, des corps enveloppés de linceuls blancs, dont ceux de deux enfants, gisaient au sol.
Dans la localité de Hammouriyé, des habitants se sont pressés devant un magasin pour acheter de la nourriture avant de prendre la fuite quand des obus ont explosé à proximité.
(Lire aussi : Ghouta : voilà à quoi ressemble la « paix de Poutine »)
Sur la scène internationale, les condamnations se sont multipliées, en vain.
Le patron de l'ONU Antonio Guterres a dénoncé un "enfer sur Terre". Le Haut Commissaire de l'ONU aux droits de l'Homme, Zeid Ra'ad Al Hussein, a appelé à "mettre un terme à cette monstrueuse campagne d'annihilation".
Le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) a réclamé un accès à la Ghouta orientale pour porter secours aux blessés, qui meurent selon lui faute de soins immédiats et de matériel médical.
"Le régime prétend viser des groupes armés mais en vérité il ne vise que les civils!", s'est insurgé Ahmed Abdelghani, médecin dans les hôpitaux bombardés de Hammouriyé et Arbine. "C'est un hôpital civil, pourquoi le régime nous vise-t-il?"
Ces trois derniers jours, 13 hôpitaux de la Ghouta orientale où intervient l'ONG Médecins sans frontières ont été touchés, selon l'organisation.
(Repère : Avant la Ghouta, d'autres enclaves assiégées par le régime Assad)
Le régime cherche à reprendre la Ghouta orientale, pour, dit-il, stopper les tirs de roquettes sur Damas. Selon le quotidien syrien Al-Watan, une offensive terrestre "d'envergure peut commencer à tout moment".
Depuis dimanche, 16 personnes ont été tuées à Damas, bastion du régime, par des tirs d'obus et de roquettes des rebelles depuis la Ghouta orientale, selon les médias d'Etat et l'OSDH.
Un enfant a été tué jeudi par un tel tir, selon l'agence officielle Sana.
Le chef de la diplomatie russe Sergueï Lavrov a assuré que Moscou avait proposé aux combattants de la Ghouta orientale d'évacuer le secteur mais que des jihadistes et leurs alliés avaient "catégoriquement rejeté cette proposition".
Depuis le début en 2011 de la guerre en Syrie, plusieurs zones rebelles, comme la vieille ville de Homs en 2012 ou Alep en 2016, ont été écrasées par des bombardements et un siège étouffant pour forcer les combattants antirégime à déposer les armes.
Le conflit en Syrie a d'abord opposé les rebelles au régime puis s'est complexifié avec l'implication de groupes jihadistes et de puissances étrangères.
Avec l'intervention de la Russie en 2015, le régime Assad, qui était en mauvaise posture, a réussi à reprendre le contrôle de plus de la moitié du territoire.
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21 h 54, le 22 février 2018