Depuis bientôt un an, l'élection présidentielle tourne à vide et la stratégie des obstructionnistes et des absents, au drame et à la mascarade, à moins que !...
Un nouvel épisode est engagé ces derniers jours par le CPL sous la houlette de son chef, l'honorable et charismatique général. Cette personnalité de l'échiquier politique libanais, qui a su retenir directement ou indirectement l'attention du peuple libanais depuis presque trente ans, est l'artisan en politique « des coups de boutoir », mais il est aussi celui des « coups d'épée dans l'eau », en tout cas c'est ainsi qu'il apparaît au regard de l'observateur indépendant qui essaye de suivre les méandres de son parcours atypique, indéfinissable et très souvent énigmatique !
Depuis son retour de France, le général multiplie les actions sur la scène interne, dont le document d'entente avec le Hezbollah et une campagne populiste de récupération des intérêts spoliés des chrétiens après la guerre libanaise de 1975. Cette démarche semblait apparemment réfléchie et planifiée, puisqu'à la clé, il avait réussi à avoir le plus grand groupe parlementaire à l'Assemblée nationale et la plus grande force de blocage. Mais là où le bât blesse et devient sujet à interrogation, c'est qu'au lieu de raffermir et consolider les liens interchrétiens, il a créé au contraire une profonde division. Son dialogue d'ailleurs avec ses contradicteurs, toutes origines et formations confondues, ne pourra se concrétiser réellement et être conforté, que grâce à son alliance avec le parti de Dieu, qui est devenu de ce fait le véritable arbitre de la situation, non seulement au sein du camp chrétien, mais aussi sur la scène nationale dans son ensemble. De seul maître de ses destinées politiques, il est devenu en fait quasiment dépendant de son alliance avec ledit parti. Il se doit en effet de partager désormais toutes les décisions stratégiques de ce dernier, dont les objectifs sont prioritairement régionaux et directement soumis à des intérêts et axes extérieurs et donc profondément contradictoires avec ceux de la nation. Ce virage politique était en effet étonnant et inattendu pour deux raisons majeures : d'une part, il s'inscrivait en porte-à-faux avec son action souverainiste tout au long de sa carrière au sein de la « Grande Muette », à laquelle, d'ailleurs, il avait fait serment d'allégeance inconditionnelle et, d'autre part, parce qu'il imposait à sa base un environnement sociopolitique qui n'était pas le sien, et la mettait, malgré elle, face à une autre partie des chrétiens, avec laquelle elle avait lutté contre la tutelle syrienne et ses alliés, le parti de Dieu !...
Depuis ce choix rien ne va plus, même si l'auteur de cette entreprise ne veut pas ou ne peut pas le reconnaître. Trop d'événements importants se sont en effet déroulés depuis ce « mariage de raison », tant au niveau national que régional, qu'ils ont imposé des points de non-retour et un rapport de force entièrement en faveur du Hezbollah. Au lieu de profiter de cette alliance, le CPL a été constamment instrumentalisé par ce dernier, qui a réussi dans les moments de crise interne grave, grâce au document d'entente en question, à neutraliser la scène politique à son avantage, même si les enjeux du moment allaient aux dépens de la sécurité intérieure et de la souveraineté nationale. Dans cette ambiance survoltée et cette profonde césure verticale, il devenait carrément impossible de réhabiliter l'État des institutions et de voter pour des lois devant permettre de remettre en marche une République prise en otage par un parti soutenu de l'étranger, doté de moyens financiers infinis, de quantités d'armes sophistiquées et allié au CPL, et enfin et surtout d'élire un président de la République chrétien fort, il est vrai, mais aussi et surtout agréé par toutes les composantes politiques nationales...
Trois questions s'imposent donc à la fin de cet état des lieux rapide et circonstancié. Elles s'adressent tout d'abord à cet acteur politique incontournable de l'histoire contemporaine du Liban, le général Aoun, et ensuite à tous ceux qui le suivent :
– Ont-ils eu raison d'avoir fait les choix stratégiques qui ont été les leurs ?
– Continuent-ils à croire à une résurrection possible du Liban de 1943 et de sa Sigha, malgré la mainmise prolongée à ce jour de leur allié sur tout le pays ?
– Ne pensent-ils pas qu'il est encore temps, pour éviter le naufrage du navire « LIBAN », de tenter :
+ soit de ramener définitivement et irrévocablement le Hezbollah au « bercail » national, et de le convaincre d'agir sous la bannière exclusive de l'armée libanaise.
+ soit d'annoncer clairement et officiellement, en cas de refus du parti de Dieu de la susdite proposition, la séparation entre les deux formations et la fin du document d'entente signé entre les deux partis ?...
Ce ne sera en tout cas que de cette façon que le général et son parti pourront réhabiliter le destin souverainiste et nationaliste pour lequel ils ont naguère longtemps milité et pour lequel bon nombre de leurs partisans sont tombés au champ d'honneur ! C'est ainsi aussi que la sérénité se rétablira au cœur de la nation et qu'il sera alors possible d'aller en toute démocratie élire un président de la République à la hauteur des attentes du peuple libanais sevré depuis trop longtemps.
Salim F. DAHDAH
Nos Lecteurs ont la Parole - Les lecteurs ont dit... sur la vacance présidentielle
Jusqu’où le général Aoun assumera-t-il le blocage de la présidentielle ?
OLJ / Par Salim F. DAHDAH, le 27 mai 2015 à 00h00
commentaires (3)
Oui, Monsieur Dahdah, vous avez raison, cent fois raison, et vous le dites cent fois plus clairement que tout autre, en ne machant pas vos mots, comme d'autres, et en mettant les points sur les i.J'aimerais pourtant m'aventurer a ajouter une derniere constatation, en relation avec les reformes.Ces dernieres, sont, a mon humble avis d'une importance aussi egale, sinon superieures a l'independance politique du pays. Leur quasi absence qui est superbement ignoree a la fois par le Hezbollah et par le parti ironiquement appele celui de la "Reforme et du Changement", risque de conduire inevitablement le Liban vers une vassalization economique, sociale, et financiere qui serait, de loin plus effective que toute autre domination politique.Est-ce la le but envisage? Allah Yestour!
George Sabat
08 h 36, le 28 mai 2015