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Moyen Orient et Monde - Focus

Gaza : l’acheminement de l'aide humanitaire via la jetée américaine encore incertain

Un navire américain chargé d'aide humanitaire n'a pas pu atteindre le ponton flottant en raison du mauvais temps jeudi, selon un porte-parole du Pentagone.

Gaza : l’acheminement de l'aide humanitaire via la jetée américaine encore incertain

Les travaux de construction de l'embarcadère flottant JLOTS en Méditerranée. Il permettra à l'Agence américaine pour le développement international (USAID) et à ses partenaires de recevoir et d'acheminer de l'aide humanitaire dans la bande de Gaza. Photo AFP

Le navire américain Sagamore transportant de l’aide a quitté mercredi 8 mai le port de Larnaca, à Chypre, à destination de la plateforme maritime construite par les États-Unis au large de Gaza. Après deux mois de travaux, les autorités américaines avaient annoncé, la veille lors d'une conférence de presse, que ce ponton flottant était achevé, ouvrant la voie à l'acheminement de l'aide humanitaire vers l’enclave. Jeudi, le général de division Patrick S. Ryder, porte-parole du Pentagone, a néanmoins déclaré qu'en raison de la météo, l’aide a finalement été chargée sur un autre navire américain, le Roy P.Benavidez, amarré dans le port israélien d’Ashdod, sans pouvoir donner de date précise quant au débarquement de l'assistance à Gaza.

La mise en fonction de la jetée intervient pourtant à un moment critique du conflit, qui dure depuis plus de sept mois, alors qu'Israël a fermé deux principaux points de passage de l'aide humanitaire ces derniers jours : à Kerem Shalom, suite à des frappes meurtrières du Hamas, et à Rafah où le poste-frontière est désormais sous contrôle israélien. Dans ce contexte, tout retard dans la distribution de l'aide peut accentuer le risque de famine dans la bande de terre.

Détails manquants

S'agissant de l'acheminement de l’aide, le ministère américain de la Défense a déclaré qu'il organiserait la logistique entre les armées américaine et israélienne à Chypre, où l'aide humanitaire est débarquée et inspectée par les autorités locales, selon le Wall Street Journal. Au départ du port de Larnaca, des navires américains devraient ensuite atteindre une plateforme flottante au large des côtes de Gaza, avant d'y décharger leurs cargaisons dans plusieurs petits bateaux qui y seraient stationnés. Ces derniers navigueraient enfin jusqu’aux côtes de l'enclave et amarreraient sur une jetée temporaire qui s’étend sur 550 m. De là, sur les derniers mètres qui la séparent de la plage, des véhicules de transport se chargeraient du transfert via deux ponts-jetées.

Si le mécanisme paraît clair jusque-là, « il y a beaucoup de pièces en mouvement, littéralement et métaphoriquement, qui doivent être rattachées ensemble pour que cela soit efficace », a déclaré au journal américain Shejal Pulivarti, porte-parole adjoint de l'Agence américaine pour le développement international, la principale agence gouvernementale chargée de l'aide humanitaire. Car l’attribution des rôles lors des déchargements reste floue, alors que les Américains refusent que leurs soldats mettent les pieds dans l'enclave. Qui se chargera donc de réceptionner l’aide sur le territoire palestinien et de la distribuer ?

Washington n'a pas non plus donné de détails sur les modalités de stockage, de sécurisation et de distribution de l'aide une fois celle-ci acheminée à Gaza. Mais des responsables américains ont indiqué au Wall Street Journal qu'ils envisageaient de collaborer avec le Programme alimentaire mondial des Nations unies (PAM) pour ce faire. Si l'Unrwa, l'agence onusienne en charge des  réfugiés palestiniens, est la plus grosse organisation humanitaire présente dans l'enclave, les États-Unis ont adopté une loi interdisant son financement jusqu'en 2025 à la suite d'accusations israéliennes lancées contre l'agence.

Multiples obstacles

L'absence de stratégies concrètes pour assurer la sécurité et la distribution de l'aide a soulevé des préoccupations parmi certains membres du gouvernement américain et de l’ONU. « Si l'on attend de nous que nous recevions et déchargions des navires chargés d'une grande partie de l'aide humanitaire, nous voulons simplement savoir comment nous sommes censés le faire », a déclaré un haut fonctionnaire de l’ONU au WSJ.

L'implication potentielle des forces israéliennes dans la réception voire la distribution de l'aide pose en outre la question du respect du principe de neutralité en temps de guerre, alors que de nombreux Palestiniens voient cette initiative comme une tentative déguisée d'Israël pour renforcer son contrôle sur le territoire. Martin Penner, porte-parole du PAM, a ainsi déclaré au Wall Street Journal que son équipe travaillerait avec les États-Unis « à condition que les préoccupations des Nations unies en matière de neutralité et de sécurité soient prises en compte et que l’accès de l'aide par voie terrestre soit également élargi ».

L'absence d'une autorité claire pour superviser la distribution de l'aide soulève par ailleurs des préoccupations sécuritaires, alors que, d'un côté, plus de 200 travailleurs humanitaires ont été tués à Gaza depuis le début du conflit, et que, de l'autre, la jetée est à portée de roquettes des factions palestiniennes. Le Hamas a ainsi déclaré en avril qu’il considérerait les forces américaines opérant autour de la jetée comme une force d’occupation.

Alors que des points de passage pour l'aide humanitaire existent dans Gaza, les organisations internationales et les spécialistes ont fréquemment critiqué les initiatives par voie maritime, les jugeant coûteuses et complexes, tandis que le transport par camion est souvent plus efficace pour livrer de la nourriture à l'intérieur de la bande de terre. Le quai pourrait initialement accueillir environ 90 camions d'aide par jour, pour passer ensuite à 150, selon les responsables. Une quantité nettement insuffisante, quelque 500 camions entrant quotidiennement dans la bande de Gaza avant la guerre. Enfin, les conditions météorologiques pourraient affecter le fonctionnement et les opérations sur la jetée, rendant le flux d'assistance incertain. 

Le navire américain Sagamore transportant de l’aide a quitté mercredi 8 mai le port de Larnaca, à Chypre, à destination de la plateforme maritime construite par les États-Unis au large de Gaza. Après deux mois de travaux, les autorités américaines avaient annoncé, la veille lors d'une conférence de presse, que ce ponton flottant était achevé, ouvrant la voie à l'acheminement de...
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