Moscou et Washington vont continuer à se parler pour trouver un compromis dans le dossier syrien, a déclaré mardi le chef de la diplomatie russe Sergueï Lavrov à l’Onu, après la rencontre Obama-Poutine. Timothy A. Clary/AFP
La Russie et les États-Unis vont continuer à se parler pour trouver un compromis dans le dossier syrien au lendemain d'une rencontre à New York où Barack Obama et Vladimir Poutine ont étalé leurs divergences concernant le sort à réserver à Bachar el-Assad.
Lundi soir, à l'issue d'un entretien d'environ 90 minutes qui avait débuté par une poignée de main glaciale, le président russe a évoqué un entretien « constructif, étonnamment ouvert », avec son homologue américain et parlé d'une possible coopération.
Le chef de l'État russe a assuré que le « travail commun » entre les États-Unis et la Russie devait être renforcé, disant réfléchir à la « mise en place de mécanismes appropriés ». Son chef de la diplomatie russe Sergueï Lavrov a ensuite évoqué dans une interview à la télévision russe « des discussions entre les ministères de la Défense, entre les ministères des Affaires étrangères », afin de « rendre notre objectif commun (...), la destruction de l'État islamique, plus réalisable ». « Le dialogue avec les Américains va se poursuivre de manière intensive dans les plus brefs délais », a renchéri le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov, tout en précisant que Washington avait refusé de rejoindre le centre d'échange de renseignements militaires mis en place à Bagdad par l'Irak, la Russie, l'Iran et la Syrie pour combattre l'EI.
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Si le président russe n'a pas exclu des frappes de son aviation, il a écarté l'envoi de troupes au sol pour lutter contre les jihadistes de l'EI, mettant plutôt en avant sa volonté « d'aider davantage l'armée syrienne ».
De son côté, le secrétaire d'État américain John Kerry a déclaré hier que la Russie et l'Iran, alliés de la Syrie, pourraient persuader le président Assad de cesser de bombarder son propre peuple. « Ils sont tous les deux en position de pouvoir décider d'empêcher Assad de balancer des barils de bombes, en échange peut-être de quelque chose que nous pourrions faire », a déclaré M. Kerry, sans être plus précis.
Assad le « tyran »
Lundi, Vladimir Poutine et Barack Obama avaient affiché leurs désaccords au grand jour à la tribune de l'Onu, s'accusant mutuellement d'avoir contribué aux tensions dans la région. Le président américain, dans un discours centré sur la force de la diplomatie, exemples de l'Iran et de Cuba à l'appui, avait clairement indiqué qu'il fallait se préparer à tourner la page Assad : « Après tant de sang versé et de carnages, il ne peut y avoir un retour au statu quo d'avant la guerre. » Et dans une référence claire à Moscou, il a dénoncé la logique consistant à soutenir un « tyran » qui massacre des enfants innocents « sous prétexte que l'alternative "serait pire" ».
Pour M. Poutine, à l'inverse, le dirigeant syrien représente un gouvernement légitime avec lequel refuser de coopérer serait une « énorme erreur ». « Nous devons reconnaître que personne d'autre que les forces armées du président (syrien) ne combat réellement l'État islamique », a lancé le chef du Kremlin qui faisait son grand retour à l'Assemblée générale de l'Onu après dix ans d'absence. Un peu plus tard, les deux hommes se réunissaient, pendant une heure trente, pour la première fois en plus de deux ans.
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« Volonté partagée »
Au lendemain de cette rencontre Obama-Poutine, les divergences restent nombreuses entre Russes et Occidentaux sur les moyens de mettre un terme à une guerre qui a déjà fait plus de 240 000 morts. Preuve des tensions persistantes avec les Occidentaux, le chef du Kremlin n'avait pas résisté à la tentation de tacler Barack Obama et François Hollande : « J'ai le plus grand respect pour mes homologues américain et français, mais ils ne sont pas des ressortissants syriens et ne doivent donc pas être impliqués dans le choix des dirigeants d'un autre pays. »
En écho aux propos du président russe, un responsable américain a décrit une « volonté partagée » de trouver des réponses face à la guerre en Syrie qui a provoqué une crise migratoire sans précédent, mais a constaté un réel désaccord sur l'issue d'un éventuel processus de transition politique.
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Parallèlement, M. Hollande, qui a annoncé dimanche la première frappe de la France contre l'EI en Syrie, a lui aussi réaffirmé lundi, sans avancer de date, que la transition en Syrie passait par le départ du président syrien. En Syrie, « on ne peut pas faire travailler ensemble les victimes et le bourreau », a-t-il déclaré à l'Onu, excluant ainsi M. Assad d'une solution politique au conflit.
De son côté, le Premier ministre britannique David Cameron, dans une interview au Wall Street Journal, s'est dit ouvert à une collaboration avec la Russie pour vaincre l'EI tout en répétant que soutenir le président syrien, comme le fait Moscou, « ne pourrait mener à la paix et à la stabilité dans la région ».
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Commentaire
Plus de temps à perdre en Syrie
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commentaires (5)
Il n'y aura aucun compromis de la part d'Obama HUSSEÏN 1er ! Bien au contraire, il cherchait à mouiller en Syrie le Nain poutinien, et il y est parvenu !
ANTOINE-SERGE KARAMAOUN
11 h 52, le 01 octobre 2015