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Liban - Baabda

Après la tempête, Aoun, Berry et Hariri aplanissent le terrain

En moins d’une heure et demie, les trois pôles du pouvoir sont parvenus, comme par magie, à une série d’accords sur des dossiers cruciaux.

Les trois présidents réunis hier à Baabda. Photo ANI

La réunion de franche explication qui s’est tenue hier à Baabda entre les trois pôles du pouvoir a obtenu « la note de dix sur dix », selon l’évaluation qui en a été faite par le chef du Parlement, Nabih Berry. Un peu comme à L’École des fans de Jacques Martin, où tout le monde gagne, la rencontre entre le chef de l’État, Michel Aoun, le Premier ministre, Saad Hariri, et M. Berry a été « fructueuse » et « positive » pour tous, de l’avis des trois parties qui ont largement affiché leur satisfaction. 

Dans une volonté de consacrer officiellement les décisions prises, les trois hommes les ont consignées dans un communiqué afin de dissiper les doutes sur les termes de l’entente conclue.

Lors de cette rencontre exceptionnelle qui survient après une crise aiguë entre M. Berry et le chef du CPL, Gebran Bassil, occasionnant des dérapages dans la rue, les trois hommes sont convenus, dans un climat qualifié de « serein et franc », de régler leurs différends politiques à travers les institutions constitutionnelles, hypothéquées une fois de plus par les retombées de la crise. Comprendre que le retour à la rue est, pour l’instant, à écarter... Mais aussi, et malgré les dénégations de toutes parts, que le principe de la troïka (l’entente entre les trois présidents en lieu et place de la Constitution) est bel et bien de retour. 

Ainsi, on devrait s’attendre à une reprise incessante des réunions du Conseil des ministres, dès demain jeudi, mais aussi du Parlement, que le chef du législatif avait pris l’habitude d’ouvrir et de fermer un peu à sa guise, dans une démonstration de force contre ses adversaires politiques. Les portes de l’hémicycle seront en tous les cas ouvertes de nouveau pour notamment avaliser l’amendement de l’article 84 de la loi électorale, prévoyant l’adoption de la carte biométrique, une option qui a été finalement écartée pour les législatives de 2018. Contesté par le président de la Chambre, l’amendement était incessamment réclamé par M. Bassil, qui arguait du risque d’un recours en invalidation des élections si l’article n’est pas modifié. 


(Lire aussi : L’entente de Mar Mikhaël, de l’allié fort à la présidence « forte »)


Les droits des officiers préservés

Autre « acquis » majeur au terme de cette rencontre, un accord en bonne et due forme autour du célèbre décret d’ancienneté accordant une année d’avancement aux officiers de la promotion 1994, « les droits de ces officiers devant être préservés comme le souhaite le commandement de l’armée », confie une source ministérielle proche de Baabda. Si le mécanisme juridico-constitutionnel à mettre en place n’est pas encore tout à fait au point, le principe de combiner les deux décrets d’ancienneté et celui des promotions (placé dans les tiroirs du ministre des Finances, Ali Hassan Khalil, proche de M. Berry) est acquis. 

Cette affaire avait envenimé des semaines durant la relation entre le président et le chef du législatif, dans une querelle qui est venue s’ajouter à un contentieux de longue date qui oppose MM. Berry et Aoun depuis pratiquement l’élection de ce dernier à la présidence.

Le 10 janvier dernier, M. Berry avait pourtant affirmé qu’il n’avait « plus rien à offrir sur la question du décret », laissant entendre qu’il ne pouvait faire de concessions supplémentaires dans ce dossier. Le chef de l’État considérait que ce décret, adopté en Conseil des ministres puis signé par lui-même, par le Premier ministre Saad Hariri et par le ministre de la Défense Yaacoub Sarraf, ne requiert pas la signature du ministre des Finances, alors que M. Berry soutenait l’inverse.

C’est pour dire le pas de géant effectué hier à ce niveau d’autant que cette controverse a également provoqué une brouille entre MM. Berry et M. Hariri, accusé d’avoir pris parti avec le chef de l’État. 

Mais ce n’était pas le seul acquis de la rencontre tripartite. Les trois hommes qui ont en quelque sorte dressé une feuille de route pour les semaines, voire les mois à venir sont également convenus du vote du budget de 2018, devenu incontournable pour que le gouvernement puisse mettre un terme à la pratique inconstitutionnelle des dépenses effectuées sur la base du douzième provisoire, auquel l’exécutif aura d’ailleurs encore recours lors de sa prochaine réunion, jusqu’à ce que la nouvelle loi de finances soit adoptée. Une pratique critiquée hier par Ghassan Moukheiber, député du Metn (bloc du Changement et de la Réforme), qui a mis en garde contre les abus et les détournements de fonds, « surtout que nous sommes à la veille des législatives ». 

 « Il a été décidé d’accélérer le pas pour pouvoir adopter le budget avant les élections », affirme la source ministérielle proche de Baabda, qui dément toutefois l’hypothèse de son adoption en vue de la tenue de la conférence internationale du Cèdre (I) à Paris. Celle-ci est destinée à redresser la situation économique au Liban par le biais d’une levée de fonds pour le financement d’un large programme de modernisation des infrastructures libanaises. 


