Exportation des déchets : Chinook hors-jeu

Le Conseil du développement et de la reconstruction (CDR) a annoncé vendredi que la compagnie britannique Chinook, chargée d'assurer l'exportation des ordures ménagères du Liban, n'a pas fourni les documents prouvant l'autorisation de la Russie à l'accueil de ces déchets, dans le délai accordé à la société par le gouvernement libanais, qui a expiré dans la journée. Un nouvel échec dans ce dossier qui a poussé plus tôt dans la journée le ministre de l'Agriculture, Akram Chehayeb à s'excuser auprès des Libanais.

Retour aux décharges?
N'ayant pas fourni les documents réclamés par les autorités libanaises, la compagnie Chinook perd son habilitation concernant l'exportation des déchets, option en passe d'être enterrée.
"Nous prendrons les mesures administratives afin de notifier à la compagnie Chinook l'annulation du mandat d'exportation des déchets qui lui a été fourni et régler la question des garanties bancaires", a ajouté le CDR.

Mardi, des déclarations en provenance de Moscou avaient évoqué une falsification des documents présentés par la compagnie britannique. Ce même jour, la Russie, que l'on pensait être depuis plusieurs semaines la destination des déchets à exporter, avait démenti par le biais d'un responsable de son ministère de l'Environnement avoir jamais donné son approbation à l'importation des déchets du Liban.

Jeudi soir, le Premier ministre Tammam Salam avait affirmé que la Russie avait exprimé sa volonté d'aider le Liban dans le traitement de la crise des déchets, citant des propos du chef de la diplomatie russe Sergueï Lavrov qui l'assurait qu'il n'y a pas eu de fraude dans ce dossier.
Le gouvernement avait affirmé dans la semaine qu'il aurait à nouveau recours à l'option des décharges sanitaires sur le territoire libanais, si Chinook venait à ne pas lui présenter les documents qu'il réclamait.

(Lire aussi : Exit l’exportation, rebonjour les décharges ?)

Chehayeb s'excuse
Vendredi, Akram Chehayeb, instigateur d'un premier plan de gestion des déchets, contesté par plusieurs collectifs sur l'ensemble du territoire, a présenté ses excuses à l'adresse des Libanais.
"Je m'excuse auprès du peuple libanais car nous ne sommes pas parvenus à obtenir des résultats dans le dossier des déchets", a déclaré M. Chehayeb lors d'un entretien télévisé accordé à la chaîne locale LBCI. "La balle est retournée dans le camp du Conseil des ministres", a-t-il souligné.

Le ministre des Affaires étrangères, Gebran Bassil, s'est de son côté prononcé dans la journée en faveur d'une nouveau plan de gestion des déchets, basé sur l'installation de décharges et d'incinérateurs sur le territoire libanais. "L'exportation des déchets était la pire des solutions", a estimé M. Bassil.
Il a ensuite détaillé son plan. "Les municipalités doivent prendre part à ce plan. Nous devons installer des décharges sur le court terme, et des incinérateurs sur le long terme", a-t-il expliqué, exprimant son opposition à un choix des lieux devant accueillir ces installations sur une base communautaire.

Le chef du Parti socialiste progressiste, Walid Joumblatt, a lui aussi estimé qu'il n'y a plus d'autres alternatives aux décharges sanitaires. "Après le nouvel échec de l'exportation, il est inévitable de retourner au plan essentiel, à savoir les décharges, afin de réduire l'impact sanitaire et environnemental qui ne cesse d'augmenter", a estimé le leader druze. "Il est nécessaire, aujourd'hui plus que jamais que toutes les forces politiques sans exception, la société civile et les municipalités, assument la totalité de leurs responsabilités au niveau de ce dossier (...)", a ajouté M. Joumblatt. "Toute tergiversation (...) aura des conséquences lourdes", a -t-il mis en garde.

"Nous réclamons des comptes" appelle à un sit-in
Enfin, le collectif de la société civile "Nous réclamons des comptes" a appelé vendredi à un sit-in qui se tiendra samedi à partir de 15h, place Riad Solh, dans le centre-ville de Beyrouth, dénonçant la façon dont la gouvernement a géré le dossier de l'exportation des déchets. "Nous sommes surpris par la façon dont le Premier ministre, Tammam Salam, a pris la défense de la compagnie britannique Chinook", a indiqué une porte-parole du collectif lors d'une conférence de presse, dénonçant "l'opacité de l'appel d'offres" remportée par la société. Le collectif a également accusé le ministre de l'Agriculture d'avoir enterré "toutes les solutions écologiques, sanitaires et peu onéreuses" proposées.

Jeudi soir, un autre collectif, "Vous puez !", né de la crise des déchets, avait demandé au Premier ministre de créer un comité d'urgence en vue d'élaborer un plan global du traitement des ordures ménagères au Liban, basé sur l'installation de centres de tri.

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