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Économie

Grille des salaires : dis, pourquoi on n’arrive pas à s’entendre ?

Ça discute, ça gigote, ça s'agite, ça se veut au mieux démocrate, au pire démagogue place de l'Étoile depuis bientôt trois ans. Défenseurs des droits des plus vulnérables ou gardiens des intérêts des hommes d'affaires, à l'aube des législatives, les 128 ont intérêt à s'armer d'arguments solides pour défendre leurs points de vue ; on ne va tout de même pas fâcher les urnes.


Le débat autour de la grille des salaires a réveillé plusieurs démons. Au-delà d'un débat syndicats-patronat, c'est tout le modèle économique libanais qui risque, pour la première fois, d'être remis en question... Ce n'est pas tant un bras de fer entre les plus nantis et les laissés-pour-compte, ni une (énième) guéguerre 8/14, ni même la rencontre des névroses confessionnelles et identitaires des uns et des autres. Si ces clashs sont toutefois mis en avant, c'est qu'aujourd'hui le libéralisme économique libanais qu'on a longtemps tari d'éloges est en perte de vitesse.


Des années durant, le Liban s'est targué d'être le récipiendaire des pétrodollars de la région. Longtemps, on a érigé son secteur bancaire en modèle unique régional. On a encensé la qualité de ses services, mis en exergue ses qualités géographiques et météorologiques, loué ses capacités linguistiques, ses ressources humaines, son aptitude d'adaptation aux situations les plus contraignantes... Et voilà que le débat autour de la grille des salaires donne un coup de pied à tous ces acquis, tous ces clichés auxquels on s'accroche bon an mal an.


Le mouvement de protestations mené par le Comité de coordination syndical (CCS) dérange. Et pour cause, il vient rappeler à notre bon souvenir le poids non négligeable des mouvements syndicaux des années 70, il réussit à effacer les pseudorevendications poussiéreuses et vides d'une CGTL cooptée par les désirs d'un président de la Chambre plus omniprésent qu'omnipotent. Alors évidemment les squelettes enfoncés depuis trop longtemps dans les placards ressurgissent ; et le « coming-out » est rude... Si les discussions autour des moyens de financement de la grille sont interminables, c'est qu'elles mettent en avant toutes les nuances fétides de la mauvaise gestion de l'État depuis plusieurs décennies. Il faut renflouer les caisses de l'État et vite. Naturellement la question « comment ? » s'impose.


L'État, les organismes économiques et les syndicats ne peuvent plus se voiler la face. C'est que la réalité finit toujours par nous rattraper et, pour le coup, elle n'est pas belle à voir. Il va falloir s'armer de détermination, de courage et de transparence pour toucher à des dossiers épineux. Le pari est loin d'être gagné. Vidanger des administrations publiques désuètes, enclencher un véritable chantier de réformes qui risquent de bouleverser les racines trop ancrées d'un clientélisme rampant, oser dénoncer les irrégularités des biens-fonds maritimes spoliés, reconsidérer les transferts aberrants à l'EDL, et par suite tous les services étatiques (absents) et surtout repenser le rôle d'un État qui a trop longtemps refusé de se remettre en question... Bref, un magma de réalités qui risque d'exploser à la face d'un système où la fameuse formule d'Adam Smith « laisser-faire-laisser-aller » ne fonctionne plus ou du moins par soubresauts qui risquent aujourd'hui d'être fatals. Il faut apporter de véritables réponses, mais surtout des solutions, des vraies. Il est grand temps de se pencher sur le rôle véritable que doit jouer l'État. Les USA ont eu leurs crises des subprimes, l'Europe, sa crise de l'euro... Le Liban doit impérativement saisir l'enjeu (ou le prétexte) de la grille des salaires pour regarder les réalités en face. L'afflux des réfugiés syriens et la pression de l'échéance présidentielle et celle des législatives n'aidant pas, c'est maintenant ou jamais.
Ça fait mal et ça ne fait rien...

 

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commentaires (2)

CAR LA GRILLE EST FAITE DE BARBELÉS ! GARE D'Y TOMBER DEDANS !

LA LIBRE EXPRESSION

16 h 11, le 16 mai 2014

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Commentaires (2)

  • CAR LA GRILLE EST FAITE DE BARBELÉS ! GARE D'Y TOMBER DEDANS !

    LA LIBRE EXPRESSION

    16 h 11, le 16 mai 2014

  • Excellente analyse, claire, nette, précise et superbement écrite.

    ANTOINE-SERGE KARAMAOUN

    14 h 40, le 16 mai 2014

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