Rechercher
Rechercher

Nos Lecteurs ont la Parole - Louis INGEA

Insoumise sagesse !

Parce que tels sont les appétits et donc les lois de l'existence, moi, de la vie, je demande tout : le senti et le pressenti. Le pragmatisme et le rêve. Le flacon et son parfum. Les choses du monde, non pas d'à-côté, mais d'au-delà. Car rien de ce qui existe ne peut m'être étranger.
Je ne refuse ni la perspective des certitudes ni celle du doute. Je ne crains pas l'absurde, mais je le réfute et je ne fais confiance qu'à l'esprit. L'esprit est le générateur et le moteur de ce qui vit.
Or vivre, vibrer, se mouvoir, se développer, se cultiver, mûrir, produire, créer, marquer l'éternité d'un sceau définitif... tels sont pour moi les moments de l'unique filière à explorer afin de prendre conscience de ma propre existence.
Tout aussi bien, l'esprit ne va pas sans la chair qui l'enveloppe. Une chair qui constitue par ailleurs l'habitacle incontournable de toute personnalité humaine. Tour à tour adulée et négligée, la chair, avec les exigences de son instinct, aura occupé depuis toujours chez les vivants le devant de la scène. Et préoccupé du même coup l'esprit qui la régit.
Ainsi les hommes ont hésité sur l'importance à accorder à l'une comme à l'autre. Ils ont hésité à prendre parti pour l'une ou l'autre de leurs propres composantes. En même temps charnels et spirituels, gonflés de tendances apparemment opposées, ils se sentent, depuis l'apparition de l'homo sapiens, prisonniers d'un dilemme. Pour l'humanité devenue souffrante, le cheminement de la vie ne pouvait que trébucher devant un choix impossible à satisfaire, contraignant chacun à suivre, selon son option, soit le sentier étriqué des plaisirs et des déceptions en alternance, soit la pente montante, mais nébuleuse d'une promesse de bonheur insaisissable et perpétuellement remise en question.
Un défi et un pari ! Matière ou mystique. Jouissance ou sagesse. Science ou foi... Voilà le problème !
Nous remémorant les étapes qu'aura traversées le genre humain depuis son éclosion sur la planète, nous remarquons que son comportement a suivi durant trois périodes définissables trois lignes de conduite, en parallèle avec son développement sur le terrain.
La première de ces périodes, dans une atmosphère encore sauvage et primitive, ne pouvait que se braquer sur le volet physique de la configuration : le corps humain et ses besoins de survie. Une sorte de discipline à peine humanisée se calquant sur une vie encore végétative et voisine du règne animal.
Dans un deuxième temps, l'éveil de la conscience vient modifier le cours des choses. Le raisonnement et la logique se révèlent au grand jour et, avec eux, une vision plus spiritualisée de l'existence. Face aux obstacles de la nature et à la menace du phénomène-mort, l'idée de divinités présidant au destin de chacun fait son apparition et va mener l'humanité vers ce qu'on appellera la civilisation. Cette deuxième période, comme par un mouvement de ressac psychologique, gouvernera le monde jusqu'à la révélation, pour les esprits, d'une possibilité de réduire ces diverses divinités à un seul Dieu rassembleur et créateur universel.
Le couronnement de ladite étape, exceptionnelle par sa longueur et son message, sera, comme on le sait, consacré par l'avènement du judéo-christianisme.
Il est indéniable que l'impact de cette doctrine religieuse sur le monde réfléchi est de première importance par rapport au développement de la civilisation et des progrès matériels qui en découlèrent...
La troisième et dernière période est de loin la plus courte en ce domaine. À peine cinq ou six cents ans. Elle date de ce qu'on a appelé la Renaissance en Europe et continue de s'étendre jusqu'à nos jours. C'est une période de réaction parfaitement explicable contre la rigidité des principes qui gouvernèrent pendant si longtemps la conscience humaine. Car le volet spirituel – durant la deuxième période signalée plus haut – avait pris, ne l'oublions pas, toute la place. Les responsables de cette école de pensée, grisés par présence enfin reconnue d'une force divine créatrice et consciente de la marche du monde, se sont plongés, plus ou moins à leur corps défendant, dans une conception de plus en plus stricte des choses : règles, cultes, tabous, doctrines, dogmes visent à organiser dans le seul sens du salut éternel la vie et le comportement de chacun, au mépris des besoins du corps.
La séparation, voire l'opposition des concepts corps-esprit semble alors devenir une loi absolue qu'il ne pouvait être permis de dépasser.
Voilà pourquoi, à l'aube de la troisième période, qui poussa le monde à réaliser combien son labeur industrieux avait pris de l'avance, une réaction contre l'emprise d'un spirituel exigeant devenait possible. Et le phénomène, encore une fois, renversa l'échelle des valeurs pour remettre en avant celle des créations concrètes des hommes : valeurs d'esthétisme artistique et de techniques matérielles provoquant, avec une rapidité étourdissante, des progrès inouis dans le domaine de la science, du confort quotidien et des jouissances légitimes les plus variées.
Le prodigieux effet qui en résulte aura fini par estomper le lustre d'une spiritualité apparaissant désormais comme un facteur de blocage de tout avancement. Et l'humanité connut alors, depuis le XIXe siècle, les foudroyants progrès de la technique, de l'économie marchande, de l'informatique et de la recherche.
Nous en sommes aujourd'hui les témoins lucides et quelque peu décontenancés.
Il va sans dire que l'esprit, entre-temps, ne chôme pas, mise en veilleuse, la spiritualité, telle une onde impétueuse et souterraine, persiste dans le déploiement précieux de la pensée et s'acharne à réveiller à nouveau les consciences.
L'énoncé de notre problème est donc, à ce niveau, clarifié.
La réflexion se scinde actuellement selon deux courants : vie spirituelle et vie de réalisations matérielles. Chacun fait son choix. Il y a ceux qui divinisent l'homme, lui accordant le mérite de tout ce qui se crée sur terre et ceux qui persistent à faire crédit au domaine spirituel, considérant que les fruits produits en ce monde ne sont que le reflet d'une volonté divine sous-jacente.
Les attitudes, par conséquent, se crispent et nous voici, tous confondus, devant le dilemme cosmique de deux mondes : celui, brillant et périssable, de la chair, et l'autre d'une spiritualité forcément éternelle puisque non saisissable...
Qu'est-ce à dire ? Sinon une lutte sans fin et sans merci entre la réalité concrète et la foi. Chacun y va de ses arguments et avance ses pions. Voilà où nous en sommes !
Je ne suis pas de ceux qui pensent que nous pouvons nous arrêter là et subir. À ce stade, la seule possibilité prévisible reste la synthèse des deux courants susmentionnés. Parce que rien ne peut stagner en matière de système-vie. Parce que rien ne peut se mettre en travers d'une idée, même et précisément si elle nous était dictée par le potentiel psychique de nos cerveaux. Parce que la recherche de la lumière, c'est-à-dire de la compréhension, est le seul critère d'un cosmos qui n'est plus néant. Parce que l'esprit individuel, assoiffé de vérité, n'aura de cesse qu'au moment où se dévoilera son but face à l'esprit central de l'univers. Là, le ressenti est plus fort que tout calcul.
S'engager est un mouvement continu qui, sorti du néant, ne peut que viser l'être. Le contraire serait une absurdité. J'ai déjà souligné que je la réfutais. La symbiose et l'osmose de nos facultés existentielles ne peuvent avoir qu'une issue.
La sagesse, avec ou sans morale, est le seul salut possible pour la race des hommes.

