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Moyen Orient et Monde - Éclairage

Les enfants, victimes souvent oubliées de la crise des migrants

Des milliers de mineurs auraient disparu en Europe ces deux dernières années. Des mesures impératives s'imposent pour faire face à un phénomène qui va crescendo.

Plus d’un tiers des centaines de milliers de demandeurs d’asile qui entrent aujourd’hui en Europe seraient des mineurs, d’après l’Unicef. Sakis Mitrolidis/AFP

Les chiffres sont effrayants. Plus d'un tiers des centaines de milliers de demandeurs d'asile qui entrent aujourd'hui en Europe seraient des mineurs, d'après l'Unicef, qui avance le chiffre actuel de 36 %. En septembre 2015 encore, ils n'étaient que 27 %, d'après l'organisation onusienne, à faire le voyage seuls, alors qu'un million de migrants au moins (syriens, irakiens, et érythréens notamment) sont entrés en Europe en 2015. Depuis la noyade du petit Aylan Kurdi, dont la mort hypermédiatisée a – brièvement – suscité un tollé, également en septembre 2015, plus de 300 enfants sont morts noyés lors de naufrages, mais dans l'indifférence générale.

L'accueil de migrants est en outre de plus en plus contesté dans les pays principalement concernés, comme l'Allemagne ou la Grèce par exemple, ne serait-ce que pour le poids économique et/ou social qu'il semble représenter pour ces pays. De nombreux incidents criminels impliquant des étrangers n'ont pas contribué à plaider la cause de ces derniers. Et il y a quelques jours, un nouvel aspect du conflit syrien que tout un chacun essayait d'éluder a fini par rattraper la communauté internationale, soit le sort des enfants livrés à eux-mêmes, majoritairement originaires d'Afghanistan et ayant 14 à 17 ans.
Car de plus en plus de mineurs sont envoyés seuls en Europe, les familles n'étant souvent pas capables de réunir les sommes nécessaires pour envoyer plusieurs de leurs membres en même temps. Pire encore, les passeurs changent fréquemment le montant à payer pendant et après la traversée, retenant les demandeurs d'asile concernés en otage plusieurs mois durant (leur faisant souvent subir toutes sortes de sévices) jusqu'à ce que les familles se plient aux exigences des trafiquants et paient pour récupérer leurs proches. S'ils les récupèrent.

 

 

(Lire aussi : De plus en plus d’enfants parmi les migrants en Méditerranée, s’alarme l’Unicef)

 

Plus de 10 000 disparus ?
Dans des déclarations à l'hebdomadaire britannique The Observer, Brian Donald, un responsable d'Europol (agence de coordination policière européenne), a récemment affirmé que plus de 10 000 enfants auraient disparu ces deux dernières années une fois arrivés en Europe. La moitié au moins aurait disparu en Italie seulement, l'une des portes d'entrée sur le Vieux Continent par la Méditerranée.

Ces chiffres, qui demeurent une estimation approximative, proviennent des États membres d'Europol, d'ONG et d'autres organisations internationales, explique Alexandru Niculae, expert détaché auprès de l'agence policière européenne, interrogé par L'Orient-Le Jour. Il souligne également que ces milliers d'enfants ne seront pas nécessairement exploités à des fins criminelles, même si de très nombreux cas de mendicité forcée et/ou de prostitution ont été relevés. « Il est possible que certains aient rejoint des membres de leur famille », mais sans que les autorités ne soient au courant, avance-t-il.
Il faut également garder à l'esprit, souligne Bill Van Esveld de Human Rights Watch (HRW), interrogé lui aussi par L'Orient-Le Jour, que ces « disparus » font souvent partie des nombreux enfants enregistrés par les autorités, mais sans qu'il n'y ait eu de suivi, ou alors, ils n'ont tout simplement pas été enregistrés par les pays d'accueil, mal organisés et souvent pris de court.

Une autre explication à certaines de ces « disparitions » vient du fait que de nombreux mineurs gardent le silence sur leur âge réel jusqu'à leur arrivée à destination, et même après, vraisemblablement de peur d'être renvoyés. Ces enfants non accompagnés constituent de fait « le groupe le plus vulnérable du flot migratoire », a déclaré à l'Observer Raffaella Milano, directrice des programmes Italie-Europe de l'ONG internationale Save the Children. Et il n'en reste pas moins, selon Brian Donald, que des réseaux européens de trafic humain ont été repérés, sinon démantelés, notamment en Allemagne, en Suède et en Hongrie, destinations de choix de nombreux migrants. Ces réseaux, construits parallèlement à la montée des flots migratoires vers l'Europe, n'auront pas été difficiles à mettre en place, les pays européens n'ayant pas préparé comme il se doit l'arrivée massive de demandeurs d'asile.

 

(Lire aussi : « Il ne faut pas nourrir les réfugiés »)

 

« Zones de transit »
En outre, les enfants non accompagnés sont souvent détenus par les autorités du pays d'accueil, mesure qui ne devrait être utilisée qu'en « dernier recours », estime M. Van Esveld. Ce dernier dénonce au passage les conditions de détention de ces mineurs et le non-respect de leurs droits dans certains pays. « En France, par exemple, les mineurs peuvent être détenus, avec des adultes, dans des zones de transit pendant des périodes allant jusqu'à 20 jours, sans le droit d'aller au tribunal », indique-t-il.

Si quelques mesures pour traiter ce problème ont été adoptées par certains gouvernements et quelques ONG, elles restent cependant insuffisantes. Fin janvier, le gouvernement britannique a par exemple annoncé être prêt à prendre en charge des réfugiés mineurs ayant de la famille directe en Grande-Bretagne. Mais le plus important, pour M. Van Esveld, consisterait à la « mise en place de routes migratoires et de centres d'accueil sécurisés, et d'augmenter les occasions d'intégration/de réinsertion ». De cette manière, les passeurs seraient de moins en moins sollicités, et les demandeurs d'asile ne se sentiraient plus obligés de risquer leur vie dans des embarcations de fortune.

 

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