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Liban - Législatif

Famine de 1915, prêt à l’éducation et mécanique au menu de la Chambre

Les députés réunis en session parlementaire extraordinaire. Photo Nasser Traboulsi

Consacrée à l'expédition des points restants de l'ordre du jour de la session parlementaire extraordinaire (12 points sur 73 au total), la séance d'hier a fini par être plus courte que les quatre précédentes.
La tribune réservée aux ministres, saturée la semaine passée, n'est qu'à moitié remplie, les ministres rejoignant successivement le chef du gouvernement, Saad Hariri, arrivé lui-même avec quelques minutes de retard. Visiblement décontracté, il converse discrètement avec Ghattas Khoury, assis à sa droite, sans se soucier de voir, à sa gauche, Yaacoub Sarraf dresser l'oreille. Le nombre relativement réduit de députés contribue à décontracter l'ambiance, l'absence de députés concernés par certaines propositions de l'ordre du jour évitant d'ouvrir des débats autour de textes qui, manifestement, ne devaient pas passer.

« Finissons-en avant de mourir de faim », lance Antoine Zahra, pour couper court sur un ton badin au débat autour d'une proposition de loi, qui restera lettre morte, de Nehmetallah Abi Nasr visant à déclarer le 2 mai journée nationale (mais non fériée) de la Grande Famine (1915-1918). C'est en effet sur un ton grave que M. Abi Nasr entame ce débat : « Les tragédies et les fléaux qui se sont abattus durant trois ans sur la Montagne et (il insiste, NDLR) sur le littoral ont transformé ces régions en fosses communes. Un tiers des habitants a été tué, un autre a été contraint à l'exode et le troisième est resté attaché à sa terre... »

Intervient le président de la Chambre Nabih Berry pour tenter de couper son élan : « Je ne m'attendais pas à une thèse de doctorat... » Mais le député continue sur sa lancée : « Il y a une journée pour l'amour, une autre pour la dignité, pourquoi ne pas en faire une pour la faim dont beaucoup ont souffert ? » Et Nabil Nicolas de renchérir : « Parce que celui qui renie son histoire... » Intervient Ali Ammar, qui épouse d'abord le ton sérieux de ses collègues mais enchaîne aussitôt sur la situation actuelle : « Nos aïeux ont vécu des douleurs. Mais les Libanais vivent aujourd'hui en deçà du seuil de pauvreté. » S'ensuit un monologue actualisé sur la famine : « J'ai faim d'électricité, d'eau propre, notre armée a faim (...) et le peuple a faim d'une loi électorale juste. » « C'est fini ! » lance alors Nabih Berry, feignant un mécontentement. Un rire général anime l'hémicycle, notamment un fou rire prolongé de Saad Hariri.

 

(Pour mémoire : Séance parlementaire de jeudi : ce qu'il faut savoir sur les textes examinés)

 

 

Ambiguïté
Le gouvernement ne retrouvera réellement son sérieux que lorsque sera abordé le dernier point de l'ordre du jour, portant sur l'approbation d'un prêt sans intérêt de cent millions de dollars de la Banque mondiale. Ce prêt vise à construire ou réhabiliter des écoles au Liban, améliorer la qualité de l'enseignement et établir un réseau internet interscolaire. La Chambre a fini par approuver ce prêt, mais après que de nombreux députés ont critiqué l'empressement du cabinet à obtenir cette approbation sans tenir compte de la procédure constitutionnelle.

L'approbation du prêt avait, en effet, été soumise au débat, contrairement à l'ordre du jour prévu, à la fin de la séance parlementaire de jeudi dernier, sans que les députés ne soient notifiés de la teneur de l'accord relatif au prêt. Le seul document dont ils disposaient en exposait en une phrase la finalité. Face à la levée de boucliers de plusieurs blocs, dont le Hezbollah, les Kataëb et les Forces libanaises, il a été convenu que l'examen de ce point serait reporté à la semaine suivante, le temps que les députés disposent d'une copie de l'accord. Mais hier, ce scénario s'est répété : mêmes plaintes de parlementaires de n'avoir reçu aucun document qui résume l'accord, dont M. Berry fait lui-même aveu de « l'épaisseur » pour justifier qu'il se soit abstenu de le distribuer.

