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Liban - La situation

Efforts concertés pour isoler le Liban du conflit régional... et des équipées du Hezbollah

Saad Hariri a reçu hier en soirée les ministres Akram Chéhayeb, Waël Bou Faour et Nouhad Machnouk, en présence de Nader Hariri. Photo Dalati et Nohra

L'escalade menée par les pays du Golfe contre le Liban n'a comporté jusque-là aucune mesure susceptible de compromettre la stabilité du pays. Le soutien du royaume wahhabite à la stabilité du Liban a été réaffirmé par le prince héritier au président français. En pratique, la décision de suspendre l'aide à l'armée a été prise sans que la fabrication des armes commandées initialement pour Beyrouth ne soit interrompue, ni qu'un nouveau destinataire ne soit désigné : les armes iront en définitive à Riyad, ce qui laisse donc ouverte l'option d'un dégel de l'aide saoudienne – même si les responsables saoudiens s'abstiennent de le dire. En marge du sommet islamique extraordinaire qui se tient à Djakarta, le ministre de l'Environnement, Mohammad Machnouk, a reçu hier une expression de bonne volonté du ministre saoudien des Affaires étrangères, Adel al-Jubeir. Ce dernier lui aurait assuré que « les mesures auxquelles a eu recours le royaume n'avaient pas pour cible le gouvernement libanais. Au contraire, les positions prises par le Premier ministre – en faveur de l'unanimité arabe, et contre la position du chef de la diplomatie libanaise – sont appréciées », selon un communiqué du bureau du ministre Machnouk. Ce dernier a ainsi constaté, à l'issue de sa rencontre avec le responsable saoudien, qu'il « n'y a pas d'escalade saoudienne en vue, et que les tensions entre le Liban et l'Arabie sont désormais derrière nous ».

Alors que l'escalade arabe est de plus en plus limitée au Hezbollah, identifié comme « prolongement de l'impérialisme perse », le courant du Futur s'affaire à resserrer les rangs des sunnites modérés, tout en misant sur une alliance nationale de centristes entre le président de la Chambre Nabih Berry – qui a reçu hier l'ambassadeur d'Arabie –, le député Walid Joumblatt – qui doit s'entretenir demain à Paris avec le président François Hollande – et un partenaire chrétien, qui reste à déterminer.
Le leadership du courant du Futur accompagne sa démarche d'un discours à la fois hostile aux actions régionales du Hezbollah et favorable à un dialogue interne avec lui. C'est ce qu'a encore une fois exprimé hier M. Hariri. Ce dernier est rentré à Beyrouth après une visite de trois jours à Riyad – axée sur le redressement de ses affaires, selon une source du courant du Futur. Devant ses visiteurs, M. Hariri a établi une distinction claire entre la guerre régionale menée par le Hezbollah et son arsenal, d'une part, et la situation du Liban, de l'autre. La dimension guerrière de la milice chiite étant du « ressort strict » d'acteurs extralibanais, le combat politique et non violent des parties libanaises pour la relance institutionnelle ne devrait pas cesser pour autant. Et Saad Hariri a révélé au moins deux lignes directrices de cette résilience face au Hezbollah. D'abord, il a appelé à ne pas interpréter la paralysie politique, provoquée par « les intimidations par les armes », comme un argument en faveur d'une révision du système libanais. Il a ainsi appelé à ne pas se laisser prendre par la dénaturation de l'exercice politique et la perversion des textes, induite par le vide prolongé. Ensuite, Saad Hariri a plaidé en faveur d'un compromis interne, qu'il a dissocié de la problématique des armes illégales et des conflits régionaux. « L'élection d'un président est beaucoup plus proche que vous ne le pensez », a-t-il même affirmé, bien qu'il ait reconnu que « le Hezbollah ne fait aucun effort sérieux dans ce sens ».

Cet optimisme d'un déblocage prochain de la présidentielle « dans les deux prochains mois », Saad Hariri le transmet à ses visiteurs depuis son retour à Beyrouth, précise une source du 14 Mars à L'OLJ, mais sans trop y croire. L'optimisme de la Maison du Centre ne trouve de fondement que dans les informations diplomatiques faisant état d'une entente russo-américaine de séparer le dossier libanais du dossier syrien, c'est-à-dire « de faire en sorte que le terrain libanais soit suffisamment immunisé lorsque les négociations autour d'une solution en Syrie seront mises sur les rails », rapporte une source autorisée. L'enjeu serait d'éviter que les parties les moins favorisées par ces négociations ne transfèrent le conflit sur le terrain libanais.
L'on retiendra surtout de ces informations que la sécurité au Liban est une ligne rouge internationale, difficile à franchir. L'armée doit recevoir dans les prochains mois une nouvelle livraison d'armes des États-Unis, incluant des avions Super Tucano. De nouveaux miradors devraient également être livrés prochainement par la Grande-Bretagne.

