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Moyen Orient et Monde - Analyse

Quel bilan pour François Hollande au Moyen-Orient ?

La politique de Paris dans la région est révélatrice des forces et des faiblesses de la diplomatie française durant le quinquennat Hollande.

Le président français, François Hollande, à son arrivée hier à Abou Dhabi. Stéphane de Sakutin/AFP

C'était l'exercice où il était le moins attendu. N'ayant pas – à l'instar de Nicolas Sarkozy mais contrairement à Jacques Chirac – d'expériences internationales ni de passions particulières pour la matière diplomatique avant son arrivée à l'Élysée, François Hollande a du rapidement faire ses preuves sur la scène internationale.
Presque cinq ans plus tard, alors qu'il vient d'annoncer qu'il ne se présentera pas à l'élection présidentielle de 2017, la matière diplomatique apparaît pourtant comme l'un des seuls domaines où le locataire de l'Élysée n'a pas à rougir de son bilan. Confronté notamment aux guerres civiles en Irak et en Syrie, à la montée en puissance des groupes jihadistes en Afrique et au Moyen-Orient et à la crise ukrainienne, le président français a eu fort à faire.

Son esprit de synthèse, son sens de l'écoute, sa capacité à négocier pendant des heures se sont vite révélés être de formidables atouts pour gérer ce type de dossiers. Et le président, englué dans ses contradictions et dans ses calculs politiciens sur la scène intérieure, s'est muté en un monarque et chef de guerre sur la scène extérieure. Celui qui voulait incarner une « présidence normale » n'aura finalement eu aucun mal à endosser le costume du souverain français, seul décideur en matière de politique étrangère, façonné par la Ve République. Pour le meilleur et pour le pire.

S'il est toujours difficile d'évaluer une action diplomatique sur le court terme – les choses n'étant jamais complètement noires ou blanches en la matière – François Hollande peut se targuer d'avoir enregistré plusieurs succès à l'international : les accords de Minsk, l'accord nucléaire avec l'Iran, la COP21, pour ne citer qu'eux. Mais c'est certainement la politique de Paris au Moyen-Orient qui révèle le mieux les forces et les faiblesses de la diplomatie française durant le quinquennat Hollande.

(Lire aussi : Les grandes dates de la présidence Hollande)

 

Hollande d'Arabie
Profitant d'un certain refroidissement des relations entre Washington et Riyad, Paris a joué son va-tout en se rapprochant de l'incontestable leader des pétromonarchies sunnites. Symbole de cette entente, François Hollande sera invité en mai 2015 à assister au sommet extraordinaire du Conseil de coopération du Golfe (CCG) en tant qu'« invité d'honneur », un privilège d'habitude réservé aux présidents américains, qui lui vaudra le surnom d'« Hollande d'Arabie ». Financièrement, l'opération de rapprochement avec l'Arabie saoudite est un grand succès, puisqu'elle va permettre à Paris de conclure plusieurs contrats juteux, notamment dans le domaine de l'armement.

Diplomatiquement, cette alliance avec la puissance hégémonique dans le camp sunnite, à un moment marqué par les fortes rivalités entre sunnites et chiites au Moyen-Orient, a limité la marge de manœuvre française sur plusieurs dossiers. Paris n'a pas été très bavard quand il s'est agi de critiquer l'action saoudienne au Yémen ou les dérives autoritaristes du président égyptien Abdel Fattah el-Sissi, grand allié de l'Arabie saoudite depuis le renversement de l'ex-président Mohammad Morsi. La France a, au contraire, incarné la défense d'une ligne dure au moment des négociations nucléaires entre l'Iran et les 5+1 (USA, Royaume-Uni, Russie, Chine, France, Allemagne). Cette prise de position ne semble toutefois pas l'avoir desservie puisque le président iranien Hassan Rohani n'a pas manqué de venir à Paris pour signer de nombreux contrats quelques mois après la signature de l'accord nucléaire. Politiquement, l'alliance avec l'Arabie saoudite aura été assez mal perçue par une partie de l'opinion publique française qui associe, à tort, le royaume wahhabite aux groupes jihadistes, polémique largement alimentée par une partie de la droite ainsi que par le Front national.

(Lire aussi : François Hollande : Un bilan mitigé et une image ternie)

 

Le plus grand échec
En Syrie, le président Hollande a poursuivi, dans un premier temps, la politique de son prédécesseur, exigeant à plusieurs reprises le départ du président Bachar el-Assad, avant d'être confronté à de nouvelles problématiques. La Syrie restera d'ailleurs comme le dossier où il est le plus difficile d'évaluer la diplomatie de François Hollande. Parce que le locataire de l'Élysée est le seul dirigeant occidental à être resté constant dans son soutien à la rébellion, comme en témoigne ses vibrants plaidoyers devant l'Assemblée générale des Nations unies, il peut se targuer d'avoir eu une certaine hauteur de vue qui le place du bon côté de l'histoire. Mais parce que le président français n'a pas réussi à peser dans ce conflit, n'a pas réussi à convaincre l'allié américain de s'engager davantage et que la France – ancienne puissance mandataire en Syrie – a fini par être exclue des négociations et réduites à invoquer des arguments moraux devant la tribune des Nations unies, la crise syrienne restera comme le principal échec diplomatique de M. Hollande.

