Il y a de la lumière dans les yeux de Kim Issa. Il y a aussi de la lumière dans ses mots. Et tout à coup, on a juste envie de la suivre. Dans ses nombreux projets, mais aussi dans ce salutaire message d'espoir qu'elle véhicule et qui est tellement nécessaire aujourd'hui. La jeune femme de 32 ans est pleine de l'assurance de ceux qui savent qu'ils empruntent le bon chemin. Un chemin tracé par son père, Pierre Issa, infatigable entrepreneur social, qui a su faire d'arcenciel un vivier de bonnes idées et un tremplin formidable pour aider, innover, créer des emplois, aller de l'avant bien plus vite que le marasme dans lequel est plongé le pays. Arcenciel a trente ans, presque l'âge de Kim Issa qui, après quelques années de travail en Suisse et un MBA à Columbia à New York, décide de revenir dans son pays prendre, il y a de cela trois ans, le relais de cette énorme organisation alors en pleine restructuration. Il s'agit de transformer la structure pyramidale en une entreprise sociale autosuffisante et autonome où des experts dans différents domaines travaillent en toute intelligence. Et le challenge est de taille. Et le challenge est réussi.
Avec plus de 500 employés aujourd'hui, dont 80 % souffrant de handicaps mentaux, physiques ou sociaux, et plusieurs missions dont le recyclage, l'agriculture raisonnée et l'aide à la mobilité, arcenciel est une véritable planète qui aide des milliers de personnes. Sans oublier l'infrastructure, les études, la disponibilité et les conseils que prodigue cette ONG aujourd'hui à des dizaines de jeunes qui ont envie de s'investir dans des solutions à long terme pour résoudre les nombreux problèmes du pays. Car oui problèmes il y a, oui l'État ne subvient pas aux besoins de la population, mais oui les jeunes Libanais ont de brillantes idées qui ne demandent qu'à être concrétisées. À l'instar des start-up qui ont envahi le paysage professionnel, les entreprises à but social sont l'avenir du Liban. Et le terreau est là.
Kim Issa, qui enseigne à la LAU la stratégie business pour créer sa propre entreprise à des jeunes de 20 ans, parle de leur motivation profonde à faire bouger les choses. Cette génération de millenials a des idées plein la tête et surtout une certaine idée d'un Liban où l'éveil a sonné dans la société civile. Le Liban est le pays qui a le plus d'ONG per capita au monde. Et c'est énorme vu les difficultés administratives, sécuritaires et financières auxquelles fait face le pays. Oui il ne fait aucun doute que nous sommes plus conscients de l'urgence, bien sûr aussi que nous sommes bien plus éveillés aux problèmes du jour. Et pour Kim Issa ce qu'on n'aura jamais le droit de dire ou de penser, c'est que les Libanais n'ont pas envie d'avancer. Le recyclage est devenu une idée ancrée chez beaucoup de personnes. Et ce sont plus de mille tonnes par an déposés dans ses centres qu'arcenciel trie chaque année. L'écologie n'est plus une notion hippie mais un véritable art de vivre et la défense de l'environnement un must. Le dynamisme, l'énergie et l'optimisme de Kim Issa se nourrissent de ces jeunes qu'elle côtoie, de sa génération de trentenaires qui décident de rentrer au pays s'y établir et créer des emplois, de ses aînés qui partagent leur expérience, de ces nombreuses initiatives qu'elle aide à mettre en place, de ce formidable sursaut d'une société civile combative, de ce peuple libanais qui ne demande qu'à bouger dans le bon sens et de tous ces défis qui ne demandent qu'à être relevés dans un pays où, pour la jeune femme, il fait si bon vivre malgré tout. Entendre cela fait un bien fou.
*Positive Lebanon est un concept basé sur les initiatives concrètes de la société civile libanaise. Ces initiatives qui font que le pays tient encore debout. Mais derrière chaque initiative se tient une Libanaise ou un Libanais courageux, innovant, optimiste et plein d'amour pour son pays. (voir ici)
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