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Moyen Orient et Monde - Conflit

Poutine entame sa « guerre sainte » en Syrie

Doutes occidentaux sur les cibles visées ; l'approche russe « tournera mal » si elle se fixe pour unique objectif de défendre le régime Assad, avertit le chef du Pentagone.

L'aviation russe a mené hier ses premiers bombardements en Syrie à la demande du président Bachar el-Assad, mettant la communauté internationale, non prévenue, devant le fait accompli.
L'aviation russe affirme avoir procédé à des « frappes de précision », détruisant notamment des « équipements militaires », des moyens de communication et des « stocks d'armes et de munitions » de l'État islamique (EI). La télévision officielle syrienne a confirmé que les frappes russes avaient eu lieu dans les provinces de Hama (nord-ouest) et Homs (centre), tandis que l'armée syrienne a mené un raid dans la région de Lattaquié (nord-ouest).

Mais selon Rami Abdel Rahmane, directeur de l'Observatoire syrien des droits de l'homme (OSDH), les frappes ont visé dans la province de Homs, des centres de commandement du Front al-Nosra, branche syrienne d'el-Qaëda, et son puissant allié islamiste Ahrar al-Cham, ainsi que d'autres petits groupes rebelles locaux. Dans la province de Hama, les avions ont frappé un dépôt d'armes de « l'Armée al-Izza », un groupe rebelle soutenu par des pays arabes et les Américains à Latamina et des positions des rebelles islamistes et d'al-Nosra. Mais, a-t-il ajouté, les frappes contre les localités de Rastane, Talbissé et Zaafarana dans la province de Homs n'ont tué que cinq combattants contre 27 civils et des dizaines de blessés.

Pour sa part, un responsable de la Défense civile dans la région de Homs, Abdelmoneim Esteif, a déclaré à l'AFP via Internet que « 43 civils avaient été tués dont 6 enfants et plus de cent blessés » par les frappes russes sur Talbissé, Rastane, Zaafarana et Makramiyé. Il a en outre fait état de plusieurs énormes incendies provoqués par les raids. Selon un militant, Ahmad, ayant pris part aux secours des victimes des raids dans la région au nord de la ville de Homs, les frappes ont visé les civils. « Plus de 50 maisons ont été totalement détruites par les raids aériens sur Talbissé, où 22 personnes ont été tuées. » Le bombardement de Rastane a visé selon lui un marché de légumes et de fruits et tué 8 personnes dont 4 enfants.

 

(Repère : Les groupes présents dans les zones visées par les frappes russes en Syrie)



Selon le chef de l'opposition syrienne en exil, Khaled Khoja, les frappes de Homs ont tué 36 civils « innocents » dans « des zones qui ont combattu » les jihadistes de l'EI. « Les Russes ont choisi ces régions parce que ce sont des régions où le régime de Bachar a subi des défaites », a expliqué à l'AFP le politologue libanais Ziad Majed. « Daech (acronyme arabe de l'État islamique) n'a aucune présence à Lattaquié et Hama et a une présence limitée à Homs. Manifestement, les Russes ciblent plus Jaish al-Fateh (Armée de la conquête, une coalition d'islamistes) et des zones de l'Armée syrienne libre (ASL) que Daech », a-t-il ajouté.

Doutes sur le choix des cibles
Il n'aura pas fallu longtemps pour que la France, puis les États-Unis, émettent des doutes et des réserves sur le choix des cibles choisies par l'armée russe. Il y a « des indications selon lesquelles les frappes russes n'ont pas visé Daech », a déclaré à New York le chef de la diplomatie française Laurent Fabius, ajoutant qu'il « faudrait vérifier quels étaient les objectifs » des avions russes. « Ce n'est pas sur Daech qu'ils (les Russes) ont frappé, c'est sans doute sur les groupes d'opposition, ce qui confirme qu'ils sont davantage dans le soutien au régime de Bachar el-Assad que dans la lutte contre Daech », a également affirmé une source diplomatique française sous couvert d'anonymat.

À Washington, le secrétaire américain à la Défense Ashton Carter a lui aussi estimé que les frappes ne visaient probablement pas l'EI. « Il semble qu'elles étaient dans des zones où il n'y avait probablement pas de forces de l'État islamique », a-t-il dit. L'approche russe « tournera mal » si elle se fixe pour unique objectif de défendre le régime de Bachar el-Assad, a-t-il averti. Washington est disposé à accueillir favorablement les bombardements russes s'ils visent « réellement » l'EI, a indiqué de son côté le secrétaire d'État américain John Kerry.

