La géopolitique régionale vient d'être chamboulée, à n'en point douter, par la récente visite du président américain Donald Trump en Arabie saoudite. Pour son premier voyage officiel hors des frontières américaines, M. Trump a frappé fort, en jetant les bases d'un revirement à 180 degrés de la politique étrangère moyen-orientale lancée par son prédécesseur Barack Obama. On est désormais loin de l'Amérique de l'accord nucléaire iranien dit des 5+1. L'heure est dorénavant au bloc arabo-américain face à Téhéran, et cette tendance a clairement transparu dans le discours prononcé par le 45e président des États-Unis à Riyad cette semaine.
Ce revirement aura assurément des implications régionales et surtout locales, puisque l'Arabie saoudite est à présent hissée au rang de clé de voûte de cette nouvelle politique régionale américaine. Pour l'heure, l'attitude affichée par le président libanais Michel Aoun à l'égard de ce qui apparaît comme rien de moins qu'une pleine et entière redistribution des cartes reste floue et incertaine. Se rendra-t-il toujours, et comme prévu, à Téhéran afin de clamer une nouvelle fois encore les velléités libanaises de neutralité régionale, comme précisé d'ailleurs dans le discours de prestation de serment ? Ou au contraire, à l'aune du soutien américain affiché à l'armée libanaise et à ses efforts de lutte contre le terrorisme islamiste, choisira-t-il de reporter ce déplacement ? L'embarras est bel est bien là, comme en témoigne d'ailleurs le récent tweet du ministre des Affaires étrangères Gebran Bassil à son retour du sommet de Riyad contre le terrorisme et dans lequel il a prétendu ne pas avoir été mis au courant des résolutions anti-Hezbollah qui allaient être prises par les participants audit sommet.
Du côté du Hezbollah, une fois le choc de ce revirement américain sur la scène régionale passé, il paraît évident qu'une réaction virulente et à la mesure de ce changement doit s'exprimer sur la scène politique. De source proche de la banlieue sud, on cite notamment le retour pur et simple à la loi électorale de 1960 ou, pis encore, le report sine die des législatives. Quoi qu'il en soit, l'allocution de Hassan Nasrallah demain à l'occasion de la commémoration de la libération du Sud sera à la hauteur de ce chamboulement géopolitique et sera probablement très critique à l'égard, à la fois, de la nouvelle présidence et du nouveau gouvernement.
Il reste que la stabilité interne du pays demeure une ligne rouge à l'heure qu'il est, surtout que le territoire est actuellement pris d'assaut par les réfugiés. Ainsi, et selon le récent rapport publié par la Banque mondiale, les étrangers – syriens et palestiniens notamment – sont plus de 2 millions et demi de personnes. Il est donc impensable pour les parties politiques, et notamment pour le Hezbollah, de chercher à déstabiliser le pays sur le plan sécuritaire.
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Ces illuminés s'en tapent.
20 h 53, le 24 mai 2017