La deuxième phase du cessez-le-feu conclu la semaine dernière entre le Hezbollah et le Front Fateh al-Cham, après l'intense bataille dans le jurd de Ersal, est entrée en vigueur hier.
Cette nouvelle phase de l'accord conclu sous la supervision du directeur général de la Sûreté générale, Abbas Ibrahim, stipule la libération de huit membres du Hezbollah capturés par les jihadistes syriens de Fateh al-Cham. Parallèlement, des combattants de ce groupuscule seront transférés vers Idleb, au nord de la Syrie, ainsi que des civils qui désirent les accompagner.
Mais au vu de l'immense effectif des civils désireux de rentrer en Syrie (près de 10 000), l'exécution de l'accord a été ajournée à ce matin, « pour des raisons logistiques », selon des sources bien informées.
Des sources au sein du parti chiite expliquent dans ce cadre à L'Orient-Le Jour que seuls « quelques détails techniques » entravent encore la mise à exécution de l'accord, d'autant qu'il est très difficile de transporter près de 10 000 personnes en Syrie, note-t-on de même source, avant de faire valoir que les routes que devraient emprunter les bus chargés de l'opération sont tortueuses et difficilement praticables, d'où la décision de reporter l'opération.
Dans les mêmes milieux, on souligne que 100 bus sont venus de Syrie pour participer à l'opération d'évacuation des jihadistes de Fateh al-Cham. Une source bien informée affirme toutefois à L'OLJ que le retard est dû à une demande formulée par le régime syrien d'inspecter les bus transportant les jihadistes. Une proposition naturellement refusée catégoriquement par ces derniers, qui réclameraient comme garantie la protection par le Hezbollah du convoi sur l'ensemble du parcours jusqu'à Idleb.
Mais durant la journée d'hier, à Ersal, tout prêtait à croire que la deuxième phase de l'accord de cessez-le feu sera exécutée sans retard. Selon l'agence d'information al-Markaziya, cette localité de la zone frontalière libano-syrienne était le théâtre de mesures logistiques et militaires prises par l'armée libanaise avant l'opération d'évacuation. À son tour, le Hezbollah a pris certaines mesures logistiques visant à faciliter la mise en application de l'accord.
Interrogé par L'OLJ, Bassel Houjeiri, président du conseil municipal de Ersal, note que « la journée d'aujourd'hui (hier) était celle des derniers préparatifs » avant l'opération d'échange. M. Houjeiri ne cache pas, par ailleurs, l'anxiété que vit Ersal avant l'opération. Celle-ci « signifierait la fin de la présence des terroristes dans cette zone », indique-t-il.
Selon des milieux proches de l'opération, l'évacuation ne touchera pas qu'Abou Malek el-Tallé et ses hommes. Moustapha Houjeiri, alias « Abou Taqié », se trouverait également au nombre des personnes qui quitteront le territoire libanais à destination d'Idleb. Une mesure qui pourrait contribuer à faire baisser la tension entre Laboué et Ersal, en vue d'une réconciliation.
Selon notre correspondante Hoda Chédid, un autre groupe constitué de 4 000 à 5 000 personnes, connu sous le nom de « Saraya Ahl el-Cham », quitterait le Liban à destination du Qalamoun-Ouest sitôt achevée l'évacuation de Fateh al-Cham, et sur base d'un accord avec le Hezbollah supervisé par le directeur de la SG, Abbas Ibrahim.
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Qaa et Ras-Baalbeck
En attendant l'application de l'accord dans sa deuxième étape, les regards restent braqués sur le jurd de Qaa et Ras-Baalbeck (deux villages frontaliers chrétiens) où d'aucuns s'attendent à une bataille qui devrait opposer l'institution militaire libanaise au groupe État islamique (EI). D'autant que des avions Cessna de l'armée ont bombardé hier des positions de l'État islamique dans le jurd de Qaa et Ras-Baalbeck.
Mais à ce stade, un expert militaire interrogé par L'OLJ souligne qu' « il n'est pas sûr qu'une bataille se déroulera dans ces deux localités, dans la mesure où cette décision relève principalement du commandement de l'armée, mais aussi et surtout du Conseil des ministres ».
Il fait savoir toutefois que « la troupe, menée par ses meilleurs officiers, commence déjà à préparer la bataille contre l'EI », notant que « cela fait partie de sa mission consistant en la protection du territoire libanais, en vue d'empêcher les terroristes de s'y infiltrer. Un devoir qu'elle accomplit à la perfection depuis des années ».
Expliquant le rapport de forces sur le terrain, cet expert est confiant en la victoire de l'armée. Il en veut pour preuve le fait que celle-ci a vaincu le terrorisme à Nahr el-Bared en 2007 et a empêché les derniers combats d'atteindre le village de Ersal. « L'institution militaire libanaise est puissante et dotée d'un arsenal qui lui permettrait d'affronter l'EI », ajoute-t-il, notant toutefois que « l'éventuelle bataille du jurd de Ras-Baalbeck sera longue et limitée au territoire libanais ».
(Lire aussi : Le débat sur la stratégie de défense de retour en Conseil des ministres)
Le mutisme « honteux » de l'État
Sur le plan politique, et si le Hezbollah est rassuré quant aux réactions qu'a suscitées son action dans le jurd de Ersal, certains pointent ouvertement un doigt accusateur en direction de l'État, en particulier son chef, Michel Aoun, et le Premier ministre, Saad Hariri. « Le mutisme officiel généralisé est honteux et humiliant », s'alarme l'expert militaire qui déclare sans détour qu'il est tout aussi honteux de voir l'État libanais se transformer en un médiateur entre deux groupes armés non gouvernementaux (Fateh al-Cham et le Hezbollah). »
Mais Saad Hariri n'a pas tardé à répondre à ces violentes critiques. S'exprimant à l'issue d'un entretien avec M. Aoun, il a assuré que « l'armée bénéficie d'une couverture politique totale », se disant confiant que l'armée gagnera ses batailles.
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Toute cette mascarade au sujet de la liberation de Ersal! Un scenario a la hollywood, pour deloger 2 peles et 3 tondus... et sur base d'un accord... Quelle rigolade!
15 h 58, le 01 août 2017