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Liban - Crise des déchets

Dans les coulisses du recyclage : Quand une usine recycle des pneus en roue libre

« Triez chez vous », « Envoyez vos produits recyclables aux usines de recyclage pour réduire le volume des déchets »... Combien de fois avez-vous entendu ces conseils sans vraiment savoir ce qui se cache derrière le mot « recyclage », devenu de plus en plus populaire depuis l'interminable crise des déchets dont les conséquences durent depuis juillet 2015 ? Afin de donner des noms et des visages à ceux qui pratiquent la récupération, le tri dans les centres et le recyclage au Liban, « L'Orient-Le Jour » lance une série de reportages dans quelques-unes des usines du pays. Outre l'intention d'incarner le métier, cette série vise à montrer que le recyclage constitue réellement une industrie florissante au potentiel considérable, à condition d'attirer la matière première... qui se trouve chez chacun d'entre nous ! En nettoyant par le fait même la nature. Quoi de plus urgent pour inverser la tendance et contrer les plans nuisibles à l'environnement et marqués par la corruption ?

Une des employées de l’usine pose devant les machines.

II - Une usine recycle des pneus en roue libre

 

De vieux pneus usagés transformés en terrains de jeux : « Ola 3R » recycle le caoutchouc et contribue à résoudre, à son échelle, la crise des déchets.

Une odeur douce de caoutchouc s'invite parmi les effluves de la forêt d'oliviers et de pins. Perchés au sommet d'une montagne du Chouf, une multitude de pneus s'entassent à l'entrée d'une usine. Quelques hommes vont et viennent, mais les machines sont à l'arrêt. La nuit, pourtant, l'entreprise « Ola 3R » tourne à plein régime pour recycler les cadavres de pneus usagés du pays, et en obtenir, in fine, de nouveaux matériaux.
« Nous fabriquons trois types de produits : de la poudre, des granules et des carreaux de caoutchouc », explique Ola Issa, cofondatrice de l'entreprise.
En effet, une fois récoltés au bord des routes par un camion de la société, les pneus sont emmenés à l'usine avant d'être transformés à l'aide d'un équipement spécialisé. « À l'arrivée, on commence par enlever l'aluminium présent dans le pneu, explique Ola Issa. Nous séparons ensuite les petites pièces des grandes. Tous les métaux sont isolés grâce à un système de champ magnétique. »
Un pneu contient environ 80 % de caoutchouc, 15 % de fer et 5 % de fibres. Enfin prêt à être transformé, le caoutchouc est fondu à l'aide d'un système appelé « cold process ». « Ce processus consiste à faire fondre la matière à trois températures différentes afin d'éviter un dégagement de fumée toxique », précise-t-elle.
D'autres usines transforment les pneus en d'autres produits, en fuel par exemple. Elles font fondre le caoutchouc par incinération, ce qui implique un dégagement de fumée toxique pour l'environnement, ce que cette usine tente d'éviter à tout prix. La poudre, elle, est obtenue à partir de moulins cylindriques. « Plus de 500 pneus sont acheminés chaque jour jusqu'à l'usine, produisant jusqu'à trois tonnes de poudre en huit heures de travail », précise Ahmad Chamseddine, cofondateur de « Ola 3R ».


(Lire aussi : Jugerons-nous un jour nos responsables pour tant d’imprévoyance criminelle ?)

 

Des tonnes de matières inutilisables
Une fois transformé, le caoutchouc peut être réutilisé de plusieurs façons. « Les granules sont employés dans les stades synthétiques et les complexes sportifs, souligne Ola. La poudre est revendue pour servir à la fabrication des pièces de générateurs ou des tapis de voiture, par exemple. Enfin les carreaux, la production principale, permettent de constituer des sols d'intérieur, des terrasses extérieures, des planchers de balcon, ou encore des sols d'école, des salles de sport, des cours de récréation ou des squares pour enfants. »
Bien que l'entreprise ait démarré sur les chapeaux de roue, les quatre associés qui la dirigent ont rencontré, et continuent de rencontrer, plusieurs difficultés. « Depuis 2011, nous avons dû délocaliser notre usine deux fois, à cause d'un problème de permis », explique Ola Issa. Certaines communautés, comme à Saïda, Tyr ou Nabatiyé, collaborent volontiers avec « Ola 3R », leur fournissant ponctuellement des pneus. Toutefois, le gouvernement ne participe aucunement au développement de leur activité, pourtant utile à la préservation de l'environnement. Par exemple, une partie de la matière recyclée n'est pas transformable. S'accumulant depuis quelques années maintenant dans ses locaux, ces tonnes de matières encombrent l'usine, sans qu'une solution ne leur soit proposée.

 

Le reportage précédent de notre série
Carton plein pour Solicar

 

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