Le seul document à avoir été communiqué aux députés est la copie de deux pages du décret de signature de l'accord en question : rajouté in extremis à la tête de l'ordre du jour du Conseil des ministres de mercredi, ce décret a été signé par le président de la République, avant d'être transmis hier au Parlement.
« Même si la procédure n'est pas entièrement respectée cette fois, cela ne se répétera pas », déclare M. Hariri à ceux qui réclament un examen préalable rapide en commission, ne serait-ce que pour évaluer les coûts et bénéfices de ce prêt. À ceux qui disent favoriser une donation plutôt qu'un prêt, fût-il sans intérêt, le ministre des Finances, Ali Hassan Khalil, répond que ce prêt « prélude à l'obtention d'autres prêts dont les intérêts de 6,5 % ou 7 % seraient revus à la baisse ». En outre, des députés ont émis des réserves sur le fait, présenté par M. Khalil, que c'est le gouvernement qui a compétence à « décider de la distribution du prêt et de ses différentes affectations ».

 

Exemption de la mécanique pour les camionneurs
La seconde loi à être votée exempte des taxes de la mécanique ainsi que des pénalités de retard relatives pour les années 2011 à 2016 les camionneurs libanais qui se déplacent à l'étranger. Déposée le 21 janvier 2016, elle répond à une revendication des chauffeurs de camion ayant subi de lourdes pertes depuis le début du conflit syrien, ainsi que de la fermeture du point de passage à la frontière syro-jordanienne de Nassib en avril 2015, qui était emprunté par les camions libanais pour atteindre les marchés des pays du Golfe. Ces camions sont, depuis, contraints de se déplacer par voie maritime, ce qui hausse considérablement la facture du transport.

Pourtant connu pour ses réticences à l'égard de tout ce qui réduirait les rentrées du Trésor, le chef du bloc du Futur, Fouad Siniora, avalise cette exemption et juge « inutile » de réduire la période de rétroactivité de la loi. Cela a étonné de nombreux députés, comme Nawar Saheli. « M. Siniora d'accord sur des exemptions ? Il faut marquer l'événement. Le débat n'a plus lieu de se poursuivre », lance-t-il.

En revanche, le plaidoyer de Samy Gemayel à l'hémicycle n'a pas suffi pour une exemption du paiement par les municipalités des frais de services de nettoyage versés à Sukleen par le biais de l'État. Le caractère d'urgence de la proposition de loi est rejeté, et celle-ci est renvoyée en commission. Le texte prévoit pourtant d'affranchir les municipalités d'une « charge lourde et injuste », selon M. Gemayel. Jusqu'à l'éclatement de la crise des déchets, les frais de services de nettoyage dus par les municipalités à Sukleen étaient puisés par l'État (le ministère des Finances) dans la caisse municipale autonome, sans que les conseils municipaux ne puissent contester la valeur des frais versés en leur nom. La caisse s'en est trouvée débitrice, à l'égard de l'État, des sommes versées pour les frais de Sukleen. « Le cumul des dettes est devenu pour ces municipalités une entrave majeure à leurs projets de développement de leurs localités respectives », ajoute M. Gemayel, fervent partisan de la décentralisation. Sa proposition de loi semble avoir peu de chances d'aboutir tant qu'une solution durable à la crise des déchets n'est pas obtenue.

Une autre proposition, obéissant elle aussi à l'impératif de parer au plus pressé, est reportée sous le même prétexte de l'inopportunité des solutions partielles. Il s'agit d'une proposition de loi, présentée par Farid Makari, pour remédier aux tergiversations sur l'approbation de la grille salariale et portant sur une majoration de 500 000 livres libanaises sur les salaires des fonctionnaires, civils et militaires, à l'exception de certaines catégories de la fonction publique, comme les juges et les instituteurs.

 

 

Pour mémoire

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Consacrée à l'expédition des points restants de l'ordre du jour de la session parlementaire extraordinaire (12 points sur 73 au total), la séance d'hier a fini par être plus courte que les quatre précédentes.La tribune réservée aux ministres, saturée la semaine passée, n'est qu'à moitié remplie, les ministres rejoignant successivement le chef du gouvernement, Saad Hariri, arrivé...

commentaires (4)

Notre pays n'est plus un Etat digne de ce nom avec un gouvernement qui se respecte. C'est devenu une sorte de supermarché sans véritable direction pour le gérer convenablement, où nos "responsables" se servent sans vergogne dans les étalages qui leur conviennent, sans jamais payer leur dû. Comme ils sont tous solidaires les uns des autres, personne ne leur demande des comptes. Et si par malheur certaines voix de protestation se font entendre ici ou là parmi la société civile...(voir le problème des déchets et les manifestations du début au centre-ville en 2015)...ces "responsables" ont vite fait de les neutraliser ! Notre pays est de plus en plus connu de par le monde pour sa corruption généralisée et tous les problèmes qui en découlent. Mais toujours personne pour changer cela...efficacement et rapidement ? Irène Saïd

