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Culture - Festival Beit Misk / Interview

Où l’on parle de « duende », de Cuba, de jazz et du grand Dizzy...

Arturo Sandoval : « Dizzy Gillespie était mon mentor, mon ami, mon prof, et il reste mon inspiration de tous les jours. »

Demain vendredi 1er juillet, au festival de Beit Misk, les amateurs de notes bleues ont un rendez-vous avec un maître ès trompette, un champion du piston toutes catégories, un homme-orchestre qui fait tout, même la danse du ventre, comme lors de son concert à Beyrouth en 2012. Quatre Grammy et six Billboard Awards à son actif, Arturo Sandoval se prête, pour L'Orient-Le Jour, au jeu des questions (indiscrètes)/réponses (langue de bois).

Pour retourner à votre enfance, pourquoi avoir choisi, de tous les instruments de musique, la trompette ?
J'aimais beaucoup les percussions, les petites congas et tout ce qui me tombait sous la main. À Cuba, il était pratiquement impossible d'être en possession de véritables instruments de musique. À 10 ans, ma tante m'a offert un petit cor d'harmonie et j'étais aux anges. Mais c'était également un grand défi. Le premier professeur de trompette chez qui j'ai été m'a d'abord demandé de jouer. J'ai obtempéré, mais comme je n'avais jamais joué de ma vie, il m'a conseillé de me débarrasser illico de mon instrument et d'oublier la musique. Ce jour-là, après avoir pleuré toutes les larmes de mon corps sur le chemin du retour, j'ai décidé de ne pas me laisser décourager et d'embarquer sur la voie de la trompette. Cet instrument est un de mes amours. Le piano l'est également.

Aujourd'hui, vous êtes un trompettiste de jazz de renom, un pianiste virtuose, un compositeur et arrangeur émérite, un chanteur talentueux, un leader de groupe musical et un professeur d'université. Quel est votre secret ?
Merci, vous êtes très aimable. Je n'arrête jamais la pratique de la musique, c'est le secret ! Je suis un véritable amoureux de la musique et je l'exprime par tous les moyens possibles. Parfois, j'ai juste envie de souffler dans la trompette, d'autres fois de jouer du piano, ou d'écrire une chanson, ou encore de composer ou d'enseigner. Tant que l'inspiration est là, il faut s'exercer, rester consistant et déterminé à suivre sa passion.

Vous avez participé au Beirut Jazz Festival en 2012. Quels souvenirs gardez-vous de cette rencontre ? Et qu'est-ce qui vous ramène quatre ans plus tard ?
Ah oui, j'ai passé un très bon moment en 2012. Un très beau pays, un public merveilleux. Bien sûr que j'ai envie d'y retourner !

Garcia Lorca a dit : « Le meilleur talent d'Arturo Sandoval est le duende »...
C'est difficile de traduire le mot duende. Il trouve sa source dans la culture populaire hispanique. C'est le supplément d'âme, la grâce, le feu sacré...

On peut difficilement parler musique avec vous sans évoquer le grand Dizzy Gillespie... Quel est votre meilleur souvenir de lui ? Et le pire ?
La rencontre avec Dizzy a changé ma vie. C'est avec son aide que j'ai pu obtenir l'asile politique et m'installer avec ma famille aux États-Unis. Il m'a accordé la plus belle des libertés, de même que de nombreuses opportunités professionnelles et personnelles. J'ai eu beaucoup de chance de le rencontrer, de jouer avec lui et de faire des tournées avec lui. C'est merveilleux de rencontrer son héros, de se lier d'amitié avec lui. Il était mon mentor, mon ami, mon prof, et il reste mon inspiration de tous les jours. Je ne garde que les meilleurs souvenirs de lui.

Beaucoup d'amateurs de notes bleues ne savent pas que vous êtes également une référence dans la musique classique...
J'ai commencé à jouer de la musique classique à l'âge de 14 ans. Et j'y ai baigné toute ma prime jeunesse. Plus tard, je suis devenu accro au jazz. Mais je joue toujours, dans le cadre de tournées mondiales, avec des formations d'orchestres symphoniques, et j'en suis très heureux. Je prends du bon temps avec les concerts de classique aussi. Je viens d'achever la composition de mon second concerto pour trompette et orchestre, et je suis impatient de le jouer en live.

Vous en êtes à combien de concerts par an ?
Wow... Trop nombreux. Je crois que je suis à la maison une semaine par mois. Cela signifie beaucoup de voyages, mais je suis reconnaissant pour toutes ces opportunités.

Vous aviez dit par le passé que le Buena Vista Social Club ne fait pas de la véritable musique cubaine... Vous avez changé d'avis ?
Vous savez, la vérité, c'est que nous représentons deux choses complètement différentes... Je prône et je défends les droits de l'homme, la liberté pour tous et, par-dessus tout, la démocratie.

Que représente le dégel des relations entre votre pays de naissance et celui de l'exil, vous qui avez connu la prison à Cuba pour avoir écouté de la musique jazz sur « Voice of America » ?
J'apprécie les efforts fournis par le président Obama. Je sais qu'ils émanent d'une volonté réelle d'aider Cuba et ses habitants. Mais il m'est difficile de croire que la politique de l'île puisse changer aussi facilement. Je suis triste de constater, aussi, les conditions de vie et les combats que la population y mène depuis des décades. Je rêve du jour où Cuba sera libre de toute dictature et où son peuple connaîtra enfin la liberté.

Avez-vous toujours autant d'énergie pour la musique ?
J'ai de la chance de pouvoir voyager et de faire ce que j'aime. Pas seulement pour moi, mais aussi pour le public. Oui, c'est fatiguant, et je deviens vieux. Ha ha ! Mais qu'importe l'âge, je me nourris de l'énergie des spectateurs et cela me fournit en énergie et en excitations jusqu'à mon prochain spectacle.

 

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