Des parties hostiles au Hezbollah estiment que « les soi-disant menaces sécuritaires qui justifient le maintien du dialogue ne sont que de la poudre aux yeux ». D'autres, parmi les chiites modérés, affirment que les seules secousses sécuritaires possibles « se limiteront à des incidents sporadiques, qui ne risquent pas de dégénérer ». « Il faut deux parties pour faire une guerre, et jusque-là il n'y a aucun signal d'une volonté de mener une guerre contre le Hezbollah, y compris chez les réfugiés syriens et palestiniens », soulignent ces milieux. Le seul risque sérieux demeure celui de nouveaux assassinats politiques.
C'est pourquoi Saad Hariri procède prudemment pour arriver à un déblocage. Sa volonté est de négocier une issue politique avec le Hezbollah, mais seulement à partir du compromis Frangié. Ce qui compte est moins la candidature du député de Zghorta en question que la logique de ce compromis : celle d'écarter les questions litigieuses – donc de rassurer le Hezbollah – et d'obtenir des garanties acceptables au niveau du gouvernement ; donc de garantir un accord équilibré.

Entre-temps, la crise du gouvernement s'aggrave. « Extrêmement gêné par l'incapacité du gouvernement à résoudre la crise des déchets », le Premier ministre reporte les réunions ministérielles et risque réellement de démissionner, rapportent ses visiteurs. Le ministre Nabil de Freige n'écarte pas cette possibilité. Il estime que « le plus dangereux est que le mécontentement populaire risque de dégénérer : aucun des responsables n'est plus à même de garantir la réouverture d'un dépotoir... à l'exception du Hezbollah et du mouvement Amal. En jetant les ordures de la banlieue sud sur le terrain de la Costa Brava, ils ont imposé ce dernier en dépotoir de fait ».

 

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L'escalade menée par les pays du Golfe contre le Liban n'a comporté jusque-là aucune mesure susceptible de compromettre la stabilité du pays. Le soutien du royaume wahhabite à la stabilité du Liban a été réaffirmé par le prince héritier au président français. En pratique, la décision de suspendre l'aide à l'armée a été prise sans que la fabrication des armes...

commentaires (8)

Le chantage à la démission est souvent perçu comme un manque de courage face aux problèmes difficiles à résoudre au niveau d'un gouvernement, voire une manifestation de lâcheté Il faut se rappeler comment un certain général, devant la masse des difficultés, a abandonné sa troupe dont certains ont payé de leur vie Bien. Monsieur RIFI, ce commentaire ne s'adresse pas à vous. Vous aviez un mur devant vous, impossible à escalader, ou à contourner. Et vous auriez été taxé de complicité avec vos ex-collègues qui continuent à faire actes de présence Et le chantage à la démission est une arme à double tranchant, gare au retour de manivelles

FAKHOURI

15 h 39, le 08 mars 2016

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Commentaires (8)

  • Le chantage à la démission est souvent perçu comme un manque de courage face aux problèmes difficiles à résoudre au niveau d'un gouvernement, voire une manifestation de lâcheté Il faut se rappeler comment un certain général, devant la masse des difficultés, a abandonné sa troupe dont certains ont payé de leur vie Bien. Monsieur RIFI, ce commentaire ne s'adresse pas à vous. Vous aviez un mur devant vous, impossible à escalader, ou à contourner. Et vous auriez été taxé de complicité avec vos ex-collègues qui continuent à faire actes de présence Et le chantage à la démission est une arme à double tranchant, gare au retour de manivelles

    FAKHOURI

    15 h 39, le 08 mars 2016

  • TOUT LE RESPECT POUR MONSIEUR ACHRAF RIFI. IL A DÉMISSIONNÉ POUR NE PAS ÊTRE UN ASSISTANT PARALYSÉ DANS CE FAUX GOUVERNEMENT. LE RIGOLO SALAM, JE NE COMPTE PLUS COMBIEN DE FOIS IL A ANNONCÉ SA DÉMISSION. SA PRÉSENCE OU SON ABSENCE NE CHANGE EN RIEN.

