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Moyen Orient et Monde - Analyse

Washington dans l’obligation de « travailler » avec Moscou

Après les discours des grandes puissances devant l'Assemblée générale des Nations unies, une « convergence minimale » rassemble les Américains, les Russes et la majorité des Européens.

Le président russe Vladimir Poutine. Ria-Novosti/Alexei Nikolsky/AFP

La présence militaire russe massive en Syrie accrédite l'idée d'un redéploiement géostratégique d'un pays en phase de puissance ascendante. Les rivalités aiguës entre Washington et Moscou qui se sont bruyamment extériorisées au début de la crise ukrainienne il y a un an et demi ont laissé place à une convergence tactique ponctuelle sur l'échiquier syrien. Lundi, Barack Obama a ainsi accepté de discuter avec le président russe et s'est dit prêt à « travailler » avec Moscou et Téhéran pour amorcer la voie d'une solution négociée en Syrie. Si les États-Unis restent intransigeants quant à l'idée d'une coopération avec le régime de Bachar el-Assad pour neutraliser le groupe État islamique (EI), une réunion du « groupe de contact » diplomatique incluant Washington, Moscou, Téhéran, Le Caire, Riyad et Ankara devrait néanmoins se tenir en octobre à Genève, pour aborder les perspectives de règlement de la question syrienne. Ces évolutions sont d'abord liées au déploiement russe en Syrie et à l'évolution des rapports de force sur le terrain.

Motivations de Moscou
Cette officialisation de l'engagement russe en Syrie recouvre deux explications. Premièrement, il est apparu impératif pour Moscou de se prémunir contre le risque d'un effondrement général de la situation en Syrie. Face au renforcement de la pression sur les forces du régime (front Nord-Ouest), l'implication directe de la Russie vise à empêcher une évolution décisive des rapports de force. Pour Michel Goya, ancien colonel de l'armée française, conseiller du chef d'état-major des armées et analyste des conflits actuels, un retournement de situation aurait constitué une menace imminente pour Homs et Lattaquié : « L'implication directe est un signal fort qui réaffirme les priorités de Moscou », selon l'expert. Pour la Russie, il s'agit avant tout de maintenir le régime de Bachar el-Assad, la cohésion territoriale et politique stato-nationale de la Syrie afin d'éviter que ne se répètent les chaos afghan, somalien, irakien, libyen et yéménite.


(Lire aussi : L'aviation russe frappe pour la première fois en Syrie)


Pour Pierre Conessa, ancien haut fonctionnaire au ministère français de la Défense, historien et auteur notamment de La fabrication de l'ennemi, au-delà « d'une intervention militaire pour redresser la situation politico-militaire de la Syrie à un moment où Assad semblait à bout de souffle », il y a surtout la volonté russe de se présenter comme « acteur incontournable dans l'évolution et la recherche d'une solution en Syrie ». « Contrairement à la position absurde de la France il y a deux ans, tout le monde considère aujourd'hui une solution à la crise en Syrie doit impliquer la Russie et l'Iran », affirme Conessa. L'analyste rappelle également l'importance pour Moscou à travers cette intervention de conforter son option diplomatique selon laquelle il n'y a « pas de solution sans Bachar el-Assad ».

Révisions déchirantes
Laisser ce bénéfice à la Russie est problématique pour Washington, contraint d'opérer des révisions déchirantes. En l'absence d'une alternative réelle et crédible, les États-Unis n'ont aucun intérêt à un effondrement de la situation dans le Nord syrien qui entraînerait l'extension des foyers d'instabilité à l'ensemble du territoire. La convergence tactique ponctuelle vise donc à stabiliser la situation et endiguer l'EI qui incarne une menace transnationale dès lors qu'il dispose de cellules dormantes, y compris dans les pays qui ont soutenu sa formation et sa progression. Mais surtout dans un contexte où les États-Unis se retrouvent privés d'alliés sur le terrain, ils perdent les moyens d'imposer une autre orientation.

 

(Lire aussi : Quelle est exactement la position de Poutine sur la Syrie ?)

 

D'après Pierre Conessa, c'est d'abord le constat de l'échec de la stratégie militaire occidentale qui prévaut. Sur les un demi-milliard de dollars dépensés par Washington pour mettre sur pied une force d'opposition « modérée », cette force ne compte plus aujourd'hui parmi ses rangs que 5 combattants, un résultat déconcertant. Il souligne également les limites d'une coalition internationale contre l'EI qui laisse les États arabes à la marge. Dans cette coalition qui compte une soixantaine de pays, seul un cinquième prend part effectivement aux opérations, alors que la majorité s'en tient à un appui logistique ou financier. « Le président russe Vladimir Poutine est le seul à réclamer la participation effective des pays arabes à la coalition, tandis que les Occidentaux refusent d'aborder cette question. »

De son côté, Michel Goya note que les États-Unis n'ont pas le choix, les Russes poursuivant une politique du fait accompli qui prend place dans une stratégie géopolitique plus globale : « On se prépare, on avance ses pions, pour se poser comme interlocuteur incontournable sur le dossier syrien avec la possibilité de monnayer ses gains en Syrie sur le terrain ukrainien. » Cette position s'inscrit donc dans le cadre plus général d'une stratégie de mise à profit des crises pour réaffirmer le rôle international de la Russie. La présence russe sur le terrain pourrait consacrer la prééminence des orientations de Moscou, ce qui encouragerait Washington à jouer des contradictions existantes sur le terrain en Syrie. Mais en l'absence d'alternative, et à ce stade des évolutions, la coopération active avec la Russie est inévitable.

 

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commentaires (5)

Observez bien le regard de Poutine sur cette photo !! Qui peut lui faire confiance ? Il n'y a que le petit Hitler, par obligation, qui lui accorde sa confiance Poutine n'a pas besoin d'aller sur place pour connaître la situation désastreuse d'Assad !!!! Attendons les résultats de cette aventure

FAKHOURI

20 h 55, le 01 octobre 2015

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Commentaires (5)

  • Observez bien le regard de Poutine sur cette photo !! Qui peut lui faire confiance ? Il n'y a que le petit Hitler, par obligation, qui lui accorde sa confiance Poutine n'a pas besoin d'aller sur place pour connaître la situation désastreuse d'Assad !!!! Attendons les résultats de cette aventure

    FAKHOURI

    20 h 55, le 01 octobre 2015

  • hahaha allez voire sur place ! comme si les services d'intelligence russe sont la pour chasser les mouches lool tout le monde sait tres bien tout

    Bery tus

    14 h 26, le 01 octobre 2015

  • Poutine a ete tres fin stratege politico militaire . Il ne s'est pas laisse endormir par les volte face occicon , et a prefere aller voir sur place comment tout ce petit grouillis de "moderes" ou de brutes n'etaient que des pions entre les mains des occicon, dan une partition que Poutine vient de demasquer en frappant la ou ca fait le plus mal .

    FRIK-A-FRAK

    09 h 24, le 01 octobre 2015

  • DANS LE JEU DES PACHIDERMES LE MASTODONTE SE VOIT REDUIT A SUIVRE L,OURS... QUELLE FIN PITOYABLE !

    LA LIBRE EXPRESSION

    09 h 12, le 01 octobre 2015

  • Les US cherchent à les embourber comme en Afghanistan ! Ce fut le dernier acte de Brejnev ; et ce sera le dernier du Nain poutinien actuel !

    ANTOINE-SERGE KARAMAOUN

    07 h 00, le 01 octobre 2015

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