(Lire aussi : La rencontre de Baabda : pour faire face à Israël... et rendormir les vieux démons de la guerre civile)


Offensive diplomatique

Placée à la tête de l’ordre du jour, la question des menaces israéliennes contre la souveraineté du Liban, qui avait constitué le prétexte idéal pour la tenue de cette réunion, a été abordée en profondeur, les trois hommes ayant décidé de passer à l’offensive diplomatique contre Israël, pour, d’une part, contrer la décision de la construction d’un mur en béton sur la ligne bleue, et, d’autre part, réfuter les prétentions de l’État hébreu en matière d’hydrocarbures offshore. Le ministre israélien de la Défense, Avigdor Lieberman, avait considéré l’exploitation par le Liban des ressources offshore dans le bloc 9 comme une « provocation ». Sur ces points qui seront d’ailleurs évoqués plus en détail aujourd’hui lors de la réunion du Conseil supérieur de la défense, il a été convenu de « recourir aux moyens diplomatiques et de faire appel à la médiation de l’ONU et des États-Unis, par le biais du secrétaire d’État adjoint américain à l’Énergie, Amos Hochstein, pour trancher ces questions », confie une source ministérielle proche de Baabda, qui fait état de « contacts en cours avec les Américains à ce propos ». 

Bref, ce sont autant de « signes positifs et d’acquis qui restent toutefois à mettre à l’épreuve », dira une source proche du 8 Mars, qui redoute les obstacles qui risquent de survenir « dès lors que l’on planchera sur les détails ». « Je crains fort que les vieilles inimitiés ne ressurgissent autour des appels d’offres, notamment dans le secteur de l’électricité. »



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La réunion de franche explication qui s’est tenue hier à Baabda entre les trois pôles du pouvoir a obtenu « la note de dix sur dix », selon l’évaluation qui en a été faite par le chef du Parlement, Nabih Berry. Un peu comme à L’École des fans de Jacques Martin, où tout le monde gagne, la rencontre entre le chef de l’État, Michel Aoun, le Premier ministre, Saad Hariri, et M....

commentaires (8)

Si le mécanisme juridico-constitutionnel à mettre en place n’est pas encore tout à fait au point, le principe de combiner les deux décrets d’ancienneté et celui des promotions (placé dans les tiroirs du ministre des Finances, Ali Hassan Khalil, proche de M. Berry) est acquis. CAD LE MINISTRE DES FINANCES DOIT SIGNER LE DECRET Ne nous racontez plus n'importe quoi: NOTRE PRESIDENT AOUN A PERDU NOTRE PRESIDENT DE LA CHAMBRE BERRY A GAGNE CAD la force de la rue a gagne une fois de plus a l'ombre de HB et dire que la plus part serons reelu

LA VERITE

15 h 46, le 07 février 2018

Tous les commentaires

Commentaires (8)

  • Si le mécanisme juridico-constitutionnel à mettre en place n’est pas encore tout à fait au point, le principe de combiner les deux décrets d’ancienneté et celui des promotions (placé dans les tiroirs du ministre des Finances, Ali Hassan Khalil, proche de M. Berry) est acquis. CAD LE MINISTRE DES FINANCES DOIT SIGNER LE DECRET Ne nous racontez plus n'importe quoi: NOTRE PRESIDENT AOUN A PERDU NOTRE PRESIDENT DE LA CHAMBRE BERRY A GAGNE CAD la force de la rue a gagne une fois de plus a l'ombre de HB et dire que la plus part serons reelu

    LA VERITE

    15 h 46, le 07 février 2018

  • "les moyens de sa politique et la protection venant de Téhéran"... NON MERCI NOUS LIBANAIS N'EN VOULONS PAS nous avons déjà assez payé en vies et destructions, cela suffit maintenant ! Irène Saïd

    Irene Said

    12 h 32, le 07 février 2018

  • J'ai bien compris, si la loi de la carte biométrique n'est pas appliquée, Gébran Bassil, toujours lui, menace en invalidation des élections sauf s'il serait élu à Batroun. Nabih Berry et Saad Hariri l'ont-ils compris ?

    Un Libanais

    12 h 21, le 07 février 2018

  • Sous l'ombrelle fraîche et combien bienfaitrice de la résistance du hezb libanais . Veuillez lire la déclaration du chef H.N et vous comprendrez que c'est si bon de se sentir protégé quand on a les moyens de SA POLITIQUE.

    FRIK-A-FRAK

    11 h 35, le 07 février 2018

  • Donc il a fallu que l'Israëlien Avigdor Lieberman brandisse son épouvantail pour que nos 3 super-responsables réalisent brusquement qu'ils appartiennent à la même nation libanaise ? Le miracle...quoi ! Et si à chaque fois que nos super-responsables se querellent pour leurs éternelles gamineries...on allait discrètement demander à A. Lieberman de sortir un de ses épouvantails diablement efficaces ??? Irène Saïd

    Irene Said

    10 h 48, le 07 février 2018

  • AH si seulement, si seulement on pouvait etre HONORES d'une franchise quelconque de leur part ! une tte petite suffirait pour commencer. parce que leur "honneur", leur "fierte", leur dignite ,leur "ego" ne sont EN RIEN plus essentiels que les notres ! C tout le contraire je dirai, vu qu'ils sont supposes TRAVAILLER pour NOUS ! nous donner donc PRIORITE !

    Gaby SIOUFI

    10 h 36, le 07 février 2018

  • Ils ont partagé le budget de l'état entre eux ainsi que les revenus hypothétiques du gaz et du pétrole que le Liban ne verra jamais ou si tard qu'il n'en profitera pas. Le comble c'est que le peuple les éliront a nouveau...

    Pierre Hadjigeorgiou

    09 h 15, le 07 février 2018

  • AU LIEU DE BULLDOZERS... DES COMPROMIS !

    LA LIBRE EXPRESSION

    07 h 39, le 07 février 2018

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