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Moyen Orient et Monde - Décryptage

L’est de l’Europe fait bloc contre l’Union

Face à la crise des réfugiés, les États de l'Est se dressent contre la politique migratoire de Bruxelles.

Les dirigeants de la Hongrie, de la Pologne, de la République tchèque et de la Slovaquie célèbrent à Prague le 25e anniversaire du groupe de Višegrad. Michal Cizek/AFP

L'Union européenne a rarement aussi mal porté son nom. Face à la plus grave crise migratoire de son histoire, elle apparaît dans l'épreuve plus désunie que jamais. Lundi 7 mars, dans un sommet face à la Turquie à Bruxelles, elle devra pourtant faire front commun pour endiguer un flux non contrôlé, qui asphyxie une Grèce désemparée. L'enjeu principal réside dans l'adhésion des pays de l'Est à la politique migratoire commune. Intégrés plus récemment au projet européen, ils manifestent leur désaccord et se désolidarisent au plus mauvais moment.
Au moment où l'Union doit gérer les velléités de départ des Britanniques, les désaccords entre les membres fondateurs – perceptibles à travers les critiques exprimées par les Premiers ministres français et italien, Manuel Valls et Matteo Renzi, à l'encontre de la chancelière allemande, Angela Merkel –, un bloc protestataire monte en puissance à l'Est.
« Il y a une très nette fracture entre ceux qui considèrent les réfugiés comme des victimes, et ceux pour qui ils sont une menace, comme c'est le cas dans la plupart des pays de l'est de l'Europe », avance Yves Bertoncini, directeur de l'Institut Jacques Delors à Paris. Le 24 février dernier, l'Autriche réunissait à Vienne la Serbie, la Slovénie, la Croatie, l'Albanie et la République de Macédoine pour stopper ensemble le flux migratoire à leurs frontières. Première victime de cette décision, la Grèce, a rappelé son ambassadeur en Autriche, qui a publiquement manifesté sa colère, jugeant l'initiative « unilatérale et inamicale ».


(Lire aussi : Seule est Merkel, l'article d'Anthony Samrani)

 

« Un choc de deux cultures »
Ironie de l'histoire, le groupe de Višegrad que forme l'union des quatre pays présents en Autriche a été fondé pour favoriser l'accès à l'Union européenne des anciens satellites de l'URSS. Selon Yves Bertoncini, « à sa fondation, le groupe avait une image favorable, celle de pays qui sortaient du communisme et qui essayaient de se moderniser. Maintenant cette image est sérieusement écornée. Elle rime désormais avec égoïsme, rejet de l'autre. Mais c'est une expression des peuples, partout en Europe ». Des peuples qui ont peur. Peur de l'étranger, peur de ce que peut être un migrant. Peur pour leur identité. « La Slovaquie, selon les quotas établis, doit accueillir 900 migrants. Est-ce que son identité est menacée par 900 migrants ? » s'interroge M. Bertoncini.
Les nations issues du bloc soviétique (et de l'ex-Yougoslavie) sont les premières à faire défection à la solidarité européenne. Ces identités tchèques, hongroises, serbes sont encore récentes. Lorsqu'à la mi-décembre, le président tchèque Milos Zeman, ancien communiste, a déclaré en parlant des musulmans : « Dès qu'ils entrent en Europe, il se produit un choc entre deux cultures qui ne sont pas compatibles », c'est cette nation si durement acquise, après un demi-siècle de communisme, qui est perçue comme menacée.
Les comparaisons entre Bruxelles et Moscou n'ont d'ailleurs pas tardé. La Lettonie, par exemple, fait un parallèle entre l'imposition des quotas de migrants par l'UE et l'envoi de milliers de Russes dans les pays baltes au cours de la guerre froide. Yves Bertoncini appelle à la responsabilité des pays concernés : « Les pays d'Europe de l'Est devront reconsidérer l'ensemble de leurs devoirs et de leurs droits liés à leur appartenance à l'Union européenne. Beaucoup se rendront compte qu'ils ont beaucoup reçu et qu'ils ne veulent pas fondamentalement quitter l'Europe, et les avantages qui en découlent. »
La réactivation du groupe de Višegrad, c'est aussi la mise à mal de l'élargissement européen de 2004 aux pays de l'Est. M. Bertoncini demande de la patience : « Lorsque vous entrez dans un immeuble, vous pouvez avoir le droit d'y habiter, mais il vous faudra quand même du temps pour assimiler les règles de la copropriété. Il faut des épreuves pour les assimiler. » En témoigne la position de la Pologne, autrefois prise en exemple comme un succès d'intégration postsoviétique, et aujourd'hui menée par le positionnement farouchement antieuropéen et souverainiste de Jaroslav Kaczynski, chef du parti conservateur Droit et Justice (PiS).
À un moment où les dissensions se multiplient, où l'Allemagne (sa chancelière surtout) est plus seule que jamais, la naissance d'un groupe homogène, qui viole en toute impunité les indications de la Commission, ébranle comme jamais l'autorité de Bruxelles. Gagner l'adhésion des peuples tout en rappelant les devoirs que confèrent les droits, telle est la difficile équation de l'Union européenne.

 

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L'Union européenne a rarement aussi mal porté son nom. Face à la plus grave crise migratoire de son histoire, elle apparaît dans l'épreuve plus désunie que jamais. Lundi 7 mars, dans un sommet face à la Turquie à Bruxelles, elle devra pourtant faire front commun pour endiguer un flux non contrôlé, qui asphyxie une Grèce désemparée. L'enjeu principal réside dans l'adhésion des pays...

commentaires (4)

Sans oublier.... le Goulag !

ANTOINE-SERGE KARAMAOUN

10 h 24, le 05 mars 2016

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Commentaires (4)

  • Sans oublier.... le Goulag !

    ANTOINE-SERGE KARAMAOUN

    10 h 24, le 05 mars 2016

  • L'arrière cour. La cave. Les bougnouls. Loccicon va apprendre à gérer ses propres contradictions. Le tour de manivelle sera terrible.

    FRIK-A-FRAK

    10 h 14, le 05 mars 2016

  • "L’Est de l’Europe." ? Mais, 90% des Camps Nazis s'y trouvaient, et non à l'Ouest ! C'est tout dire....

    ANTOINE-SERGE KARAMAOUN

    09 h 41, le 05 mars 2016

  • ET ILS ONT RAISON ! QUI SAIT COMBIEN DE PRETENDUS REFUGIES SONT MEMBRES D,ORGANISATIONS TERRORISTES TOUT COMME DU REGIME SYRIEN ET SONT CAMOUFLES EN MIGRANTS FUYANT LA GUERRE ? DES BOMBES A RETARDEMENT POUR L,EUROPE OU L,ABRUTISSEMENT DEMOCRATIQUE NE CONNAIT PLUS DE BORNES...

    LA LIBRE EXPRESSION

    06 h 15, le 05 mars 2016

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