François Hollande est probablement le président de la République française qui a le plus parlé aux médias. Mais entre scandales, attentats et perte de crédibilité, il a multiplié les erreurs et les « couacs », suscitant beaucoup d'incompréhension mais aussi, et surtout, d'amertume chez les Français. Alors que la primaire de la gauche approche à grands pas, c'est le constat des auteurs de Moi, président des couacs Joël Amar et Ziad Gebran.
Dans votre livre, vous faites le constat d'un « président des couacs ». Mais dans quelle mesure la communication peut-elle influer sur le mandat présidentiel ?
Ce titre est une référence à l'anaphore prononcée par François Hollande au moment de sa candidature : « Moi, président des Français ». En analysant ses déclarations, on s'est rendu compte que le mot « couac » revenait souvent pour définir sa stratégie de communication. Aujourd'hui, à l'heure des réseaux sociaux, la communication politique ne peut être vue comme un outil secondaire. Un bon président est un président qui réussit sa communication et sur ce point, pour François Hollande, c'est raté! D'ailleurs, Donald Trump a bien compris l'importance de la communication. Sa présence sur les réseaux sociaux a permis de véhiculer l'image d'une personne spontanée, au naturel déconcertant. Une communication qui a tranché sévèrement avec la maîtrise et l'orthodoxie de Hillary Clinton.
(Lire aussi : A six mois de la présidentielle, l'élan brisé de l'entrée en campagne de Hollande)
Comment définiriez-vous la communication de François Hollande ?
La communication de François Hollande est à l'image de sa personnalité. Brouillonne et sans dynamique particulière. Le président glisse de petites pièces comme dans l'espoir de rassembler les éléments d'un puzzle, mais sans créer une véritable cohérence. Il va ainsi successivement se présenter comme quelqu'un de proche du peuple, puis très autoritaire sur les sujets de guerre comme la Syrie, puis se montrer faible lorsqu'il s'agit de s'imposer face à son entourage (Manuel Valls, Emmanuel Macron). Pendant près de trois ans, le président ne fait aucun effort de présence sur les réseaux sociaux puis se réveille tardivement en 2014. Tout a été fait par tâtonnement et ceci est dû à son manque de croyance dans la communication politique. François Hollande est très passif, de sorte qu'il donne l'impression de ne pas être acteur de son mandat. Sa communication est en fait en cohérence avec sa politique: on n'a jamais su qui était François Hollande, son projet politique a toujours été flou et il s'est installé à l'Élysée sans concept ni récit pour sa présidence.
(Témoignage : Nadim, rescapé franco-libanais du Bataclan, et cette tristesse qui ne veut pas le lâcher)
François Hollande a multiplié les erreurs en matière de gestion de sa vie privée. Quel a été l'impact de celle-ci sur son image ?
Contrairement à Nicolas Sarkozy, qui a joué sur les histoires et les chamboulements de sa vie personnelle, François Hollande est très secret sur sa vie privée. Très vite, il a souhaité séparer les deux. Il est d'ailleurs le premier président qui n'ait pas été marié. Si certains y ont vu une évolution de la société et des mœurs, ce manque d'équilibre dans la vie sentimentale va empoisonner son mandat. L'épisode Julie Gayet publié dans Closer, sa séparation de Valérie Trierweiler puis la publication d'un livre à charge par cette dernière sont autant d'épisodes qui contribuent à nourrir ce manque d'équilibre. Face à ces événements, François Hollande reste passif, il ne construit pas de récit autour de sa vie privée. Et cette incapacité à créer un personnage privé va lui être fatale. Avec François Hollande, c'est l'impression de ne pas le connaître. Or les Français sont censés pouvoir le sentir proche et arriver à le cerner.
(Lire aussi : « Les Français ont compris que leur pays était entré dans une phase historique difficile et douloureuse »)
Comment jugez-vous la posture de François Hollande au lendemain du 13 novembre ?
Après les attentats du 13 novembre, François Hollande a eu la posture parfaite. Il a fait preuve de beaucoup de courage, il s'est rendu directement sur les lieux. Il a réagi avec des mots crus, qui parlent aux Français, qualifiant notamment les faits
d'« horreur ». Il y a alors un lien qui s'est tissé avec les Français, un lien qui lui a permis de se placer en protecteur. Mais après le 14 Juillet, il a été rattrapé par la réalité. Sa rhétorique ne fonctionnait plus. L'attentat, déjà, était difficile à qualifier, et le débat est vite passé à la contestation politique. Il vivait son troisième attentat, et pour les Français, l'heure de la remise en question était venue.
Si vous étiez le conseiller en communication de François Hollande, quels conseils lui donneriez-vous ?
Il faut qu'il montre un peu plus d'émotions. François Hollande a la réputation d'être un homme froid, noyé dans la technique et les tactiques politiciennes. Mais il n'arrive pas à toucher le peuple. Il n'a pas d'histoires à raconter, il ne fait pas rêver.
Lire aussi
La France recherche la potion contre la radicalisation jihadiste
Un an après les attentats du 13 novembre, la France s'est durcie
La déradicalisation, immense et incontournable rocher de Sisyphe
La note est salée pour le tourisme à Paris après les attentats
Le seul fait qu'il pense se représenter est une honte pour la France. Même s'il a été élu l'homme de l'année par un obscur groupe de pression américain orienté.
13 h 18, le 12 novembre 2016