 

(Repère : Les armes déployées par la Russie en Syrie)


Une « guerre sainte »
L'engagement militaire russe en Syrie s'inscrit dans le cadre d'une « guerre sainte » contre le terrorisme, a estimé pour sa part l'Église orthodoxe russe. « Le combat contre le terrorisme est une guerre sainte et aujourd'hui, notre pays est peut-être celui qui le combat le plus activement », a déclaré le porte-parole de l'Église orthodoxe russe, Vsevolod Tchapline, cité par l'agence Interfax. Dans un communiqué, le patriarche orthodoxe Kirill a lui aussi apporté son soutien aux frappes russes en Syrie. « La Russie a pris une décision responsable en utilisant ses forces armées pour défendre le peuple syrien frappé par le malheur », a-t-il déclaré. Le patriarche a assuré prier « pour que ce conflit local ne devienne pas une grande guerre, que l'usage de la force n'entraîne pas la mort de civils et que toutes les troupes russes rentrent à la maison en vie ». L'un des principaux représentants de la communauté musulmane de Russie a lui aussi apporté son soutien à l'engagement militaire russe en Syrie. « Nous soutenons totalement l'utilisation des forces armées russes dans la lutte contre le terrorisme international », a déclaré à l'agence Ria-Novosti le grand mufti de Russie, Talgat Tadjouddine.

Moscou, au centre du jeu
L'accélération de l'engagement de Moscou s'inscrit sur fond de bras de fer entre le président américain Barack Obama et son homologue russe sur le sort à réserver à Bachar el-Assad, « tyran » pour l'un et rempart contre l'EI pour l'autre. La Russie intervient aussi loin de son territoire pour la première fois depuis 36 ans : en 1979, il s'agissait pour les troupes soviétiques d'envahir l'Afghanistan. Elle rappelle ainsi qu'elle est un soutien indéfectible au président syrien, toujours au pouvoir après plus de quatre ans d'une guerre qui a fait plus de 240 000 morts. « Le seul moyen de lutter efficacement contre le terrorisme international – en Syrie comme sur les territoires voisins – (...) est de prendre de vitesse, de lutter et de détruire les combattants et les terroristes sur les territoires qu'ils contrôlent et ne pas attendre qu'il arrivent chez nous », a résumé hier Vladimir Poutine.

(Lire aussi : Quelle est exactement la position de Poutine sur la Syrie ?)

 

Appel au compromis
L'homme fort du Kremlin a parallèlement appelé Bachar el-Assad au « compromis » avec l'opposition tolérée par le régime. « Le règlement définitif et durable du conflit en Syrie n'est possible que sur la base d'une réforme politique et d'un dialogue avec les forces saines du pays », a-t-il déclaré, ajoutant que le président syrien était « prêt à un tel processus ». Il a en outre affirmé que les bombardements étaient conformes au droit international puisqu'ils répondaient à une demande d'aide militaire formulée par la présidence syrienne, qui a confirmé qu'une lettre en ce sens avait été envoyée par Bachar el-Assad, à défaut d'une résolution à l'Onu. Le président russe a également confirmé que le dispositif ne concernait que des frappes aériennes en soutien aux forces gouvernementales, excluant ainsi l'engagement de troupes au sol.
Parallèlement, Vladimir Poutine a cherché, y compris lundi à la tribune de l'Onu, à convaincre la communauté internationale de former une « large coalition antiterroriste » contre l'EI, incluant Damas et Téhéran. Le président américain Barack Obama, qui mène sans grand succès depuis un an une vaste campagne contre le groupe jihadiste, ainsi que le président français François Hollande ont rejeté cette idée et insistent sur la nécessité d'un « nouveau dirigeant » à Damas.

 

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commentaires (3)

la russie intervient sans l accord de l onu pour sauver un dictateur responsable de centaines de milliers de morts et millions de deplaces et accuse de crime contre l humanite.....bien pire que l expedition americaine en irak qui a au moins abouti a la fin d un dictateur.....et l on aura les memes consequences qu en irak....plus de chaos et de morts en syrie,l EI plus populaire que jamais,et des attentats terroristes a moscou.

HABIBI FRANCAIS

10 h 10, le 01 octobre 2015

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Commentaires (3)

  • la russie intervient sans l accord de l onu pour sauver un dictateur responsable de centaines de milliers de morts et millions de deplaces et accuse de crime contre l humanite.....bien pire que l expedition americaine en irak qui a au moins abouti a la fin d un dictateur.....et l on aura les memes consequences qu en irak....plus de chaos et de morts en syrie,l EI plus populaire que jamais,et des attentats terroristes a moscou.

    HABIBI FRANCAIS

    10 h 10, le 01 octobre 2015

  • ON A DIT QUE L,OURS JOUE A LA ROULETTE RUSSE ! CONTRAIREMENT AUX AUTRES IL MONTRE DE LA DECISION ET DE LA FERMERTE... MAIS PROBABLEMENT AUSSI IL S,EMBOURBE DANS UN SECOND AFGHANISTAN !

    LA LIBRE EXPRESSION

    09 h 08, le 01 octobre 2015

  • A quand les prochaines "frappes" des islamistes à Moscou et en Russie ?

    ANTOINE-SERGE KARAMAOUN

    06 h 45, le 01 octobre 2015

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