Irene Said

15 h 41, le 27 janvier 2017

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Commentaires (4)

  • Notre pays n'est plus un Etat digne de ce nom avec un gouvernement qui se respecte. C'est devenu une sorte de supermarché sans véritable direction pour le gérer convenablement, où nos "responsables" se servent sans vergogne dans les étalages qui leur conviennent, sans jamais payer leur dû. Comme ils sont tous solidaires les uns des autres, personne ne leur demande des comptes. Et si par malheur certaines voix de protestation se font entendre ici ou là parmi la société civile...(voir le problème des déchets et les manifestations du début au centre-ville en 2015)...ces "responsables" ont vite fait de les neutraliser ! Notre pays est de plus en plus connu de par le monde pour sa corruption généralisée et tous les problèmes qui en découlent. Mais toujours personne pour changer cela...efficacement et rapidement ? Irène Saïd

    Irene Said

    15 h 41, le 27 janvier 2017

  • "Le gouvernement ne retrouvera son (sérieux!) que lorsque sera abordé le point portant sur l'approbation d'un prêt sans intérêt de cent millions de dollars de la Banque mondiale. Le seul document à avoir été communiqué aux députés, est la copie de deux pages du décret de signature de l'accord en question, malgré tout, par ce "président" de Bäâbdâh ! Et à ceux qui disent favoriser une donation plutôt qu'un prêt, fût-il sans intérêt, le ministré ex-"Déshérité" Khalil répond que ce prêt « prélude à l'obtention ; yâââï ; d'autres prêts dont les intérêts de 6,5 % ou 7 % seraient revus ; re-yâââï ; à la baiiisse, et que c'est le gouvernement qui a compétence à décider de la distribution du prêt et de ses différentes affectations » ! Et donc, "Bouclez la" ! Oui bon, mais ex-"Déshérité", sur ces Cent millions initialement prévus ; "en principe?" ; au écoles, quelle sera la part qui reviendra aux moult dessous de table et/ou commissions ? 30, 40% maybe(h) ? Yâ wâïyléééh !

    ANTOINE-SERGE KARAMAOUN

    09 h 37, le 27 janvier 2017

  • Näâmttâllâh ! Quid d'une journée, alors, pour les "Disparus" libanais chez l'aSSadique en bääSSyrie ? Qu'en pense son président-bigaradier et surtout naSSréh Khoûréh Président, lui, du "Haut?" comité Syro-libanais(h) !

    ANTOINE-SERGE KARAMAOUN

    09 h 22, le 27 janvier 2017

  • A MON AMI NEEMATALLAH ABI NASR POUR QUE LE SOUVENIR DE CE GENOCIDE OTTOMAN NE SE DISSIPE PAS : LES EMIGRES DU DESTIN QUAND LE SPECTRE MAUDIT DE L,IGNOBLE FAMINE PLANA SUR LES COTEAUX JADIS VERTS DU LIBAN, DANS LES CHAMPS DESSECHES, SUR LA TERRE MUTINE IL NE POUSSAIT NI FRUIT, NI SEIGLE ET NI FROMENT. L,ARCHANGE DE LA MORT, QUE LE SORT PREDESTINE, EMPORTAIT SANS PITIE VIEUX, JEUNES ET ENFANTS. EPOUVANTES PAR LA MALEDICTION DIVINE, LES PITEUX EMIGRAIENT VERS D,AUTRES CONTINENTS. C,ETAIT AU TEMPS DU TURC DONT LA SOIF SANGUINAIRE, DES MAUX ET DES FLEAUX TOUJOURS PLUS MEURTRIERE, REPANDAIT LA TERREUR PARMI LES OPPRIMES. ET DEPUIS, DISPERSES AUX QUATRE COINS DU MONDE, DE LA PATRIE EN DEUIL LES ENFANTS BIEN-AIMES, ILS PORTENT DANS LE COEUR LA NOSTALGIE PROFONDE DU PAYS QUI VIT NAITRE ET GRANDIR LEURS GRANDS- PERES, PAR LE DESTIN CRUEL JADIS DERACINES, ET L,ESPOIR DU RETOUR AU BERCEAU DE LEURS PERES, POUR LEURS FILLES ET FILS, ENFANTS DES EMIGRES ! * POUR QUE VIVE LE SOUVENIR !

    LA LIBRE EXPRESSION

    07 h 04, le 27 janvier 2017

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