    Gebran Eid

    14 h 42, le 08 mars 2016

  • pas d'accord avec cet article. Personne ne veut détruire le Hezbollah Aucun libanais ne cherche à éliminer HN On veut que le Hezbollah rentre dans les rangs de la politique de notre pays, de devenir un parti politique comme les autres, et de rendre se armes à l'armée libanaise qui est la seule désignée dans la légalité pour protéger notre pays contre toute agression Nous ne voulons pas nous rendre dans d'autres pays pour que nos enfants meurent pour un pays qui n'a que faire du nôtre et nous ne sommes pas l'ONU arabe Je suis persuadé que HN n'aura jamais la sagesse de donner à notre pays la chance de ne plus jamais avoir la guerre à nos portes L'Iran ne lui permettra jamais. L'Iran a besoin de la milice libanaise pour faire le sale boulot M. Saad Hariri investi sur Frangié, il est dans l'erreur totale. Il nous faut un Président solide, ferme et sans connection ou combine partisane

    FAKHOURI

    10 h 56, le 08 mars 2016

  • QUAND LE CORPS EST RONGE PAR LA GANGRENE... ON N,ISOLE PAS LE CORPS... ON ISOLE LE MAL...

    LA LIBRE EXPRESSION

    10 h 30, le 08 mars 2016

  • Le Hezbollah est le bras qui est derrière les assassinats de Hariri et de tous les autres. Il est derrière toutes les mafias du pays et il est aujourd'hui assez fort pour causer encore plus de dégâts s'il fallait le contrer militairement. Or personne n'en veut de cette confrontation et lui, joue la dessus pour continuer de contrôler le pays en le gardant dans l’insécurité et l’instabilité politico-économique. Le jour que tous les autres diront non a tout et commenceront a prendre des mesures concrètes, et il y en a, alors il se verra obliger de composer. Il faut simplement lui enlever l’épée de Damoclès qu'est le TSL sans rien d'autre et il finira par se mettre dans les rangs. Plus il tarde a le faire, plus il sait qu'il est en danger car il sera par après trop tard. Dans tous les cas, il composera reste a savoir si ses détracteur veulent le faire pacifiquement (Il le semble) ou le détruire et le pays avec pour une énième fois.

    Pierre Hadjigeorgiou

    09 h 56, le 08 mars 2016

  • A FORCE DE COURBER L,ECHINE ON RISQUE DE SE COUPER EN DEUX... PEUT-ETRE EN TROIS... OU EN QUATRE... ETC...

    LA LIBRE EXPRESSION

    09 h 41, le 08 mars 2016

  • "La dimension guerrière de la milice chiite étant du « ressort strict » d'acteurs extralibanais". Pas d'accord. i cette milice est iranienne dans sa formation, son financement et son obédience, elle est domiciliée au Liban et ses membres sont libanais. L'Etat libanais ne peut donc pas s'en laver les mains. Pas d'accord non plus sur ce qui suit: "la dénaturation de l'exercice politique et la perversion des textes, induite par le vide prolongé". C'es l'inverse: c'est la "perversion des textes" qui par l'introduction de la règle du quorum des 2/3 - non prévue par la Constitution - qui a induit "le vide prolongé" Enfin, pourquoi faut-il toujours "rassurer le Hezbollah"? Nous savons que, pour lui, le moment n'est pas favorable à un nouveau 7 mai, H. N. nous l'a dit lui-même: pourquoi ne pas en profiter? D'autant plus quee l"Arabie nous en donne l'occasion.

    Yves Prevost

    07 h 37, le 08 mars 2016

  • Au fait aucune force politique ne sait comment agir concernant l'anomalie colossale que constitue le Hezbollah. Ce dernier en effet est une milice iranienne super armée, qui, en faveur de l'Iran et sur ordre de ce pays, s'engage dans des guerres et des intrusions de toutes sortes en d'autres pays et, en même temps, fait partie de la vie et de la réalité politiques du Liban. C'est une anomalie tout à fait extraordinaire. Elle n'a de précédent ni de semblable dans aucun pays du monde.

    Halim Abou Chacra

    04 h 00, le 08 mars 2016

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