Sorti renforcé de l'accord nucléaire avec les grandes puissances, le président iranien Hassan Rohani va devoir affronter d'autres défis jusqu'alors délaissés en Iran pour faire triompher sa ligne modérée, selon des experts.
Une nouvelle page s'ouvre en effet pour M. Rohani. Les deux premières années de son mandat de quatre ans ont été dominées par la tâche immense de faire aboutir les négociations sur le nucléaire. Il a dû pour cela combattre l'opposition à sa politique diplomatique des conservateurs les plus durs. Si les Iraniens se sentent soulagés par cet accord qui, grâce à la levée des sanctions, devrait permettre de rompre leur isolement économique, ils n'en oublient pas pour autant les autres promesses faites par Hassan Rohani avant son élection en 2013, souligne Davoud Hermidas Bavand, analyste politique à l'Université de Téhéran. « L'accord a créé un sentiment de joie, cela ne fait aucun doute, mais il y a maintenant de gros problèmes (à résoudre) dans notre société, résume-t-il. Une fenêtre s'est ouverte et M. Rohani doit saisir cette opportunité pour y faire face. »
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« Prisonniers politiques »
Ce qui l'attend désormais « ce ne sont pas seulement des problèmes économiques » mais aussi la question « des prisonniers politiques », affirme l'expert. Avant son élection, Rohani avait souligné le besoin de résoudre cet épineux problème, en particulier concernant tous ceux qui avaient été emprisonnés après la réélection contestée en 2009 de son prédécesseur Mahmoud Ahmadinejad. « J'espère que, d'ici à un an, une situation aura été créée permettant non seulement de libérer ceux qui sont assignés à résidence, mais aussi ceux qui ont été emprisonnés à cause de 2009 », avait déclaré le candidat Rohani pendant la campagne électorale en 2013. Il répondait à des étudiants qui lui demandaient ce qu'il ferait concernant l'assignation à résidence de Mir Hossein Moussavi et de Mehdi Karroubi, candidats à la présidentielle ayant dénoncé l'élection « frauduleuse » d'Ahmadinejad en 2009. Mais jusqu'alors Rohani n'a pas réglé la question de ces assignations à résidence. Or, estime M. Bavand, « s'il veut entrer dans l'histoire, il ne peut pas en rester là, il doit prendre des risques ».
Cap sur les législatives
Les élections législatives de février 2016 pourraient constituer un tournant. Depuis qu'il est au pouvoir, Hassan Rohani a été confronté à la résistance d'un Parlement très conservateur – y compris concernant les négociations nucléaires – et un clergé puissant. Mais le soutien de la population et l'élan politique créé par l'accord nucléaire – seulement rendu possible parce que le guide suprême, Ali Khamenei, l'a soutenu – sont une chance pour Rohani et ses alliés de créer les conditions en vue de l'élection d'un Parlement plus modéré l'an prochain. Saeed Laylaz, économiste de tendance réformatrice, estime que le président doit pour cela user du renforcement de son influence au sein du régime. « L'accord nucléaire est une grande victoire pour Rohani. Il peut l'utiliser pour créer une coalition de réformistes (...) et essayer de marchander avec le Conseil pour qu'il accepte plus de candidats modérés. C'est son boulot le plus important », souligne Laylaz, en faisant référence au Conseil des gardiens de la révolution qui examine les candidatures avant le scrutin.
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Et si Israël n'était pas « réellement » menacé par l'Iran ?
Mais oui, servir la soupe aux äsraéliens et aux américains....
12 h 53, le 18 juillet 2015