L'armée d'élite du pouvoir en Iran a proclamé mercredi la fin du mouvement de contestation qui a fait 21 morts et entraîné des centaines d'arrestations, dans la foulée de manifestations massives de soutien au régime.
Seules quelques petites protestations sporadiques en province ont eu lieu dans la nuit de mardi à mercredi, selon des vidéos diffusées sur les réseaux sociaux et impossibles à vérifier, contrastant avec les précédentes nuits de contestation contre l'austérité économique et le pouvoir.
Les troubles, partis le 28 décembre de la deuxième ville d'Iran Machhad avant de se propager, ont été marqués par des violences et des attaques contre des biens publics, pouvoir ou médias mettant en cause des "contre-révolutionnaires" basés à l'étranger, mais aussi les Etats-Unis et l'Arabie saoudite, rivale de l'Iran au Moyen-Orient.
Après le soutien apporté par le président Donald Trump aux protestations et sa condamnation du pouvoir iranien, les Etats-Unis envisagent de nouvelles sanctions contre des représentants du régime, selon un haut responsable américain.
Les autorités iraniennes ont cherché à minimiser le mouvement de contestation, le premier de cette ampleur depuis celui de 2009 contre la réélection du président ultraconservateur Mahmoud Ahmadinejad, qui avait été violemment réprimé.
"Aujourd'hui nous pouvons annoncer la fin de la sédition", a déclaré le chef des Gardiens de la révolution, Mohammad Ali Jafari, en soutenant que le nombre de manifestants antirégime n'avait "pas dépassé les 15.000 sur l'ensemble du pays".
"Un grand nombre de fauteurs de troubles, au centre de la sédition, ont reçu une formation de la contre-révolution", a-t-il dit en référence aux Moudjahidine du peuple, principale formation de l'opposition en exil. Ceux-ci "ont été arrêtés et il y aura une action ferme contre eux".
(Lire aussi : Canicule printanière, l'éditorial de Issa Goraieb)
Mobilisation massive prorégime
Le général Jafari a également fait valoir que des milliers de personnes avaient été "entraînés" par les Etats-Unis pour "fomenter des troubles en Iran".
Le numéro un iranien, l'ayatollah Ali Khamenei a lui accusé les "ennemis" de l'Iran de porter atteinte au régime, sans les nommer, alors que le président Hassan Rohani a lui parlé d'une "petite minorité" de contestataires.
M. Rohani a en outre demandé à son homologue français Emmanuel Macron de prendre des mesures contre les activités des Moudjahidine, basés en France, selon la TV d'Etat.
La classe politique en Iran -réformateurs comme conservateurs- s'est positionnée contre les violences lors des manifestations, tout en soulignant la nécessité de trouver une solution aux problèmes économiques, principalement le chômage qui atteint 30% chez les jeunes.
Mercredi lors d'une massive mobilisation prorégime, des dizaines de milliers de personnes ont manifesté à travers le pays pour apporter leur soutien aux leaders religieux.
Munis de banderoles dénonçant les "fauteurs de troubles", les manifestants ont repris des slogans en faveur du guide suprême, l'ayatollah Ali Khamenei, et crié "Mort à l'Amérique" ou "Mort à Israël".
La télévision d'Etat a montré des images en direct de manifestations massives. "Nous offrons à notre guide le sang qui coule dans nos veines", ont scandé les participants.
D'autres manifestations pro-régime sont prévues jeudi à Ispahan et Machhad.
(Lire aussi : L’interventionnisme iranien dans la ligne de mire des manifestants)
Possibles sanctions américaines
La nuit de mardi à mercredi a été relativement calme à Téhéran, qui avait connu de petites manifestations les trois nuits précédentes. Le déploiement policier était aussi moins visible.
Aucune manifestation antirégime n'a en outre été rapportée durant la journée de mercredi. Les autorités ont bloqué sur les téléphones portables les réseaux sociaux Telegram et Instagram, utilisés selon elles pour appeler à protester.
Durant les importantes protestations de jeudi à lundi soir, 21 personnes ont péri -en majorité des manifestants- et des centaines ont été arrêtées, dont 450 à Téhéran.
A Téhéran, beaucoup d'habitants interrogés par l'AFP ont dit comprendre les motifs socio-économiques des protestations mais ont dénoncé les violences et les critiques américaines.
Depuis le début de la contestation, M. Trump a pris fait et cause pour les protestataires et a condamné le régime. L'ambassadrice américaine à l'ONU, Nikki Haley, a demandé des réunions d'urgence du Conseil de sécurité et de celui des droits de l'Homme sur l'Iran.
Et un haut responsable de l'administration américaine a affirmé que "toutes les possibilités étaient examinées" concernant des sanctions américaines contre des organisations et des personnes en Iran susceptibles d'être visées pour des "infractions" aux droits de l'Homme, des actes de censure ou l'entrave à la liberté de rassemblement.
Contrastant avec la position américaine, les pays européens ont réagi avec prudence aux protestations, exprimant leur "préoccupation" et appelant au "dialogue". Le patron de l'ONU Antonio Guterres a lui appelé à "éviter la violence" et au calme pendant les manifestations.
Sur le même sujet
Rohani le « modéré » marche sur des œufs
Six journées de colère iranienne
"La vie est vraiment dure", confient des Téhéranais
Netanyahu souhaite "bonne chance au peuple iranien dans sa noble quête de liberté"
En Iran, "le début d'un grand mouvement", selon Shirin Ebadi
Pour mémoire
Rohani espère une forte croissance économique en 2018/2019
Seules quelques petites protestations sporadiques en province ont eu lieu dans la nuit de mardi à mercredi, selon des vidéos diffusées sur les réseaux sociaux et...
commentaires (6)
On dirait que le régime iranien veut prouvez à ceux qui ont voter au progressiste Rouhani qu'ils ont voter pour le mauvais choix... On dirait que tout ceci est plus la façon ou ce type de régime signifie aux électeurs de "mieux" choisir la prochaine fois tout en signifiant la porte au président...
Wlek Sanferlou
13 h 23, le 04 janvier 2018