Le jurd de Ersal en proie à une activité militaire anormalement intense

Conformément aux prises de position du ministre de la Défense, Samir Mokbel, qui assurait il y a quelques jours qu'« il faut séparer Ersal de son jurd », l'armée libanaise a bombardé hier aux obus de mortier et aux roquettes les postes des terroristes dans le jurd, s'abstenant de cibler la localité, au grand dam du Hezbollah. Le parti chiite a en effet poursuivi sa campagne, appelant une fois de plus la troupe à intervenir à Ersal même.
Une force de l'armée avait renforcé samedi son déploiement dans le jurd situé entre les deux localités de Kaa et de Fakiha dans le nord de la Békaa, dans une tentative de mettre fin à toute infiltration jihadiste en territoire libanais. Les services de renseignements militaires avaient aussi arrêté vendredi soir dans le village de Laboué un Syrien qui se dirigeait vers Ersal en provenance de Zahlé. L'homme s'apprêtait à rejoindre les groupes armés, étant lui-même à la tête d'un groupe de combattants islamistes.

De son côté, la chaîne du Hezbollah, al-Manar, a rapporté hier que le Front el-Nosra s'est replié vers le jurd de Ersal et que l'armée syrienne et les combattants du parti chiite ont pris le contrôle du jurd de Flita ainsi que de nombreuses collines dans le jurd de Ersal et dans le Qalamoun syrien. Selon al-Manar, ces collines surplombent directement des positions de l'État islamique dans le village de Jarajir et auraient été prises par le Hezbollah au terme de combats qui ont fait des dizaines de morts. Des combattants du parti ont effectivement été inhumés hier dans la banlieue sud de Beyrouth, au son de roquettes de type RPG, qui ont retenti comme des explosions dans toute la capitale. La chaîne a affirmé par ailleurs que le parti chiite avait aussi pris le contrôle de Wadi el-Kahban, Wadi el-Dabboul et al-Rahwa au sud-est de Ersal, avant de mener un assaut contre l'EI à Jarajir. Les combattants du Hezbollah auraient enfin donné l'assaut à une grotte où résidait « l'émir » du Front el-Nosra, Abou Malek al-Tallé, dans la région du Qalamoun. Des armes et des documents y auraient été saisis.
Pour mémoire, Abou Malek el-Tallé est celui qui gère le dossier des militaires libanais pris en otages depuis le mois d'août, faisant souvent part des revendications de son groupe dans les négociations avec le gouvernement pour la libération des soldats et policiers. Un dossier qui a été affecté par les batailles aux frontières libanaises.
Hier, Nizam Mghayt, frère de l'otage Ibrahim Mghayt, a publié un communiqué dans lequel il s'interroge sur « le destin des otages après la bataille du jurd ». « Les militaires enlevés devront-ils payer le prix de cette aventure et de l'absence de l'État ? », a-t-il ajouté, en allusion aux batailles menées par le Hezbollah dans le Qalamoun syrien et le jurd de Ersal.

Par ailleurs, et apparemment dans le cadre de la guerre psychologique menée par les groupuscules jihadistes contre l'État libanais afin de mettre un terme à la bataille du jurd, un inconnu a envoyé hier des photos sur la page Facebook « Nouvelles de Ersal » sur lesquelles on peut voir les otages druzes et chrétiens Maher Fayad, Maymoun Jaber, Georges Khazaka et Georges Khoury portant les armes pour soi-disant combattre le Hezbollah et « survivre à la guerre du jurd ». Si Nizam Mghayt s'est abstenu de tout commentaire, Hussein Youssef, père d'un des otages, a estimé que les militaires ont sûrement agi sous la pression, alors que le site Lebanonfiles affirmait que les images étaient truquées.
Pendant ce temps, le député du Hezbollah, Hassan Fadlallah, a appelé une nouvelle fois à « assurer à l'armée une couverture pour libérer Ersal », affirmant : « Nous poursuivrons notre bataille contre les takfiristes qu'ils soient en territoire libanais ou ailleurs. » Le ministre de l'Industrie, Hussein Hajj Hassan, a pour sa part estimé que « Ersal veut revenir dans le giron de la patrie » et que « l'armée a besoin du feu vert du gouvernement pour la récupérer ». Même son de cloche du côté du cheikh Nabil Kaouk, qui a déclaré que les victoires de la Résistance dans le Qalamoun syrien et dans le jurd de Ersal sont pour tout le Liban, appelant les responsables du 14 Mars à « ne pas se sentir vaincus ».
Hier, le député du bloc du Futur, Hadi Hobeiche, a répondu à ces appels en affirmant : « Nous refusons qu'on impose une bataille à l'armée au moment qui soit convenable pour une partie politique déterminée, afin de la protéger dans une bataille menée à l'extérieur du Liban. » « Il revient à l'armée de décider de ce qui est convenable pour la protection du pays et du timing de la bataille de Ersal », a-t-il précisé.

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