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Culture - Portrait

Ibrahim Maalouf, au cœur de l’antistar

Le trompettiste était au Liban il y a quelques jours pour préparer son concert événement de cet été au Festival international de Baalbeck*. L'occasion de revenir sur son rapport avec son pays natal et sa volonté de le conquérir artistiquement.

Photo Lucile Wassermann.

Cela fait maintenant quelques années qu'Ibrahim Maalouf inclut systématiquement une date libanaise à son agenda de tournée. Que ça soit au Festival de Byblos avec Mulatu Astatke ou à celui de Baalbeck, en exil au Casino du Liban, ou prochainement dans le cadre exceptionnel de ses temples, pour un spectacle qui s'annonce d'ores et déjà comme l'événement culturel de l'été 2017.

Ibrahim Maalouf a déjà conquis la France ; il y a marqué l'industrie musicale à coups de records et d'événements inédits. En remplissant aussi bien le Zénith de Paris que le Palais Omnisports de Bercy (l'Accor Aréna, désormais, qui contient 20 000 places), en remportant des Victoires de la musique dans les catégories d'album de musiques traditionnelles ou pour sa tournée Red and Black Light, et enfin en remportant cette année le césar de la meilleure musique originale. Toutes ces distinctions et ces records, Maalouf les doit à son talent et son travail. Car depuis qu'il a commencé à jouer de la trompette à l'âge de 7 ans et demi, il n'a eu de cesse de gravir les échelons, de remporter les concours les plus difficiles et de mettre en pratique sa maîtrise parfaite de l'instrument. N'ayant pas peur de jouer un style, le jazz, considéré comme élitiste, il mettra tout en œuvre pour élargir son public et réaliser ses rêves. Auteur de 10 albums remarqués depuis 2006 et le début officiel de sa carrière à 26 ans, il est l'auteur de plus de 10 musiques de films, alternant longs et courts métrages, et a développé ses collaborations avec des dizaines d'artistes aux horizons très différents. C'est d'ailleurs ce dernier point qui va l'aider à plonger dans la célébrité et le succès, car en ouvrant son art à d'autres influences, il s'ouvre également des portes vers d'autres publics, De Vincent Delerm à Ismael Lo, de M à Natacha Atlas, Maalouf ne se fixe aucune limite, décrétant que la curiosité est une qualité nécessaire dans la pratique de son art et la réalisation de ses ambitions.

« Enfant du dehors »
Mais tout artiste comblé cherche toujours des manques. Et le grand manque d'Ibrahim Maalouf lui vient de sa relation avec le Liban. Il a grandi en France, loin de son pays d'origine, mais ses parents, intellectuels et artistes, élèvent leurs enfants dans le respect du pays du Cèdre, dans le souvenir du Liban, faisant de leur appartement parisien une zone libanaise, où l'on parle d'abord arabe. Le contact ne sera donc jamais perdu entre les deux patries, et Ibrahim Maalouf grandira dans l'amour de ses deux pays. Son succès se forgera en France, et le Liban restera un peu à la traîne, suivant de loin la carrière pourtant florissante de son représentant. Parce qu'il joue d'un instrument connoté élitiste, parce qu'il joue de la musique moins commerciale, le Liban s'intéresse peu à son parcours et cela le frustre. Il se fixe donc un objectif personnel : conquérir son pays natal, où il multiplie les présences et les activités, aussi bien discrètement que médiatiquement. Ses séjours sont toujours rythmés par des activités officielles et des plages personnelles. Enchaînant les interviews à son arrivée, il garde toujours quelques jours pour lui, par exemple pour donner des cours d'improvisation au Collège Notre-Dame de Jamhour, ou pour restaurer la maison de son grand-père, acquise il y a quelques mois. Preuve de son attachement et de sa volonté de s'ancrer au Liban. « Je suis un enfant du dehors qui veut rentrer », affirme-t-il.

À la tête d'une équipe pouvant compter jusqu'à 130 personnes pendant les tournées, Ibrahim Maalouf gère lui-même sa carrière de manière très réfléchie et rigoureuse. L'école de son père. Et il ne cède pas aux sirènes des réseaux sociaux. Ses pages Facebook ont énormément de succès, mais sa page Instagram, bien que comportant plus de 31 000 suiveurs, est fermée. C'est-à-dire qu'elle est gérée par lui-même, acceptant ou refusant de gré à gré les demandes de suivi. Malgré son immense succès et sa médiatisation, le neveu de l'Immortel Amin Maalouf refuse de se comporter en star, car il ne croit plus en cette vision de son industrie. Et qu'il n'accepte pas de voir les maisons de disques et le long travail de production supplantés par les réseaux sociaux, véritables boosters d'ego... Cette vision très cartésienne des choses est une des faces de la personnalité de Maalouf, qu'il contrebalance par une passion, un amour immense pour son pays et son art, flanqué d'un besoin de liberté et de curiosité qu'il satisfait grâce à l'improvisation et aux collaborations. C'est pour rendre heureux ce côté cœur que le trompettiste veut conquérir le Liban, parce qu'il refuse que son pays natal lui résiste encore et ne s'ouvre pas à sa musique instrumentale, sous prétexte qu'elle ne comporte pas de paroles.
Car le cœur, non content d'être le moteur de son ambition, et contrairement aux idées reçues, est aussi l'organe le plus important pour pratiquer la trompette.

• Festival de Baalbeck, le 22 juillet 2017, en clôture de la tournée qui célèbre ses dix ans de carrière. Billets en vente au Virgin Ticketing

 

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commentaires (2)

Bravo pour Ibrahim Maalouf ou le beau retour aux sources .

Antoine Sabbagha

20 h 07, le 29 mai 2017

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Commentaires (2)

  • Bravo pour Ibrahim Maalouf ou le beau retour aux sources .

    Antoine Sabbagha

    20 h 07, le 29 mai 2017

  • Un immense artiste doublé d'un homme sincère, authentique, comme on en voit peu dans ce milieu-là. L'article d'OGD lui rend un bel hommage, mérité.

    Marionet

    08 h 06, le 29 mai 2017

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