Louis INGEA

Parce que tels sont les appétits et donc les lois de l'existence, moi, de la vie, je demande tout : le senti et le pressenti. Le pragmatisme et le rêve. Le flacon et son parfum. Les choses du monde, non pas d'à-côté, mais d'au-delà. Car rien de ce qui existe ne peut m'être étranger.Je ne refuse ni la perspective des certitudes ni celle du doute. Je ne crains pas l'absurde,...

commentaires (2)

L'ABRUTISSEMENT DANS LE MONDE RÊVE... SOUHAITE... S'APPROPRIE... INGURGITE... EXPLOITE... ET MARCHE SUR LES CORPS...

LA LIBRE EXPRESSION

19 h 36, le 01 décembre 2015

Tous les commentaires

Commentaires (2)

  • L'ABRUTISSEMENT DANS LE MONDE RÊVE... SOUHAITE... S'APPROPRIE... INGURGITE... EXPLOITE... ET MARCHE SUR LES CORPS...

    LA LIBRE EXPRESSION

    19 h 36, le 01 décembre 2015

  • La Sagesse ne peut tout de même pas compléter ses "thèses sages" à l'aide de ses thèses encore inédites. Selon elle, les "gens" doivent interpréter dans le sens de l'avenir non seulement son "calme", mais toute contestation à caractère "sage". Afin que le "peuple", après avoir pris connaissance de la "littérature" de cette bonne sagesse n'oublie jamais le mot calme et ne méconnaisse plus jamais le caractère "sage" de la contestation, elle proscrit tout terme de révolte et solennellement répète le terme sage. Il n'est plus question de "mouvement" mais de "calme". Après avoir servi de victime expiatoire pour les impétueux, le "sage" sert maintenant de victime expiatoire pour les turbulents en "tout genre !". On lance deux formules à son sujet : une fois on le traite de "sage", mais deux fois de "très sage". Le bon sage se flatte même de l'espoir que les locutions banales qui ont circulé au sein de "son école sagesse" ; notamment dans ses purs propres dires ; toucheront enfin au terme de leurs pérégrinations étant donné l'état d'épuisement dans lequel on va les trouver. Il redoute l'épuisement de la "sagesse" et la dissolution de cette sorte de "sagesse-calme", mais espère de même être délivré de cette "sagesse-niaise" ! Le sage jetterait un jour à bas ses propres dieux ; ceux qu'il a si longtemps adorés : la "Sagesse et le Calme" ; en déclarant que ce ne sont là que les "idoles" d’une ex-niaiserie. À la grâce du dieu "Sage" !

    ANTOINE-SERGE KARAMAOUN

    09 h 09, le 01 décembre 2015

Retour en haut