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Culture - Cimaises

« Les tisseurs d’eau » des longs fleuves colombiens

Le liquide ne leur file jamais entre les doigts et devient un magnifique matériau au service d'une talentueuse inspiration.

Fibres teintes avec des couleurs tirées des plantes.

Les tisseurs d'eau, faiseurs d'une culture des fleuves colombiens  : voilà le thème d'une exposition que donne à voir le Musée d'art des Amériques de Washington.
Ils sont une quinzaine d'artistes colombiens contemporains, faisant corps avec leur environnement, dominé par les grandes voies d'eau dont ils ont fait un outil conceptuel, à travers leurs différentes disciplines : installations, vidéos, dessins, céramiques, textiles, meubles. Il y a de la magie dans ces œuvres pétries de poésie, de politique, de quotidien et de souci écologique.
Le curateur de l'exposition, José Roca, originaire de ce pays, conseille aux visiteurs de ne pas apporter avec eux « trop de cérébralité et d'insistance à tout comprendre, mais d'expérimenter les visions avec tout le corps ». Alors, immersion sensorielle totale dès l'entrée où l'on passe sous des fibres groupées en écheveaux et suspendues (l'ensemble intitulé Couleur de l'Amazonie) suggérant des touffes d'herbes mousseuses jaunes, oranges et marron. Cette palette est le résultat d'une étude, d'une durée de sept ans, sur les pigments dérivés de plantes de forêts tropicales.

Un fleuve pas toujours tranquille
Plus loin, une vidéo projette les images d'un cours de rivière tranquille dont la brillante surface reflète ciel et nuages. Soudain, un coup de feu retentit et le ricochet d'une balle forme un jet d'eau. Pas si tranquille, ce fleuve du pays des cartels et autres réminiscences. Des promeneurs qui le sillonnent expriment, parfois, par des coups de feu, leur joie d'être ainsi au fil de l'eau.
L'environnement naturel de la Colombie est omniprésent chez ces artistes, même quand ils utilisent les matériaux les moins purs. Ainsi, cet immense panneau intitulé Lumière blanche, d'où tombe une cascade d'eau ondulante et scintillante, tissée à partir de fils tirés de sacs en plastique. Toujours dans le domaine du recyclage, des artisans indigènes ont utilisé la technique de tissage traditionnel pour faire des abat-jour, soutenus par une carcasse taillée dans des bouteilles en plastique.

Le Rio Magdalena de Marquez
Et retour au naturel (qui revient au galop) avec une chaise trônant au beau milieu de la salle, sculptée dans les racines de différents genres de bambous qui poussent sur les rives du fleuve Cauca. Elle tend les bras au visiteur. Cela tombe bien, car il est indiqué qu'on peut s'y asseoir, « pour mieux la jauger ».
L'idée des tisseurs d'eau a été soufflée à José Roca par la galerie d'art new-yorkaise Bard Graduate Center qui lui a enjoint d'organiser une exposition de son choix. Le curateur avait remarqué que l'art et le design colombiens étaient thématiquement marqués par les fleuves et le tissage. Une conjugaison pratiquée avec maestria par ses contemporains, toujours sensibles à l'appel de l'eau. Il leur a donc fait prendre le grand large.
Le fin mot de cette navigation sur les flots de l'art colombien est laissé à l'un de ses plus grands représentants, Gabriel Garcia Marquez. Une vidéo met en scène le Rio Magdalena qu'il aimait tant. L'auteur l'avait connu dans son enfance et, avec le temps, il le retrouve tout autre, moins sauvage, charriant des déchets et roulant dans un cadre « déforesté ». « L'un des plus grands fleuves n'était plus qu'illusion et mémoire », avait-il écrit dans L'Amour au temps du choléra.
Comme un fil ténu entre le passé et le présent...

Les tisseurs d'eau, faiseurs d'une culture des fleuves colombiens  : voilà le thème d'une exposition que donne à voir le Musée d'art des Amériques de Washington.Ils sont une quinzaine d'artistes colombiens contemporains, faisant corps avec leur environnement, dominé par les grandes voies d'eau dont ils ont fait un outil conceptuel, à travers leurs différentes disciplines :...

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