Soupe aux neurones

À quelques enjambées de l'échéance présidentielle, le jeu des chaises musicales reprend ses droits. Forcément, il
y a trop de paires de fesses pour un seul fauteuil, mais la musique reste la même. Mission : plonger le Libanais de base dans la soupe aux neurones et empêcher tout frémissement de son encéphalogramme plat.
Dernier cirque en date : la sarabande alternée d'Orangina et du Tondu pour convaincre chacun ses ouailles que lui, et lui seul, sera le « président fort » dont cette République de poche a besoin. Le poing sur la table, le pied dans la termitière... Le culte de la force est une donnée culturelle essentielle chez les Arabes.
Alors, évidemment ça gesticule des deux côtés. D'abord le Tsunamichel grognon s'est quelque peu rabiboché avec le Barbichu gavé de pognon. Ses démangeaisons présidentielles étaient devenues si tenaces qu'il a fini par se laisser convaincre de serrer la paluche de celui qu'il traitait il n'y a pas si longtemps de « baltringue des sables », de « nullard des palmiers » et d'« accessoire saoudien ». Quant au Déboisé, il essaye de raccrocher les wagons avec le Parti barbu, en vain jusque-là en raison sans doute du déséquilibre stratégique en terme de pilosité crânienne.
En attendant, on nous gave de portraits robot en forme de scoops palpitants : le prochain président sera avant tout un être humain libanais. Il aura deux mains, deux pieds, deux yeux et une paire de narines. Il prendra trois repas par jour, plus un goûter si la situation économique le permet. Le futur châtelain de Baabda sera honnête, donc impassible même devant une valise bourrée de billets. Il aimera également le Liban, ce qui est facile, et les Libanais, ce qui l'est moins. Si l'on ajoute à tout cela qu'il ne boit pas, ne fume pas et promet de ne pas culbuter les petites stagiaires du palais, on obtiendra un ectoplasme plus robot que portrait, qui plaira à tout le monde. Autrement dit à n'importe qui...
Mais pour l'heure, les yeux restent braqués sur le Parlement. Dans l'espoir d'entendre un jour lointain le « son du quorum, le soir, au fond de la langue de bois ».

gabynasr@lorientlejour.com