La volte-face du président américain Barack Obama à l'été 2013, renonçant à intervenir alors que le régime syrien avait franchi la ligne rouge qu'il avait lui-même fixée, restera sans doute longtemps en travers de la gorge du président français. Dans un article publié par le journal Le Monde intitulé « Le jour où Obama a laissé tomber Hollande », publié le 24 août 2016, le président français résumait les enjeux de la non-intervention avec honnêteté : « Je ne sais pas ce que cela aurait donné si on avait frappé, peut-être qu'on se reverrait et que vous me diriez : "Vous avez frappé, mais il y a Daech qui est là, c'est de votre faute". Ce que je peux dire, c'est qu'on n'a pas frappé... et il y a Daech. »

(Portrait : Le paradoxe Hollande, président "normal" devenu anormalement impopulaire)

 

Puissance moyenne
La Syrie est devenue, après les attentats et la crise des migrants, un enjeu de politique intérieure en France. L'entremêlement entre les dossiers sécuritaires et diplomatiques a encore réduit la marge de manœuvre du président français, obligé de privilégier les actions militaires contre l'État islamique (EI) aux moyens de pressions contre le président Assad. Le recours à l'interventionnisme militaire pour contrer la menace jihadiste a également montré ses limites, en Irak comme en Syrie, sans que cela ne s'avère vraiment efficace pour protéger la France de nouveaux attentats.

Concernant le dossier israélo-palestinien, la France aura essayé de relancer les négociations multilatérales après que l'Assemblée nationale et le Sénat eurent reconnu l'État palestinien. Mais là encore, elle se sera confrontée à ses limites et à ses contradictions : sa volonté de briser le statu quo, profitable à Israël, sans pour autant exercer le moindre moyen de pression sur l'État hébreu. Le président semble de plus avoir renoncé à sa volonté de reconnaître l'État palestinien en cas d'échec des négociations.

Parce qu'il a été confronté à de nombreux dossiers régionaux, le quinquennat de François Hollande permet d'avoir une appréciation globale de la place de la France au Moyen-Orient. Celle d'une puissance moyenne, qui ne peut plus arbitrer les conflits entre les grandes puissances régionales. Celle d'une puissance qui peut encore parler avec tout le monde et défendre des grands principes mais dont la capacité d'influence, à défaut du soutien américain et d'une Europe unie, continue à se réduire année après année, sans pour autant que le président actuel en soit responsable. Ce dernier a encore six mois pour obtenir un succès diplomatique majeur dans la région. Mais reste à savoir si ses interlocuteurs le prendront encore au sérieux, en sachant qu'il a dû renoncer à se présenter du fait de son impopularité et que son successeur privilégiera, probablement, une autre approche sur de nombreux dossiers.

 

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SI HOLLANDE EST A BLAMER OBAMA ET LES AUTRES LEADERS EUROPEENS SONT A ANATHEMATISER...

LA LIBRE EXPRESSION

08 h 54, le 03 décembre 2016

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Commentaires (3)

  • SI HOLLANDE EST A BLAMER OBAMA ET LES AUTRES LEADERS EUROPEENS SONT A ANATHEMATISER...

    LA LIBRE EXPRESSION

    08 h 54, le 03 décembre 2016

  • Le bilan de Normal 1er au Moyen Orient ... ? rien ou presque ..! Liban ,zéro de la parlotte pour gogos et parole non tenue contrat avec l'armée (Donas), Syrie fiasco avéré ,Lybie rien , Egypte faux succès commerciaux, avec les bateaux russes et quelques Rafales ,vendu à crédit.. ( Cofacé à 60/65% de risques export ) a savoir les saoudiens ne financeront plu les marchés d'armement du Caire ...! donc , rien de payer encore .. ,les caisses de l'Egypte ,sont vides ,sa demande de crédit d'urgence au FMI (15 milliard USD) sous étude, son économie en faillite ..de surcroit les saoudiens ne vendent plus an Caire depuis octobre ,à des prix préférentiels du pétrole , Iran ,relations glaciales/polies ,malgré des débuts d'accords commerciaux, Yemen ,rien , Arabie un monarque salafiste à reçu la Légion d'Honneur , bravo, difficile pour un journaliste de vendre la brosse à reluire et le cirage en même temps, pour édulcorer les fiascos de Normal 1er......!

    M.V.

    08 h 54, le 03 décembre 2016

  • Vous êtes le seul à penser que la bensaoudie n'a rien à voir avec les bactéries wahabites qui opèrent au M.O et dans le monde . Depuis que vous avez pronostiqué sans réserve la victoire de hyllarie aux présidentielles, en tant que journaliste je dirai que vous faites concurrence à hollandouille dans les erreurs qu'il a commis dans ses politiques internationales . Comment peut on combattre les salafistes en Afrique et les armer au M.O en déclarant que c'était des combattants de la liberté ? Une contradiction que vous n'avez pas éludé , préférant parler de ce nullard qu'il avait des forces et des faiblesses.

    FRIK-A-FRAK

    08 h 35, le 03 décembre 2016

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