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Culture - Entretien

Olivier Py : Le théâtre est la forme artistique la plus politique

En partenariat avec la compagnie Zoukak, « La jeune fille, le diable et le moulin » sera jouée au Monnot ce soir et demain. Entretien avec le metteur en scène de la pièce et directeur du Festival d'Avignon.

Olivier Py dans la cour du palais des Papes à Avignon. Photos Christophe Raynaud de Lage

La mort, le diable, l'amour, la guerre et l'oubli. Voici les périlleux thèmes développés dans La jeune fille, le diable et le moulin, pièce mise en scène par Olivier Py, qui conserve (seulement) la trame narrative de La jeune fille sans mains des frères Grimm. Présentée par l'Institut français du Liban en collaboration avec Zoukak et Zoukak Sidewalks, la pièce dépeint un parcours initiatique, sans mièvreries.

Comment avez-vous collaboré avec la compagnie Zoukak ?
J'ai rencontré les membres de Zoukak à plusieurs reprises, je les ai trouvés passionnants et nous avons vite sympathisé. La première fois, ce n'était pas au Liban, mais en Égypte pour un atelier qui avait lieu au Caire en 2008. Nous nous sommes ensuite croisés à plusieurs reprises à Paris et à Lyon avec Omar Abi Azar. Il travaillait alors avec Nathalie Garraud (NDLR: les metteurs en scène libanais et française se connaissent depuis 2004, année de leur rencontre à Beyrouth). Étant donné que j'ai aussi collaboré avec Nathalie, une sorte de petite communauté franco-libanaise s'est constituée ainsi et j'y suis très attaché.

Pourquoi avoir choisi d'adapter « La Jeune fille sans mains » et non un autre conte des frères Grimm ?
Pour moi, tous les textes de Grimm sont fondamentaux. J'ai choisi celui-là en particulier, car il est le plus violent. Il aborde les violences faites à l'enfant et aux jeunes filles. Le sujet comme le texte sont très durs, mais restent formellement accessibles aux enfants, avec une fin heureuse. Le texte aborde le traumatisme sans être traumatique. Aussi, comme beaucoup de contes de Grimm, la résilience est très présente. Il y a un choc dans un premier temps, puis le personnage arrive à retrouver sa joie de vivre, le bonheur et son destin. Selon moi, la seule différence entre un spectacle tout public et celui pour adultes, c'est qu'il faut adresser un message d'espoir aux enfants. Je tenais à cela.

Quelle a été la difficulté de cette adaptation ?
Il n'y a pas un mot de Grimm dans l'adaptation. Il y a très peu de dialogues dans leurs contes, or en général une pièce de théâtre est faite de dialogues. Alors tout est à écrire, il y a le synopsis mais si l'on veut en faire une forme dramatique, tout est à imaginer de A à Z. Je l'ai écrit il y a plus de vingt ans, c'est le premier qui a été publié (en 1995), pourtant j'y reviens toujours.

Pourquoi les textes des frères Grimm restent aussi contemporains ?
Ils sont d'une extrême simplicité, leur synopsis tient en deux ou trois pages. Aussi, leurs contes touchent à l'inconscient collectif. Il y a une forte universalité dans ces écrits et c'est ce qui les rend absolument transnationaux.

Votre pièce est présentée dans le cadre de «La belle saison au Liban». L'initiative a pour but de présenter la scène contemporaine au jeune public. Est-ce qu'il y a une manière de parler spécifiquement aux enfants ?
Chaque artiste a sa propre méthode pour s'adresser au jeune public et il n'y a pas d'interdiction sur la longueur. Par contre, on ne peut pas être ennuyeux, le spectacle se doit d'être puissant, beau et ludique. Il y a un vrai devoir d'exigence, car c'est peut-être le premier spectacle qu'ils verront: cela peut fonder une vocation théâtrale, la passion de la culture ou de la vie
spirituelle.

Même face aux pires événements, à Beyrouth comme à Paris la semaine dernière, le théâtre a-t-il le devoir de résister quoi qu'il arrive ?
Bien évidemment ! Fermer les théâtres n'est pas une bonne initiative. Je pense qu'il faut jouer, sinon les terroristes auront gagné. Le théâtre est l'art le plus politique, car il mêle la prise de parole et le texte. Pour qu'une société soit démocratique, il faut que les théâtres restent ouverts, c'est toujours un signe très fort.

« La jeune fille, le diable et le moulin », mis en scène par Oliver Py, représentations au théâtre Monnot aujourd'hui vendredi 20 novembre 2015 à 19h et le 21 novembre à 15h et 19h. Tarifs : 40 000 LL/25 000 LL (réduit).

 

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