Le gouvernement libanais, réuni mardi en Conseil des ministres, a décidé de mettre en état d'alerte permanente toutes ses administrations afin de "faire face aux dangers qui guettent la nation", au lendemain d'une série d'attentats suicide qui a frappé le village de Qaa, situé dans la Békaa, non loin de la frontière syrienne. Le Conseil des ministres a en outre décidé de reporter sine die l'examen des dossiers financiers qui étaient à l'ordre du jour, et ce en raison des derniers développements.
"Le Conseil des ministres se considère en état d'alerte permanent afin de faire face à tout développement sécuritaire. Il met ainsi toutes les administrations gouvernementales en état d'alerte également", a déclaré le ministre de l'Information, Ramzi Jreige, à l'issue de la séance. "Les ministres réunis ont insisté sur l'importance de l'unité nationale afin de faire face au terrorisme et ont renouvelé leur soutien à l'armée libanaise et aux forces de sécurité qui assurent la sûreté des citoyens. Ils ont également appelé les citoyens à ne pas se laisser effrayer par les terroristes", a-t-il ajouté.
Lundi, le village de Qaa, limitrophe de la Syrie, a été le théâtre de quatre attentats suicide à l'aube, suivis de quatre autres attaques kamikazes le soir même. Le bilan total de cette série meurtrière est de cinq victimes (plus huit kamikazes tués) et 28 blessés.
(Lire aussi : Au lendemain des attentats suicide de Qaa, l'armée ratisse des camps de réfugiés syriens)
Mises en garde contre l'autodéfense
Lors du Conseil des ministres, le chef du gouvernement, Tammam Salam, a mis en garde contre la mise en place d'un système d'autodéfense au moment où plusieurs habitants du village de Qaa ont paradé avec leurs armes. (Voir notre diaporama ici)
"Nous mettons en garde contre l'autodéfense, et nous devons aborder les développements à Qaa avec une approche nationale et non communautaire", a déclaré M. Salam. Un peu plus tôt, l'armée libanaise avait lancé un appel dans le même sens.
Le chef du gouvernement a en outre affirmé que l'enquête "prenait son cours", et que "l'identité des terroristes se précisait selon les premiers éléments", craignant toutefois que ces attentats "ne soient le début d'une série d'attaques terroristes". Il a indiqué que les attentats de Qaa n'ont "pas constitué une surprise, mais ce qui est nouveau, c'est le mode opératoire et le nombre de kamikazes". Il a ajouté que le "Liban fait face à une menace terroriste sophistiquée", mais a assuré que "le combat contre le terrorisme se poursuit".
Dans la soirée, une réunion sécuritaire s'est tenue au Grand Sérail. "Les attaques contre Qaa marquent une mutation importante de la guerre que livrent les organisations terroristes contre le peuple et l'Etat libanais", indique le communiqué publié à l'issue de cette réunion. "Ces attaques pourraient constituer le début d'une nouvelle phase plus agressive dans la lutte contre le terrorisme", poursuit-il.
"La responsabilité nationale nous oblige à préserver les Libanais des dangers", ajoute ce communiqué, indiquant qu'il n'est pas exclu que les attaques de Qaa puissent être le début d'une vague d'attentats terroristes.
Réactions
Les ministres de l'Intérieur et de la Défense, Nouhad Machnouk et Samir Mokbel, ainsi que le général à la retraite, Chamel Roukoz, se sont rendus dans le village de Qaa, sous haute escorte, afin de faire le point de la situation. "Les risques sécuritaires sont partout, mais le peuple est uni pour faire face au terrorisme", a estimé Chamel Roukoz.
"Nous ne sommes pas venus remonter le moral des habitants de Qaa, car celui-ci est déjà solide", a pour sa part déclaré M. Machnouk. Il a également affirmé que l'Etat ne peut pas mettre en échec toutes les tentatives d'attentat, affirmant que la menace existe toujours. Quant aux kamikazes de lundi, le ministre de l'Intérieur a affirmé qu'ils étaient venus à partir du territoire syrien, et non des campements de réfugiés situés à proximité de Qaa. Le ministre de la Défense a, lui, quitté les lieux sans faire de déclaration.
Selon le commandant en chef de l'armée, Jean Kahwagi, trois des huit kamikazes étaient des ressortissants syriens. "Nous sommes face à une nouveau mode opératoire terroriste", a-t-il déclaré avant le début d'une réunion de sécurité. Le chef de l'armée a par ailleurs indiqué qu'une femme faisait partie des kamikazes.
M. Machnouk a cependant démenti cette information, à l'issue de la réunion sécuritaire qui s'est tenue au Grand Sérail.
Le directeur général de la Sûreté générale, le général Abbas Ibrahim, a, lui, déclaré qu'il n'était pas certain qu'une femme fasse partie des kamikazes. Il a par ailleurs indiqué que les forces de sécurité libanaises étaient en possession d'informations sur des attentats pouvant survenir durant cette période.
Le ministre de l'Industrie, Hussein Hajj Hassan, représentant le secrétaire général du Hezbollah, Hassan Nasrallah, s'est également rendu à Qaa. "Le sang versé par les habitants de Qaa, les soldats de l'armée libanaise et des résistants vaincra face au terrorisme", a déclaré M. Hassan, à la tête d'une délégation du parti chiite. "Le terrorisme ne nous fait pas peur, quel que soit le nombre des tafkiristes (jihadistes) et des kamikazes", a-t-il ajouté.
Le chef du Courant du Futur, Saad Hariri, a insisté quant à lui sur la nécessité du monopole de l'Etat en matière de lutte anti-terroriste.
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commentaires (4)
les dangers encerclent notre Liban. Le danger le plus féroce nous viens de l'intérieur! la démocratie bafouillée ne laisse que l'armée et les forces de sécurité pour se sentir dans un semblant d'état. allah yikoun biaaounoun kel sèaa!
al
22 h 55, le 28 juin 2016