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Le patriarche Méouchi avait raison

Au début du mois d'avril 1970, soit quelques mois après la première grande crise entre l'État libanais et les organisations palestiniennes armées, le patriarche maronite Paul Méouchi adressait au président Charles Hélou une lettre lançant un cri d'alarme au sujet du laxisme manifesté par le pouvoir face à la spoliation systématique de la souveraineté libanaise par l'OLP. Le cardinal Méouchi soulignait dans sa lettre que la poursuite de la « politique de concessions » devant les débordements palestiniens armés mènera le pays à la catastrophe. Il avait visé juste. En 1973, le président Sleimane Frangié fut amené à croiser le fer avec l'OLP, engageant l'armée libanaise dans une bataille contre les camps palestiniens. Il fut toutefois contraint de faire marche arrière sous la pression du président Hafez el-Assad, avec qui il entretenait pourtant des liens familiaux très étroits. L'échec de ce sursaut du pouvoir central a abouti au déclenchement de la guerre libanaise et à l'éclatement de l'État, en avril 1975.
Ce rapide « flash back » illustre le caractère fallacieux du slogan de la « modération » brandi ici ou là à chaque échéance cruciale. De bonne foi, le président Hélou avait joué cette carte de la conciliation en 1969 lors du conflit avec l'OLP. La suite des événements devait prouver qu'un tel choix n'avait fait qu'aggraver le problème de fond.


Le Liban se trouve aujourd'hui dans une situation quelque peu similaire : l'émergence d'un mini-État de facto (celui du Hezbollah) qui engage le pays dans des conflits régionaux et prend l'ensemble des Libanais en otages pour consolider son ancrage à la République des mollahs de Téhéran ; et pour être en mesure de se maintenir dans l'orbite de son parrain iranien, il bafoue quotidiennement le pouvoir central, noyaute l'appareil étatique et certains cercles politiques, fait fi des impératifs de la souveraineté ; tout cela sans se soucier outre mesure des fragiles équilibres intercommunautaires.


À la faveur de l'élection présidentielle, les Libanais se trouvent devant une opportunité historique de freiner cette descente aux enfers en faisant le choix d'élire un président qui ait suffisamment d'envergure et une vision d'avenir claire, qui ait fait preuve de cohérence et de constance dans son comportement politique souverainiste et qui bénéficie d'un soutien populaire transcommunautaire solide, lui permettant de ne jamais louvoyer, de ne jamais transiger sur tout ce qui touche à la souveraineté, à l'autorité de l'État central, aux fondements de la Constitution et à l'esprit du pacte national. En clair, un chef de l'État capable de consolider davantage la feuille de route que le président Michel Sleiman a définie courageusement ces derniers mois.
Prôner l'élection d'un président « modéré » et « consensuel » reviendrait à prolonger le pourrissement en torpillant l'opportunité historique qui s'offre aujourd'hui au pays du Cèdre. Cela aurait pour effet de commettre la même erreur qu'en 1969, avec toutes ses conséquences. Il en résultera que le Hezbollah continuera à prendre en otage le nouveau président, et avec lui le futur gouvernement et l'ensemble de la population, pour aller de l'avant dans son projet de transformation de la société libanaise en société guerrière au service de la Raison d'État iranienne. Hassan Nasrallah n'a-t-il pas souligné dans son dernier discours que « la résistance est une culture », un mode de pensée ?


Il ne faudrait pas toutefois s'y méprendre. L'objectif de l'élection d'un président faisant preuve de détermination dans son refus de la « politique de concessions » n'a pas pour but de mener une guerre ouverte au Hezbollah. L'objectif recherché est plutôt d'établir une nouvelle donne au niveau de l'exercice du pouvoir – fondée sur la détermination, sur le rejet de la compromission – afin de créer les conditions favorables susceptibles d'amener le Hezbollah à nuancer son allégeance dogmatique à Téhéran pour qu'il revienne dans le giron libanais, qu'il soit respectueux des pratiques démocratiques.
Utopie ? Peut-être. Mais à la faveur de la présidentielle, les Libanais n'ont d'autre choix que de tenter de jouer cette carte. À défaut, le pays restera l'otage d'un jeu qui a pour effet d'accentuer la déstabilisation, l'effritement de l'État, le marasme économique et donc la crise sociale.


L'intérêt d'un tel sursaut salvateur n'est pas uniquement libanais. Il est aussi occidental. Car laisser le Hezbollah poursuivre sa fuite en avant reviendrait à consolider ce que ce parti est devenu : le catalyseur, l'aimant attracteur, des groupuscules jihadistes sunnites, au Liban et en Syrie. Si ce rôle de catalyseur n'est pas neutralisé, le spectre du terrorisme risquerait alors de déborder du terreau libanais pour atteindre en plein cœur les pays occidentaux les plus en vue.

Au début du mois d'avril 1970, soit quelques mois après la première grande crise entre l'État libanais et les organisations palestiniennes armées, le patriarche maronite Paul Méouchi adressait au président Charles Hélou une lettre lançant un cri d'alarme au sujet du laxisme manifesté par le pouvoir face à la spoliation systématique de la souveraineté libanaise par l'OLP. Le cardinal...

commentaires (3)

Il faut en finir avec les concessions. Même le Général Aoun le sait bien, c'est pourquoi il a annonce que si Dr. Geagea se pressentait il ne le ferai pas. Il ferai même mieux en refusant de se présenter du tout. Le Hezbollah ne changera que lorsqu'il perdra toute sa crédibilité. Elle en partie bien entamé mais il faut encore lui couper son financement, les livraisons d'armes se doivent d’être toutes saisies et tous ces membres mêlés aux crimes qui leurs sont imputés arrêtés. Cela fait il suffit de remonter la filière pour arriver a Hassan Nasrallah, Raad et les autres. Alors nous aurons la paix et la possibilité de créer un état digne du nom. C'est pas trop loin. Il nous faut encore un peu de patience. Mais nous y sommes presque.

Pierre Hadjigeorgiou

09 h 03, le 08 avril 2014

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Commentaires (3)

  • Il faut en finir avec les concessions. Même le Général Aoun le sait bien, c'est pourquoi il a annonce que si Dr. Geagea se pressentait il ne le ferai pas. Il ferai même mieux en refusant de se présenter du tout. Le Hezbollah ne changera que lorsqu'il perdra toute sa crédibilité. Elle en partie bien entamé mais il faut encore lui couper son financement, les livraisons d'armes se doivent d’être toutes saisies et tous ces membres mêlés aux crimes qui leurs sont imputés arrêtés. Cela fait il suffit de remonter la filière pour arriver a Hassan Nasrallah, Raad et les autres. Alors nous aurons la paix et la possibilité de créer un état digne du nom. C'est pas trop loin. Il nous faut encore un peu de patience. Mais nous y sommes presque.

    Pierre Hadjigeorgiou

    09 h 03, le 08 avril 2014

  • Tout à fait exact. Si cette fois, le 14 Mars ne montre pas une cohésion à toute épreuve et s'il ne met pas un frein efficace à l'hégémonie irano-syrienne du Hezbollah sur le destin de ce pays, par l'élection d'un président 100% de sa ligne politique, alors vraiment et définitivement il est le 14 NULLITE.

    Halim Abou Chacra

    04 h 53, le 08 avril 2014

  • Changer le Hezbollah?? A la saint glinglin! Le Liban ne trouvera son salut qu s il decidait de voter pour un President pur produit national et non pas un consensuel produit par des forces externes, iraniennes, syriennes ou seiudiennes.

    IMB a SPO

    02 h 41, le 08 avril 2014

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