Le Hezbollah refuse d’intercéder dans la crise qui oppose Nabih Berry à Gebran Bassil. Ali Hashisho/Reuters
L’appel au calme lancé hier par le chef de l’État, Michel Aoun, après les dérapages provoqués par les propos « humiliants » tenus à l’encontre du chef du Parlement, Nabih Berry, par le ministre des Affaires étrangères et chef du Courant patriotique libre, Gebran Bassil, ne serait pas suffisant pour calmer le jeu. Il en faudra bien plus, si l’on en croit les milieux du Hezbollah, où l’on perçoit une certaine « inquiétude » par rapport aux derniers développements.
Le chef du Courant patriotique libre avait qualifié, il y a deux jours, le chef du législatif de « baltaji » (voyou), lors d’une réunion partisane dans la région de Mehmarch (Batroun). Le président Aoun est sorti hier de son silence, appelant au calme et à « la tolérance », au lendemain de la vague de colère des partisans du mouvement Amal. Parallèlement, le bloc aouniste s’est dit d’accord pour la « tolérance », tout en refusant de présenter des excuses.
Pris entre deux feux, le Hezbollah, un allié commun aux deux parties qui est souvent intervenu pour effectuer des médiations dès que la situation se dégradait entre elles, « n’interviendra pas cette fois-ci », indique à L’OLJ un responsable au sein du parti. « Cette affaire a dérapé et ne peut plus être traitée en politique. C’est devenu une question personnelle entre deux hommes (MM. Bassil et Berry) », poursuit-il, avant de préciser que le Hezbollah a décidé, pour l’instant, de garder ses distances et d’observer les développements. « Les choses ne vont pas dans la bonne direction. La situation n’est pas saine », ajoute-t-il néanmoins.
C’est l’une des rares fois où le parti chiite affiche son refus d’intercéder, la situation étant particulièrement délicate sur le double plan politique et confessionnel.
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« Stratégie »
Lundi, le parti chiite avait « catégoriquement rejeté toute atteinte au président de la Chambre, aussi bien dans la forme que dans le fond, quels qu’en soient les auteurs ». Dans les milieux du Hezbollah, on se défend d’avoir cherché, à travers cette position, à prendre parti pour un camp contre un autre.
« Nous ne fonctionnons pas en termes de parti pris », commente une source du Hezbollah, qui se demande d’ailleurs pourquoi on n’a pas établi les mêmes conclusions concernant tous ceux qui ont exprimé une « position similaire à la nôtre pour dénoncer ce genre de propos. Et ils sont nombreux », allusion faite à plusieurs responsables politiques qui ont critiqué les propos de M. Bassil.
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Pour le Hezbollah, les prises de position exprimées par le parti relèvent de la « stratégie ». « Avons-nous oublié que le Hezbollah a soutenu M. Aoun et voté en sa faveur, alors que Nabih Berry était contre ? Peut-on dire pour autant que le parti était en faveur de M. Aoun contre M. Berry ? » s’interroge la source. Et de réitérer que quel que soit le point de vue de M. Bassil, « qu’il soit justifié en politique ou non », le langage utilisé à l’égard de M. Berry « n’est pas acceptable ».
Interrogé sur la position du Hezbollah relative au congrès de la LDE (Lebanese Diaspora Energy), prévu les 2 et 3 février à Abidjan, et qui a été la goutte qui a fait déborder le vase, de nombreux partisans et sympathisants chiites en Côte d’Ivoire s’apprêtant à boycotter cet événement parrainé par M. Bassil, la source affirme : « Cela fait partie du jeu politique. C’est de bonne guerre. Mais ce jeu n’est en aucun point comparable à la réaction de M. Bassil. »
À ce propos, un responsable du 8 Mars affirme regretter que le chef de l’État n’ait pas passé un coup de fil à M. Berry pour, au moins, se démarquer des propos de M. Bassil considérés comme « humiliants », et lui signifier qu’« il ne les avalise pas ». « En tant qu’arbitre suprême qui doit se placer au-dessus de la mêlée, le président doit se distinguer des positions exprimées ici et là », conclut le responsable.
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22 h 01, le 31 janvier 2018