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Économie - Focus

Électricité : l’été sera-t-il plus clément pour les Libanais ?

Si EDL affirme que sa production n'a jamais été aussi élevée, les pannes liées à la surcharge du réseau empêchent encore certains usagers d'en profiter.

Les pannes liées aux failles du réseau persistent malgré la hausse de la production, comme à Zouk Mosbeh, où se situe une des centrales d’EDL. P.H.B.

Chaque été, les Libanais doivent composer avec la multiplication des pannes de courant – qui font déjà partie intégrante de leur quotidien le reste de l'année. Un scénario récurrent qui est principalement lié à l'augmentation du déficit de production d'Electricité du Liban (EDL) pendant cette période avec l'arrivée des touristes et des membres de la diaspora.
La donne pourrait toutefois changer cet été, à en croire le fournisseur d'électricité, qui a annoncé hier dans un communiqué que ses capacités de production avaient « dépassé 2 200 mégawatts (MW) » contre un maximum de 1 700 MW un an plus tôt. « C'est une première pour le Liban », s'est même réjoui la direction d'EDL.

 

Plus d'heures de courant
Si cette hausse ne suffit pas encore à combler une demande qui gravite autour de 3 300 MW pendant la période estivale – contre environ 2 700 MW le reste de l'année –, elle doit permettre au fournisseur de limiter le rationnement pour plus de 1,4 million d'abonnés. Le fournisseur précise en effet que ces nouvelles capacités vont lui permettre d'assurer « 21 heures de courant par jour à Beyrouth et entre 15 et 18 heures dans le reste du pays pendant tout l'été. ». En 2016, EDL n'avait été en mesure de fournir que 19,5 heures de courant dans la capitale et un peu plus de 12 heures de courant en moyenne dans le reste du pays entre juillet et août, selon le ministère de l'Énergie et de l'Eau. Des niveaux équivalents à ceux de 2015, qui avaient été marqués par d'importantes défaillances sur le réseau de distribution, tandis que la demande est restée à peu près stable d'une année sur l'autre.

Contactée par L'Orient-Le Jour, la direction d'EDL lie cette hausse de la production à trois mesures, en commençant par l'exploitation des deux nouveaux moteurs inversés dans les centrales de Zouk et Jiyeh, produisant « un total de 276 MW, soit trois heures de courant de plus ». Pour rappel, la construction et l'installation de ces unités de production avaient été confiées en 2013 à la société danoise BWSC pour 348 millions de dollars, mais leur mise en service avait été retardée à plusieurs reprises jusqu'en 2017.
EDL affirme en outre avoir lancé « plusieurs chantiers de maintenance dans toutes les centrales et sur les postes à haute tension » afin d'augmenter leur rendement et de limiter la surcharge sur le réseau – sans préciser dans quelles proportions. Enfin, le fournisseur a indiqué qu'une partie du courant supplémentaire était importée de Syrie dans le cadre d'un accord en vigueur entre les deux pays depuis 1995. « Cet accord est en principe renouvelé chaque année. Mais la Syrie ne produisait pas assez d'électricité depuis le début du conflit 2011 pour en vendre au Liban », résume une source à la direction d'EDL, affirmant cependant que « les importations de courant ont repris ».

Pour rappel, dans son « plan de sauvetage » du secteur de l'électricité adopté le 28 mars par le Conseil des ministres, le ministère de l'Énergie prévoyait notamment de louer plusieurs navires-centrales supplémentaires pour déployer entre 800 et 1 000 MW dès cet été. Contesté par une partie du gouvernement qui lui a notamment reproché son coût – plus de 4 milliards de dollars sur 5 ans –, le lancement de ce projet a finalement été retardé et son dossier transmis à la direction des adjudications, qui doit se prononcer sur l'appel d'offres lancé par le ministère.

 

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Baisse de tension
Il reste que l'augmentation de la production ne suffit pas à elle seule à améliorer le quotidien des Libanais qui restent confrontés à des coupures de courant en dehors des heures de rationnement. Début juillet, les premières vagues de chaleur ont en effet coïncidé avec une succession de pannes dans plusieurs quartiers de Beyrouth et régions du Mont-Liban. À Zouk Mosbeh, localité qui accueille le site d'une des plus importantes centrales thermiques du pays – avec une capacité de 607 MW –, les habitants doivent parfois supporter un va-et-vient du courant qui fatigue aussi bien leurs appareils électriques que les générateurs privés de quartier auxquels ils se branchent pendant les heures de rationnement. « Et quand il n'y a pas de panne, le courant n'est pas stable et les baisses de tensions sont fréquentes », se plaint une habitante, sous couvert d'anonymat. « La situation est pire dans certaines zones reculées de la Békaa ou du Akkar », soutient-elle, évoquant « des témoignages de proches ».

Des critiques anticipées par EDL, qui s'est défendue en montrant notamment du doigt « la consommation des réfugiés syriens qui absorbent 486 MW du total de la production », citant un rapport commandé par le ministère de l'Énergie et le Programme des Nations unies pour le développement (PNUD) et publié en février. Le fournisseur a également alerté les usagers contre les « vols d'électricité », agitant la menace de poursuites judiciaires.

 

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Si tous ces facteurs pèsent effectivement de façon significative sur le réseau, l'essentiel des coupures que subissent les usagers d'EDL sont provoquées par des failles sur le réseau de distribution, dont les travaux de réhabilitation et de modernisation progressent de façon inégale d'une région à l'autre. Pour rappel, ces opérations sont assurées depuis 2012 par trois prestataires de services privés – National Electricity Utility Company (sud du Mont-Liban et Liban-Sud ; BUS (nord du Mont-Liban et Liban-Nord) ; et KVA (Beyrouth et Békaa). Plusieurs sources avaient souligné à L'Orient-Le Jour les disparités entre l'avancée des travaux d'un prestataire à un autre, alors que le renouvellement de leur partenariat doit encore être approuvé par le Conseil des ministres. Mais pour la direction de BUS, qui affirme avoir atteint l'essentiel de ses objectifs, « certaines municipalités sont responsables du retard accumulé, car elles refusent de donner les autorisations nécessaires aux prestataires sans réclamer une contrepartie pour ses habitants. » Un « chantage à l'électricité 24 heures sur 24 » dénoncé par la direction de BUS qui prévient « qu'il y aura toujours beaucoup de pannes tant que le réseau n'est pas complètement réhabilité, même si EDL parvient à produire assez d'électricité pour tout le pays ».

 

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